vendredi 30 avril 2010

St Jean Chrysostome, Dieu n'est pas loin de nous




Surnommée le "docteur de l'eucharistie", saint Jean Chrysostome + 407, "bouche d'or", archevêque de Constantinople, a laissé son nom à une liturgie de la messe, pratiquée encore aujourd'hui par des millions d'Orientaux.


Saint Jean Chrysostome commente ici le discours de Paul à Athènes.


Dieu n’est pas loin de chacun de nous

Personne n’est obligé d’aller çà et là à la recherche de Dieu. Ou, plutôt, Dieu a ordonné qu’on le cherche, mais il n’a pas demandé de le faire tout le temps, mais en fixant la durée, Ac 17,26. Paul, veut montrer par là que même ceux qui aujourd’hui l’ont cherché ne l’ont pas trouvé, bien qu’il ait été facile à trouver, au point qu’on pouvait le toucher. En effet, le ciel n’est pas absent ici et présent ailleurs, ni absent à ce moment et présent à un autre. Ainsi, il est possible de le trouver en tout temps et quelles que soient les frontières. Dieu a fait en sorte qu’on le cherche sans être empêché ni par le lieu ni par le temps. Et il aurait été hautement profitable aux hommes de comprendre que le ciel est partout et en tout temps, si seulement ils avaient voulu le chercher. Voilà pourquoi Paul dit : Lui qui, en vérité, n’est pas loin de chacun de nous, Ac 17,27, mais est proche de nous. Voici ce qu’il veut dire : non seulement il nous a donné la vie, le souffle, Ac 17,25 et tout le reste, mais, le plus important de tout, c’est qu’ils nous a amenés à le connaître par ces dons qui nous permettent de le trouver et de le saisir. Mais nous n’avons pas voulu le chercher, alors qu’il est à nos pieds, lui qui n’est pas loin, dit Paul de chacun de nous. Ciel ! il a dit qu’il était proche de tous les êtres qui sont partout sur cette terre. Qu’il y a-t-il de mieux ? Vois comme il purifie ceux qui ont une vision partielle. Pourquoi dire « loin » ? Il est si proche que, sans lui, on ne peut vivre !

mercredi 21 avril 2010

Saint Grégoire le Grand, extrait sermon sur le bon pasteur


Saint Grégoire et l'Angleterre



La chapelle de St Grégoire et St Augustin
située dans la Cathédrale catholique de Westminster (Londres) retrace l'histoire de l'évangélisation de l'Angleterre à la fin du VIe siècle.
Voici un détail de la mosaïque au dessus de l'autel représentant Saint Grégoire le Grand et Saint Augustin de Cantorbéry:



La Parabole du berger,
St Jean 10,1-20

En ce temps-là, Jésus dit aux pharisiens : «Je suis le Bon Pasteur". Le Bon Pasteur donne sa vie pour ses brebis. Le mercenaire, celui qui n’est pas le pasteur, à qui les brebis n’appartiennent pas, voit-il venir le loup, il abandonne les brebis et s’enfuit. Et le loup les emporte et les disperse. Le mercenaire s’enfuit parce qu’il est mercenaire et qu’il ne se soucie pas des brebis.

«Je suis le Bon Pasteur; je connais mes brebis et mes brebis me connaissent, comme le Père me connaît et que je connais le Père. Et je donne ma vie pour mes brebis. J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cette bergerie; celles-là aussi, il faut que je les conduise; et elles écouteront ma voix, et il y aura une seule bergerie et un seul Pasteur.»

Vous avez entendu, frères très chers, l’instruction qui vous est adressée par la lecture d’Evangile; vous avez entendu aussi le péril que nous courons. Voici en effet que celui qui est bon, non par une grâce accidentelle, mais par essence, déclare : «Je suis le Bon Pasteur.» Et nous donnant le modèle de la bonté que nous devons imiter, il ajoute : «Le Bon Pasteur donne sa vie pour ses brebis.» Il a fait ce qu’il nous a enseigné; il a montré ce qu’il nous a ordonné. Le Bon Pasteur a donné sa vie pour ses brebis au point de changer son corps et son sang en sacrement pour nous, et de rassasier par l’aliment de sa chair les brebis qu’il avait rachetées.

