samedi 28 juin 2025

Saint Hilaire, la foi de Pierre

 


Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 16,13-19

 

 

 

Jésus était venu dans la région de Césarée-de-Philippe, et il demandait à ses disciples : "Le Fils de l'homme, qui est-il, d'après ce que disent les hommes ?"






Croire que Jésus est Fils de Dieu de nom et pas de nature, n'est pas la foi évangélique et apostolique. Car si ce nom désignait l'adoption sans que pour autant le Christ soit le Fils venu de Dieu, je me pose cette question: "Pourquoi le bienheureux Simon, fils de Yonas, a-t-il proclamé : Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant, Mt 16,16 ? Est-ce parce qu'il a pu, comme tout le monde, naître fils de Dieu par le sacrement qui nous régénère?"

Si le Christ était fils de Dieu en fonction du nom qu'on lui attribue, je demande : "Qu'est-ce qui a été révélé à Pierre, non par la chair et le sang, mais par le Père qui est aux cieux ? Une croyance partagée par tous a-t-elle quelque mérite ? Et faut-il glorifier la révélation d'une chose que tout le monde connaît ? Si le Christ était fils par adoption, pourquoi la confession de Pierre lui vaudrait-elle d'être appelé bienheureux, alors qu'il n'aurait reconnu au Fils qu'une qualité commune à tous les saints ?"

Or, la foi de l'Apôtre s'est avancée au-delà des limites de l'intelligence humaine. Nul doute qu'il eût souvent entendu cette parole : Qui vous accueille m'accueille ; et qui m'accueille accueille celui qui m'a envoyé, Mt 10,40. Ainsi, Pierre savait déjà que le Christ était envoyé. Et celui qu'il savait être envoyé, il l'avait entendu déclarer: Tout m'a été confié par mon Père ; personne ne connaît le Fils, sinon le Père, et personne ne connaît le Père, sinon le Fils, Mt 11,27. Qu'est-ce que le Père a révélé alors à Pierre, et qui lui valut la gloire de voir sa confession appelée bienheureuse ? Est-ce qu'il ne connaissait pas les noms du Père et du Fils ? Il les avait entendus fréquemment.

Mais il dit une parole qu'aucune voix humaine n'avait encore prononcée: Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant, Mt 16,16. En vérité, alors même que le Christ demeurant dans la chair s'était déjà déclaré Fils de Dieu, l'Apôtre fut alors le premier à reconnaître dans la foi que la nature divine est en lui. Si Jésus, en effet, a loué Pierre, ce n'est pas uniquement pour l'avoir honoré par sa profession de foi, mais aussi pour avoir reconnu son mystère, car l'Apôtre n'a pas seulement confessé le Christ, mais il l'a aussi proclamé Fils de Dieu. Pour l'honorer, il lui eût certainement suffi de confesser: Tu es le Christ. Il eût pourtant été inutile de l'appeler Christ sans le proclamer Fils de Dieu. De fait, en disant: Tu es, Pierre a clairement déclaré la perfection et le caractère unique de la vraie nature du Fils. Et en disant: Celui-ci est mon Fils, Mt 17,5, le Père a révélé à Pierre qu'il devait proclamer : Tu es le Fils de Dieu. Car la parole Celui-ci est est l'indication donnée par celui qui révèle, tandis que l'adhésion donnée par celui qui confesse sa foi s'exprime par la réponse : Tu es.

L'Église est donc bâtie sur la pierre de cette confession. Mais un esprit de chair et de sang ne peut découvrir le sens de cette profession de foi. Appeler le Christ Fils de Dieu et, de plus, croire qu'il l'est, est un mystère qui ne peut être révélé que par Dieu. Ou alors, serait-ce le nom divin qui aurait été révélé à Pierre plutôt que la filiation de nature ? Pour ce qui est du nom, Pierre avait déjà souvent entendu le Seigneur se proclamer Fils de Dieu. Sur quoi porte donc cette glorieuse révélation ? Elle concerne certainement la nature et pas le nom, qui avait déjà été souvent proclamé.

