samedi 28 juin 2014

La prière du Christ, P. Édouard Pousset, s.j.


29 juin S. Pierre et S.Paul

Dans la prière du Christ, il est question de nous, explicitement, en deux circonstances qui nous concernent très directement : le choix des apôtres et la question que Jésus pose à Pierre : Et vous, qui dites-vous que je suis ?  C’est-à-dire la confession de foi.
Il a été question de nous dans la prière du Christ, de chacun, comme dans cette visite de Jésus à Capharnaüm où on lui amenait tant de malades : Et lui, imposant les mains à chacun d’eux, Il les guérissait, Lc 4,40.  Jésus veille sur chacun.

Il a été question de chacun de nous dans la prière du Christ, dans l’entretien du Fils avec le Père. Notre être a été recréé au baptême, puis consacré par un appel, notre vocation a germé dans la sainte Trinité. Saint Luc nous rapporte le choix des douze :  - En ces jours-là, Jésus s’en alla dans la montagne pour prier, et il passa toute la nuit à prier Dieu. Le jour venu, il appela ses disciples et en choisit douze auxquels il donna le nom d’Apôtres, Lc 6, 12-13. Dans un autre texte de st Jean, Jésus  dit : - Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis, Jn 15,16. Et il s’en alla dans la montagne pour prier. Et il passa une nuit à prier Dieu.

Aujourd’hui, nous nous sentons tous dans la précarité. La condition humaine a toujours été précaire. Nous sommes précaires. Si l’étoile du matin, comme dit Isaïe, Is 14,12, est tombée du ciel, pourquoi nous-mêmes ne tomberions-nous pas ? Eh bien non. Il n’y a pas de danger, parce que nous sommes dans la prière du Christ.

Demandons aux paroles de l’Évangile de façonner notre foi. Elles le peuvent. Si une parole de l’Écriture nous frappe, elle crée à l’instant même dans notre être ce qu’elle dit à notre intelligence. Pourquoi aurions-nous la moindre inquiétude ? Le Christ a prié pour nous. Puisque nous sommes dans la prière du Christ, nous y restons. Puisque nous sommes dans l’entretien du Fils avec le Père, nous sommes tenus. Et ce n’est pas seulement notre destinée éternelle qui est sûre, c’est aussi le temps présent que nous vivons. Vivre dans la foi, c’est vivre en paix.
Dieu scrute nos cœurs. Dieu ne peut pas nous dispenser d’être hommes et d’être fils de Dieu. Il attend que nous lui disions oui, comme quelque chose qui va de soi, en grande simplicité. Dieu passe son temps à préparer cet instant dans nos vies. Dieu nous attend pour nous consumer dans le feu qu’il est, en un instant, flamme vive pour l’éternité. Il nous aide avec patience et longtemps à porter nos fardeaux, jusqu’au moment choisi où Il nous change en un enfant du Royaume qui dit oui, tout simplement.
De cette confirmation de notre foi et de notre espérance, il a été question dans la prière du Christ. Un jour qu’il priait à l’écart, ses disciples étant avec Lui, Il les interrogea : - Au dire des foules, qui suis-je ? … Et puis Jésus leur demanda : - Mais pour vous, qui suis-je ? Pierre alors répondit : - Le Christ, le Messie de Dieu, Lc 9, 18-20. Voilà, c’est la confirmation d’une vocation.

Dans le commencement d’une vie religieuse se produit une première conversion, la conversion à la générosité, et ce n’est pas rien. La seconde conversion intervient quand on a à répondre à cette question : Qui dites-vous que je suis ? Rappelons-nous la rencontre de Pierre avec Jésus Ressuscité. Après lui avoir demandé par trois fois : - M’aimes-tu ? Jésus lui dit : - Suis-moi. S’étant retourné, Pierre aperçoit, marchant à leur suite, le disciple que Jésus aimait. Et Pierre dit à Jésus : - Et lui, Seigneur, que lui arrivera-t-il ? Jésus lui répond : - Si je veux qu’il demeure jusqu’à ce que je vienne, que t’importe ? Toi, suis-moi. 
C’est dans une très longue prière du Seigneur que se gagne, dans l’entretien avec son Père, la liberté d’un homme. Vient le temps où cette liberté se décide, et elle passe tout simplement du côté de Dieu. Tout l’avenir est engagé. C’est à cela que Dieu travaille. Quand cela arrive, tout est sûr, depuis maintenant et pour toujours. Tout dépend de Dieu, et on s’aperçoit que tout a toujours dépendu de Dieu, depuis notre conception dans le sein de notre mère, et même depuis toujours, il a été question de nous dans l’entretien des trois Personnes divines. Voilà… C’est simple la vie – et c’est beau.