Il nous a tracé la voie du mépris de la mort, pour que nous la suivions; il a placé devant nous le modèle auquel nous devons nous conformer : dépenser d’abord nos biens extérieurs en toute charité pour les brebis du Seigneur, et si nécessaire, donner même à la fin notre vie pour elles. La première forme de générosité, qui est moindre, conduit à cette dernière, qui est plus élevée. Mais puisque l’âme, par laquelle nous vivons, est incomparablement supérieure aux biens terrestres que nous possédons au-dehors, comment celui qui ne donne pas de ses biens à ses brebis serait-il disposé à donner sa vie pour elles?

Car il en est qui ont plus d’amour pour les biens terrestres que pour les brebis, et qui perdent ainsi à bon droit le nom de pasteur. C’est d’eux que le texte ajoute aussitôt après : «Le mercenaire, celui qui n’est pas le pasteur, à qui les brebis n’appartiennent pas, voit-il venir le loup, il abandonne les brebis et s’enfuit.»
2. Il n’est pas appelé pasteur, mais mercenaire, celui qui fait paître les brebis du Seigneur, non parce qu’il les aime du fond du cœur, mais en vue de récompenses temporelles. Il est mercenaire, celui qui occupe la place du pasteur, mais ne cherche pas le profit des âmes. Il convoite avidement les avantages terrestres, se réjouit de l’honneur de sa charge, se repaît de profits temporels et se complaît dans le respect que lui accordent les hommes. Telles sont les récompenses du mercenaire : il trouve ici-bas le salaire qu’il désire pour la peine qu’il se donne dans sa charge de pasteur, et se prive ainsi pour l’avenir de l’héritage du troupeau.

Tant que n’arrive aucun malheur, on ne peut pas bien discerner s’il est pasteur ou mercenaire. En effet, au temps de la paix, le mercenaire garde ordinairement le troupeau tout comme un vrai pasteur. Mais l’arrivée du loup montre avec quelles dispositions chacun gardait le troupeau. Un loup se jette sur les brebis chaque fois qu’un homme injuste ou ravisseur opprime les fidèles et les humbles. Celui qui semblait être le pasteur, mais ne l’était pas, abandonne alors les brebis et s’enfuit, car craignant pour lui-même le danger qui vient du loup, il n’ose pas résister à son injuste entreprise. Il fuit, non en changeant de lieu, mais en refusant son assistance. Il fuit, du fait qu’il voit l’injustice et qu’il se tait. Il fuit, parce qu’il se cache dans le silence. C’est bien à propos que le prophète dit à de tels hommes : «Vous n’êtes pas montés contre l’ennemi, et vous n’avez pas construit de mur autour de la maison d’Israël pour tenir bon dans le combat au jour du Seigneur.»

Ez 13, 5. Monter contre l’ennemi, c’est s’opposer par la voix libre de la raison à tout homme puissant qui se conduit mal. Nous tenons bon au jour du Seigneur dans le combat pour la maison d’Israël, et nous construisons un mur, quand par l’autorité de la justice, nous défendons les fidèles innocents victimes de l’injustice des méchants. Et parce que le mercenaire n’agit pas ainsi, il s’enfuit lorsqu’il voit venir le loup.

3. Mais il y a un autre loup, qui ne cesse chaque jour de déchirer, non les corps, mais les âmes : c’est l’esprit malin. Il rôde en tendant des pièges autour du bercail des fidèles, et il cherche la mort des âmes. C’est de ce loup qu’il est question tout de suite après : «Et le loup emporte les brebis et les disperse.» Le loup vient et le mercenaire fuit, quand l’esprit malin déchire les âmes des fidèles par la tentation et que celui qui occupe la place du pasteur n’en a pas un soin attentif. Les âmes périssent, et il ne pense, lui, qu’à jouir de ses avantages terrestres. Le loup emporte les brebis et les disperse : il entraîne tel homme à la luxure, enflamme tel autre d’avarice, exalte tel autre par l’orgueil, jette tel autre dans la division par la colère; il excite celui-ci par l’envie, renverse celui-là en le trompant. Comme le loup disperse le troupeau, le diable fait mourir le peuple fidèle par les tentations.