Cette foi est le fondement de l'Église. Grâce à cette foi, la puissance de la Mort, Mt 16,18 ne pourra rien contre l'Eglise. Cette foi possède les clefs du Royaume des cieux et ce qui a été délié ou lié par elle sur la terre, est délié et lié dans les cieux. Cette foi est le don de la révélation du Père. Elle ne déclare pas mensongèrement que le Christ a été créé de rien, mais elle le proclame Fils de Dieu selon la nature qui lui est propre.
 

 Il ne reconnaît pas en Pierre, vieillard proclamé bienheureux, le témoin de la foi, le témoin pour qui le Christ a prié le Père afin que sa foi ne défaille pas, Lc 22,32 dans la tentation.

Au Christ qui le lui demandait, Pierre a réaffirmé son amour pour Dieu, et il s'est affligé de se voir encore mis à l'épreuve comme quelqu'un qui doute et qui hésite, et d'être interrogé une troisième fois. Et ainsi purifié de ses trois tentations, il a mérité de s'entendre dire trois fois par le Seigneur : Sois le berger de mes brebis, Jn 21,17. Alors que tous les Apôtres gardaient le silence, il a reconnu, grâce à une révélation du Père, que le Christ est le Fils de Dieu. Et sa bienheureuse confession de foi lui a valu une gloire suréminente, au-delà de ce que peut concevoir la faible nature humaine.


Traité de saint Hilaire (+ 367) sur la Trinité
La Trinité, livre 6, 36-37; CCL 62, 239-242.

samedi 21 juin 2025

Guigues II le Chartreux, qui mange mon corps


 

Guigues II le Chartreux, 12ème siècle. 9ème prieur de la grande chartreuse.





Qui mange mon corps

Le pain de l’âme, c’est le Christ, « le pain vivant qui est descendu du ciel » et qui nourrit les siens maintenant par la foi,

et dans le monde futur par le vision.

Par la foi, le Christ habite en toi,

car la foi au Christ c’est le Christ dans ton cœur.

Tu possèdes le Christ dans la mesure où tu crois en lui.

Dans l’amour se trouve toute la force de l’âme.

C’est là qu’afflue toute sa nourriture vitale.

Et la vie se diffuse dans tous les membres que sont les vertus.

« En toute vigilance, dit le Seigneur, garde ton cœur, car c’est de lui que jaillit la vie », Pr 4,23. L’amour, comme le cœur, est placé au centre.

Vers lui progressent en se consolidant les trois choses qui le précèdent : la foi, la méditation et l’intelligence. De lui partent en bonne direction celles qui en découlent.

Manger spirituellement le corps du Christ, c’est donc avoir en lui une foi pure, chercher le contenu de cette foi par une méditation fervente et assidue, trouver par l’intelligence ce que nous cherchons, aimer ardemment ce que nous avons découvert, imiter dans la mesure du possible celui que nous aimons, adhérer sans cesse à lui en l’imitant et, par cette adhésion, parvenir à l’union éternelle.

 Méditations, Sources chrétiennes n° 163, Le Cerf, Paris, 1970, 180.

 

 

samedi 14 juin 2025

Dom Prosper Guéranger, 19ème siècle. Moine bénédictin, Dieu trinité


 15  juin 2025 Jn 16,12-15 SAINTE TRINITE

 

Dieu Trinité

Nous avons vu les saints apôtres, au jour de la Pentecôte, recevoir l’effusion de l’Esprit Saint, et bientôt, fidèles à l’ordre du Maître, Mt 28, 19, ils vont partir enseigner toutes les nations, et baptiser les hommes au nom de la Sainte Trinité. La solennité qui a pour but d’honorer Dieu unique en trois personnes, suit donc immédiatement celle de la Pentecôte.

Dieu Trinité est le terme de notre foi. La liturgie qui a pour objet la glorification de Dieu et la commémoration de ses œuvres, suit chaque année les manifestations dans lesquelles Dieu s’est déclaré tout entier aux hommes.

Sous les couleurs de l’Avent, nous avons vécu l’attente. Le monde implorait un libérateur, un Messie. Et le Fils de Dieu devait être ce libérateur, ce Messie. En adorant le Fils, nous adorons aussi le Père, qui nous l’envoyait dans la chair, et auquel il est consubstantiel : c’est le Verbe de vie, que nous avons vu, que nous avons entendu, que nos mains ont touché 1 Jn1, 1. Dans cette seconde personne divine, nous rencontrons le médiateur qui réunit la création à son auteur, le rédempteur de nos péchés, la lumière de nos âmes, l’Époux de l’Église auquel elles aspirent.