 

samedi 7 juin 2014

Saint Grégoire le Grand (540-604)
                      64èmepape, docteur et Père de l'Église d'occident.
 
 
L’Esprit Saint et la connaissance de Dieu

-          L’ouverture des sens

Par le don de l’Esprit, Dieu répand dans tous les hommes sa connaissance. Nos sens ne sont pas naturellement ouverts aux choses de Dieu. Il faut le vent violent de la Pentecôte, Ac 2,2, pour briser notre surdité et notre insensibilité aux choses de Dieu. Outre la Pentecôte historique dont parle les Actes des Apôtres, il est une pentecôte intérieure et toute personnelle qui se passe sans témoin dans le cœur du croyant. Entendre la voix du Seigneur, c’est percevoir en soi l’inspiration de sa grâce, c’est-à-dire le Souffle de l’Esprit. Alors notre cœur est pénétré d’une force intérieure qui l’incite à l’amour de Dieu. En recevant l’Esprit Saint, les Apôtres ont été introduits dans la pensée de Dieu. Il peut arriver que l’Esprit se fasse pour l’âme petit ruisseau ou torrent.

-          Le don de la Parole

L’Esprit s’est manifesté à la Pentecôte sous le symbole des langues de feu. Celui qui est touché par la langue de feu de l’Esprit confesse le Verbe de Dieu, le Fils unique. Personne ne peut dire que Jésus est Seigneur, si ce n’est par l’Esprit Saint, 1Co 12, 3. Quand Pierre voit le Seigneur transfiguré, il reçoit la consigne de n’en rien dire avant la résurrection, Mt 17, 8. Pour pouvoir parler du Christ avec autorité, l’apôtre doit avoir reçu l’intelligence du mystère que donne l’Esprit Saint. Ce n’est pas une sagesse humaine qui peut pénétrer les mystères de l’Incarnation. Il faut la puissance de l’Esprit.

-          L’écoute de la Parole

Quand un homme parle de Dieu à d’autres, l’Esprit est là en celui qui parle comme en celui qui écoute, à la mesure de la disponibilité intérieure de celui qui parle et de celui qui écoute. Pourquoi les auditeurs comprennent-ils différemment ce qu’exprime une voix unique ? C’est que, par le moyen de ce qui est adressé à tous, le Maître intérieur instruit certains d’une manière toute spéciale. Le bruit de la voix n’enseigne rien si l’esprit de l’auditeur n’est pas oint de l’Esprit Saint. Les prédicateurs sont les coopérateurs de Dieu, et tandis que le prédicateur agit à l’extérieur par son ministère d’exhortation, Dieu agit intérieurement par Son Esprit : Celui qui plante n’est rien… C’est Dieu qui donne la croissance, c’est Dieu, par sa grâce intérieure, qui ouvre invisiblement l’accès du cœur.

Lire l’Écriture ou écouter les prédicateurs ne suffit pas pour changer de vie. Il ne faut pas compter sur ses propres forces, mais tout attendre du don de l’Esprit. Cette attente n’est pas une attitude paresseuse ou purement passive. L’enseignement des hommes est le plus souvent indispensable pour qu’agisse l’Esprit.

-          La connaissance et l’Amour

À la Pentecôte, l’Esprit a rendu les apôtres ardents et éloquents, il les a embrasés et les a faits parler. Ceux qui sont remplis de l’Esprit aiment les réalités célestes dont ils parlent. Même ce que nous ne comprenons pas encore pleinement, nous pouvons déjà l’aimer du fond du cœur, parce que nous avons reçu le gage de l’Esprit. L’amour précède en quelque sorte la connaissance. Quand se répand le feu de l’amour, c’est que le cœur aussi est atteint comme l’intelligence, et alors plus rien n’a vraiment d’importance pour l’homme que Dieu. On ne comprend bien les choses de Dieu que si on va jusqu’à les aimer et tout cela vient de l’Esprit Saint.

-          La connaissance, mesure de l’amour

On ne peut aimer que ce que l’on connaît et, comme ici-bas on connaît les choses de Dieu par la foi, on ne peut aimer que ce qu’on croit. La foi précède la charité. L’esprit ne voit pas parfaitement ce qu’il aime, il ne fait que commencer à le voir. C’est pourquoi la vie présente dans la foi est une vie de désir. Quand on a commencé à connaître Dieu par la foi, on aspire à le voir face à face.