Mais le mercenaire n’est enflammé d’aucun zèle ni animé d’aucune ferveur d’amour pour s’y opposer : ne recherchant en tout que ses avantages extérieurs, il n’a que négligence pour les dommages intérieurs du troupeau. Aussi le texte ajoute-t-il aussitôt : «Le mercenaire s’enfuit parce qu’il est mercenaire et qu’il ne se soucie pas des brebis.» En effet, la seule raison pour laquelle le mercenaire s’enfuit, c’est qu’il est mercenaire. C’est comme si l’on disait clairement : «Demeurer au milieu des brebis en danger est impossible à celui qui conduit les brebis, non par amour des brebis, mais par recherche de profits terrestres.» Car du fait qu’il s’attache aux honneurs et se complaît dans les avantages terrestres, le mercenaire hésite à s’opposer au danger, pour ne pas perdre ce qu’il aime.

Après nous avoir montré les fautes du faux pasteur, notre Rédempteur revient sur le modèle auquel nous devons nous conformer, quand il affirme : «Je suis le Bon Pasteur.» Et il ajoute : «Je connais mes brebis — c’est-à-dire : je les aime — et mes brebis me connaissent», comme pour dire clairement : «Elles me servent en m’aimant.» Car il ne connaît pas encore la Vérité, celui qui ne l’aime pas.

4. Maintenant que vous avez entendu, frères très chers, quel est notre péril, considérez également, dans les paroles du Seigneur, quel est le vôtre. Voyez si vous êtes de ses brebis, voyez si vous le connaissez, voyez si vous percevez la lumière de la Vérité. Précisons : si vous la percevez, non par la seule foi, mais par l’amour. Oui, précisons : si vous la percevez, non en vous contentant de croire, mais en agissant. En effet, le même évangéliste Jean qui parle dans l’évangile de ce jour déclare ailleurs : «Celui qui dit connaître Dieu, mais ne garde pas ses commandements, est un menteur.», 1 Jn 2, 4. C’est pourquoi ici le Seigneur ajoute aussitôt : «Comme le Père me connaît et que je connais le Père. Et je donne ma vie pour mes brebis.» C’est comme s’il disait clairement : «Ce qui prouve que je connais le Père et que je suis connu du Père, c’est que je donne ma vie pour mes brebis; je montre combien j’aime le Père par cette charité qui me fait mourir pour mes brebis.»

Mais parce qu’il était venu racheter, non seulement les Juifs, mais aussi les païens, il ajoute : «J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cette bergerie; celles-là aussi, il faut que je les conduise; et elles écouteront ma voix, et il y aura une seule bergerie et un seul Pasteur.» C’est notre rédemption à nous, venus des peuples païens, que le Seigneur avait en vue lorsqu’il parlait de conduire aussi d’autres brebis. Et cela, mes frères, vous pouvez en constater chaque jour la réalisation. C’est ce que vous voyez aujourd’hui accompli dans la réconciliation des païens. Il a pour ainsi dire constitué une seule bergerie avec deux troupeaux, en réunissant les peuples juif et païen dans une même foi en sa personne, comme l’atteste Paul par ces paroles : «Il est notre paix, lui qui des deux peuples n’en a fait qu’un.», Ep 2, 14. Il conduit les brebis à sa propre bergerie quand il choisit pour la vie éternelle des âmes simples de l’un et l’autre peuple.

5. C’est de ces brebis que le Seigneur dit ailleurs : «Mes brebis écoutent ma voix, et je les connais, et elles me suivent, et je leur donne la vie éternelle.», Jn 10, 27-28. C’est d’elles qu’il déclare un peu plus haut : «Si quelqu’un entre par moi, il sera sauvé, et il entrera et il sortira, et il trouvera des pâturages.», Jn 10, 9. Il entrera en venant à la foi; il sortira en passant de la foi à la vision face à face, de la croyance à la contemplation; et il trouvera pour s’y rassasier des pâturages d’éternité. Les brebis du Seigneur trouvent des pâturages, puisque tous ceux qui le suivent d’un cœur simple se rassasient en pâturant dans des prairies éternellement vertes. Et quels sont les pâturages de ces brebis, sinon les joies intérieures d’un paradis à jamais verdoyant? Car les pâturages des élus sont la présence du visage de Dieu, dont une contemplation ininterrompue rassasie indéfiniment l’âme d’un aliment de vie. Ceux qui ont échappé aux pièges du plaisir fugitif goûtent, dans ces pâturages, la joie d’un éternel rassasiement.

Là les chœurs des anges chantent des hymnes; là sont réunis les citoyens du Ciel. Là se célèbre une fête solennelle et douce pour ceux qui reviennent de ce triste et pénible exil terrestre. Là se rencontrent les chœurs des prophètes qui ont prévu l’avenir; là siège pour juger le groupe des apôtres; là est couronnée l’armée victorieuse des innombrables martyrs, d’autant plus joyeuse là-haut qu’elle a été plus cruellement éprouvée ici-bas; là, les confesseurs sont consolés de leur constance par la récompense qu’ils reçoivent; là se rencontrent les hommes fidèles dont les voluptés du monde n’ont pu amollir la robuste virilité, là les saintes femmes qui, outre le monde, ont vaincu la faiblesse de leur sexe, là les enfants qui ont devancé le nombre des années par la maturité de leurs mœurs, là enfin les vieillards que l’âge a rendus si faibles, sans pourtant leur faire perdre le cœur à l’ouvrage.

6. Recherchons donc, frères très chers, ces pâturages où nous partagerons la fête et la joie de tels concitoyens. Le bonheur même de ceux qui s’y réjouissent nous y invite. N’est-il pas vrai que si le peuple organisait quelque part une grande foire, ou qu’il accourait à l’annonce de la dédicace solennelle d’une église, nous nous empresserions de nous retrouver tous ensemble? Chacun ferait tout pour y être présent, et croirait avoir beaucoup perdu s’il n’avait eu le spectacle de l’allégresse commune. Or voici que dans la cité céleste, les élus sont dans l’allégresse et se félicitent à l’envi au sein de leur réunion; et cependant, nous demeurons tièdes quand il s’agit d’aimer l’éternité, nous ne brûlons d’aucun désir, et nous ne cherchons pas à prendre part à une fête si magnifique. Et privés de ces joies, nous sommes contents! Réveillons donc nos âmes, mes frères! Que notre foi se réchauffe pour ce qu’elle a cru, et que nos désirs s’enflamment pour les biens d’en haut : les aimer, c’est déjà y aller.
Ne laissons aucune épreuve nous détourner de la joie de cette fête intérieure : lorsqu’on désire se rendre à un endroit donné, la difficulté de la route, quelle qu’elle soit, ne peut détourner de ce désir. Ne nous laissons pas non plus séduire par les caresses des réussites. Combien sot, en effet, est le voyageur qui, remarquant d’agréables prairies sur son chemin, oublie d’aller où il voulait. Que notre âme ne respire donc plus que du désir de la patrie céleste, qu’elle ne convoite plus rien en ce monde, puisqu’il lui faudra assurément l’abandonner bien vite. Ainsi, étant de vraies brebis du céleste Pasteur, et ne nous attardant pas aux plaisirs de la route, nous pourrons, une fois arrivés, nous rassasier dans les pâturages éternels.

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jeudi 15 avril 2010

L’HÉRITAGE DU PÈRE FRANÇOIS PICARD, fondateur des Orantes de l'Assomption



16 avril 1903


Anniversaire de la mort de notre fondateur,


le Père Picard, Augustin de l’Assomption



… une spiritualité Christocentrique

Le Père Picard a donné des instructions aux sœurs Orantes
depuis leur fondation le 8 décembre 1896 jusqu’ au 13 décembre
1902 et il leur a commenté le directoire des religieux de l’Assomption
du 22 décembre 1896 au 14 juin 1897 (Collection Archives n̊1).

Le père Marcel Neusch, Augustin de l’Assomption, a étudié ces
instructions. Il en a recueilli en 7 pages quelques caractéristiques
réunies sous le titre

- Christ est votre seule richesse -

Une tonalité apparaît, celle d’une foi intense, toute engagée au
service du Royaume. Dans la tradition de l’Assomption, le Père
Picard a orienté la spiritualité vers son centre unique, le Christ.

Au coeur de la vie Orante,

la Parole de Dieu nourrit son oraison silencieuse du matin.

Au cœur de son oraison,
l’Orante cherche à vivre en cœur à cœur avec Jésus-Christ .



Dans ce temps du cœur à cœur,
l’Orante désire l’avènement du Royaume.

Cette spiritualité toute centrée sur le Christ
conduit à un décentrement permanent de soi.

Comme le Père d’Alzon, le Père Picard insiste sur ce point :
le cœur de l’Orante ne doit pas battre au rythme de soi, mais
il doit battre au rythme de Dieu et du Royaume.

Il y a d’inévitables scories, mais en cherchant à aller
à l’essentiel du message, alors la figure du Christ domine.

Des insistances jalonnent la trame de cette spiritualité :

Jésus-Christ, l’oraison, l’apostolat, la formation et
l’esprit « Orante ». Le Père Neusch énumère les traits qui
pourraient être ceux des Orantes :

le courage,
la largeur de vue,
une ascèse tempérée,
la joie et l’esprit de foi.

A la suite de l’étude du père Marcel Neusch, le père Charles Monsch,
Augustin de l’Assomption et ancien archiviste, présente l’arrière-fond historique.

Fraternellement, Sœur Monique-Anne Giroux;
Orante de l'Assomption

mardi 6 avril 2010

Évangile selon Saint Luc (Lc 24, 1-12 )


Le premier jour de la semaine,
à la pointe de l'aurore,
des femmes allèrent à la tombe, portant les aromates qu'elles avaient préparées.
Elles trouvèrent la pierre roulée de devant le tombeau,
mais, étant entrées,
elles ne trouvèrent pas le corps du Seigneur Jésus.
Et il advint, comme elles en demeuraient perplexes,
que deux hommes se tinrent devant elles, en habit éblouissant.
Et tandis que, saisies d'effroi, elles tenaient leur visage incliné vers le sol,
ils leur dirent : "Pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts? Il n'est pas ici; mais il est ressuscité. Rappelez-vous comment il vous a parlé, quand il était encore en Galilée : Il faut, disait-il, que le Fils de l'homme soit livré aux mains des pécheurs, qu'il soit crucifié, et qu'il ressuscite le troisième jour."
Et elles se rappelèrent ses paroles.
A leur retour du tombeau, elles rapportèrent tout cela aux Onze et à tous les autres. C'étaient Marie la Magdaléenne, Jeanne et Marie, mère de Jacques.
Les autres femmes qui étaient avec elles le dirent aussi aux apôtres; mais ces propos leur semblèrent du radotage, et ils ne les crurent pas.
Pierre cependant partit et courut au tombeau. Mais, se penchant, il ne voit que les linges. Et il s'en alla chez lui, tout surpris de ce qui était arrivé.

Clés de lecture au commentaire de Guerric de Igny, moine cistercien du XXIIème siècle.

La résurrection de Jésus n'est pas un mystère qui s'imposerait à nous seulement de l'extérieur, comme un fait historique objectif.

Guerric se demande comment nous pouvons avoir part à la résurrection et en éprouver la force dans notre vie. Il s'appuie sur l'Écriture.


Les diverses rencontres des disciples avec le Ressuscité durant les quarante jours avant son départ définitif, nous suggèrent comment nous-mêmes nous pouvons rencontrer le Ressuscité durant le temps de notre vie terrestre.


Ce qui s'est passé historiquement et de manière sensible pendant ces quarante jours nous dit ce qui se passe aujourd'hui pour nous spirituellement, mais tout aussi réellement.


Il peut nous être donné de vivre comme Madeleine la rencontre du Ressuscité, si comme elle, nous veillons assidûment dans la prière.


Nous pouvons aussi vivre la rencontre du Ressuscité dans nos activités : c’est l'expérience que font en chemin les femmes et puis les disciples en route vers le village d'Emmaüs.


Le chemin évoque pour Guerric le chemin de notre vie active, les allées et venues au travail, et tout ce qui tisse notre vie quotidienne.


Pour Guerric et ses frères cisterciens, rien n'est profane : le travail peut, aussi bien que la prière, être un lieu d'écoute et de rencontre du Seigneur.

Sermon de Guerric

Heureux et saint, celui qui a part à la première résurrection, Ap 20, 6

Veiller dès le matin...

1 [...] Mes frères, n'est-il pas semblable à un mort, celui qui dort encore, alors que le Soleil est déjà levé ? Celui qui est encore accablé par la négligence et l'indolence, est pour ainsi dire enseveli dans une torpeur sans espérance, alors que déjà brille partout la grâce de la Résurrection.

Le Soleil nouveau, frappe les yeux de ceux qui dès le matin veillent pour lui, Is 26, 9, il inaugure pour eux le Jour de l'éternité. [...]

2.2 Toi aussi, si tu veilles chaque jour aux portes de la Sagesse, et si tu fais le guet au seuil de sa demeure, Pr 8, 34, si avec Marie-Madeleine, tu montes la garde sans dormir à la porte de son tombeau, Jn 20, 11, alors, tu éprouveras toi aussi, combien est vrai ce qu'on lit au sujet de la Sagesse en personne, qui est le Christ : Elle se laisse voir facilement par ceux qui l'aiment, et elle se laisse trouver par ceux qui la cherchent. Elle va au-devant de ceux qui la désirent pour se montrer à eux la première. Qui veillera pour elle dès l'aurore, n'aura pas à peiner, car il la trouvera assise devant sa porte, Sg 6, 13-15. Et encore : J'aime ceux qui m'aiment, et ceux qui veillent pour moi dès le matin me trouveront, Pr 8, 17.

2.3 Certes, c'est corporellement que Marie-Madeleine trouva Jésus, lui pour qui elle veillait, et vers le tombeau de qui elle était venue alors qu'il faisait encore nuit, Jn 20, 1. Mais toi, tu ne dois plus désormais connaître Jésus selon la chair (2 Co 5, 16), mais selon l'Esprit. Tu pourras assurément le trouver spirituellement, si tu le cherches avec un désir semblable à celui de Marie-Madeleine, et s'il te voit, comme elle, veiller assidûment dans la prière.

2.4 Aussi, dis au Seigneur Jésus, avec le désir et l'amour de Marie-Madeleine : Mon âme t'a désiré durant la nuit, et mon esprit au-dedans de moi t'a cherché. Dès le matin, je veillerai pour toi, Is 26, 9.

Dis avec l'accent et le coeur du psalmiste : Dieu, mon Dieu, je veille pour toi dès l'aurore, mon âme a soif de toi, Ps 62, 2. Et vois s'il ne te sera pas donné de chanter avec eux : Au matin nous avons été comblés par ta miséricorde ; nous avons exulté et nous avons goûté la joie, Ps 89, 14.

Pourquoi veiller ?

3.1 Veillez donc, mes frères, avec attention dans vos prières, veillez avec grand soin dans vos actions. Veillez surtout parce que déjà brille le matin du Jour sans déclin : la Lumière éternelle nous est revenue des ténèbres, et l'aurore nous a apporté un Soleil nouveau. Oui, voici désormais pour nous l'heure de sortir de notre sommeil, car la nuit est avancée, le Jour est tout proche, Rm 13, 11-12.

3.2 Veillez, pour que pour vous se lève la Lumière matinale, c'est-à-dire le Christ. Son lever est sûr comme l'aurore, Os 6, 3 ; le Christ est prêt à renouveler souvent le mystère de sa Résurrection matinale pour ceux qui veillent pour lui. Alors vraiment, tu pourras chanter le coeur en fête : Dieu, le Seigneur, nous illumine. Voici le Jour que le Seigneur a fait : tressaillons d'allégresse et réjouissons-nous en ce Jour, Ps 117, 27.24. Lorsque le Seigneur aura laissé filtrer pour toi la Lumière qu'il tient cachée en ses mains, annonçant à son ami qu'elle est son bien et qu'il peut monter vers elle, Job 36, 32 [...]

Veiller sur les chemins de l'action

3.4 Pour vous qui craignez mon nom, le Soleil de justice se lèvera, Ml 4, 2. Et celui qui marche dans la justice, ses yeux verront le Roi dans sa beauté, Is 33, 15.17. Assurément, il s'agit ici de la béatitude de la vie future. Mais, dans une certaine mesure, cela nous est accordé aussi pour notre consolation dans la vie présente. En effet, pendant quarante jours, maintes preuves nous furent données, Ac 1, 3 par la Sagesse de ce qu'elle cherche de tous côtés des gens qui sont dignes d'elle, et se montre à eux sur ses chemins avec un visage souriant, se portant avec sollicitude à leur rencontre, Sg 6, 17.

3.5 Jésus, voulant montrer qu'il est la Sagesse dont parle l'Écriture, et voulant aujourd'hui manifester également de manière corporelle ce qu'il ne cesse de faire chaque jour spirituellement - à savoir - se montrer à nous le visage souriant sur les chemins de la justice, Jésus donc, aujourd'hui, va sur le chemin au-devant des femmes qui reviennent du tombeau, Mt 28, 9, et sur le chemin il se montre à nouveau aux deux disciples qui vont à Emmaüs.

4.1 Qu'ils l'apprennent et s'en réjouissent, ceux qui marchent sur les chemins de la justice. Qu'ils l'apprennent, dis-je, car ce n'est pas seulement ceux qui s'appliquent, immobiles, à la contemplation, que Jésus favorise de sa venue et de sa manifestation, mais aussi ceux qui marchent avec justice et tendresse sur les chemins de la vie active.

Comme les femmes qui reviennent du tombeau

4.2 Certains d'entre vous, si je ne me trompe, le savent par expérience. Souvent, ayant cherché Jésus auprès des autels des chapelles comme Marie-Madeleine cherchait son Jésus auprès du tombeau, ils ne l'ont pas trouvé ; et voici, que de façon inespérée, il est venu à eux sur le chemin de leurs travaux. Alors, ils se sont approchés de lui et lui ont saisi les pieds, Mt 28, 9 [Jésus vint à leur rencontre: "Je vous salue", dit-il. Et elles de s'approcher et d'étreindre ses pieds en se prosternant devant lui], eux qui dans leur désir de lui, n'avaient pas eu les pieds entravés par la paresse. Il ne faut donc pas, mon frère, trop épargner à tes pieds les chemins de l'obéissance et les allées et venues du travail, puisque Jésus pour toi n'a pas épargné à ses pieds la souffrance des clous…


Comme les disciples qui retournent à Emmaüs

4.3 D'autre part, quelle consolation encore pour toi, s'il vient se joindre à toi comme compagnon de route, et si la joie merveilleuse de sa conversation va jusqu'à t'enlever la sensation de ta fatigue, tandis qu'il t'ouvre l'esprit pour que tu comprennes ces textes de l'Écriture que peut-être tu lisais mais ne comprenais pas quand tu étais assis à la maison ! Je vous le demande, frères, vous à qui Dieu a daigné parfois en accorder l'expérience : votre coeur n'était-il pas brûlant en vous pour Jésus, tandis qu'en chemin il s'entretenait avec vous et vous ouvrait les Écritures, Lc 24, 32?

4.4 Ceux qui en ont fait l'expérience, qu'ils se la rappellent, et qu'ils chantent sur les chemins du Seigneur : Qu'elle est grande, la gloire du Seigneur, Ps 137, 5 ! Ceux qui n’ont pas fait cette expérience, qu'ils croient et s'efforcent d'expérimenter à leur tour, pour qu'eux aussi puissent un jour chanter les interventions du Seigneur sur la terre d'exil et d'affliction, Ps 118, 54.

5.1 Que ressuscite donc et se mette à revivre l'esprit de chacun de nous, soit pour nous adonner en toute vigilance à la prière, soit pour nous appliquer assidûment au travail. Ainsi, en faisant preuve d'une énergie vive et renouvelée, nous prouverons que nous avons à nouveau reçu d'avoir part à la Résurrection du Christ, Ap 20, 6.

5.7 [...] Efforçons-nous donc de ressusciter de plus en plus, afin de parvenir, s'il est possible - comme dit l'Apôtre - jusqu'à la Résurrection du Christ d'entre les morts, Ph 3, 11, lui qui vit et règne pour les siècles des siècles. Amen.

Ce sermon a été modifié par soeur Monique-Anne, Orante de l'assomption  pour le rendre audible à l'oral.