À la Pentecôte, nous célébrons la venue de l’Esprit Saint, l’Esprit sanctificateur, annoncé comme devant venir perfectionner l’œuvre du Fils de Dieu. Il a mission de demeurer avec nous, Jn 14, 16. Il maintient la sainte Église dans la vérité que le Fils lui a enseignée. Il est le principe de la sanctification dans nos âmes, où il veut faire sa demeure. Le mystère de la Sainte Trinité est pour nous, non seulement un dogme intimé à notre pensée par la révélation, mais une vérité connue de nous par expérience intérieure. Nous sommes adoptés par le Père, et nous devenons frères et cohéritiers du Fils, quand nous nous laissons habiter par l’Esprit Saint.

Sélection, soeur Monique-Anne Giroux, Les chemins de la grâce, T 2.


samedi 7 juin 2025

Saint Grégoire le Grand, Pentecôte

 


Ce jour-là, soit cinquante jours après Pâques, les apôtres et Marie sont réunis dans le Cénacle pour célébrer la fête de Chavouot. 

Soudain, « un bruit survint du ciel comme un violent coup de vent : la maison où ils étaient assis en fut remplie tout entière. 

Alors leur apparurent des langues qu’on aurait dites de feu, qui se partageaient, et il s’en posa une sur chacun d’eux. 

Tous furent remplis d’Esprit Saint : ils se mirent à parler en d’autres langues, et chacun s’exprimait selon le don de l’Esprit. » 








Quelles sont les origines de la fête de la Pentecôte ?

Origines juives

La Pentecôte trouve ses origines dans la fête juive de Chavouot qui est célébrée, elle aussi, cinquante jours après la Pâque juive (Pessah). Lors de cette fête, les juifs commémorent le don de la Torah à Moïse (Ex 19, 19), marquant ainsi l’Alliance entre Dieu et son peuple.


La descente de l’Esprit Saint 

L’événement de la Pentecôte survient dix jours après l’Ascension du Christ, après que Jésus a promis à ses disciples qu’ils vont « recevoir une force, celle du Saint-Esprit qui viendra sur vous. Alors vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre ».

La descente de l’Esprit Saint, promise par Jésus, est relaté dans les Actes des Apôtres (chapitre 2). Ce livre suit les Évangiles : il raconte la naissance de l’Église et la vie des premiers chrétiens. Par le don de l’Esprit, Dieu répand dans tous les hommes sa connaissance. Nos sens ne sont pas naturellement ouverts aux choses de Dieu. Il faut le vent violent de la Pentecôte, Ac 2,2, pour briser notre surdité et notre insensibilité aux choses de Dieu. Il y a la Pentecôte historique rapportée dans les Actes des Apôtres.

https://www.lejourduseigneur.com/fetes-chretiennes/la-pentecote

saint Grégoire le Grand

Il est une pentecôte intérieure et toute personnelle qui se passe sans témoin dans le cœur du croyant. Entendre la voix du Seigneur, c’est percevoir en soi l’inspiration de sa grâce, c’est-à-dire le Souffle de l’Esprit. Alors notre cœur est pénétré d’une force intérieure qui l’incite à l’amour de Dieu. En recevant l’Esprit Saint, les Apôtres ont été introduits dans la pensée de Dieu. Il peut arriver que l’Esprit se fasse pour l’âme petit ruisseau ou torrent.

Pour pouvoir parler du Christ avec autorité, l’apôtre doit avoir reçu l’intelligence du mystère que donne l’Esprit Saint. Ce n’est pas une sagesse humaine qui peut pénétrer les mystères de l’Incarnation. Il faut la puissance de l’Esprit. Quand un homme parle de Dieu à d’autres, l’Esprit est là en celui qui parle comme en celui qui écoute, à la mesure de la disponibilité intérieure de celui qui parle et de celui qui écoute. Pourquoi les auditeurs comprennent-ils différemment ce qu’exprime une voix unique ? C’est que, par le moyen de ce qui est adressé à tous, le Maître intérieur instruit certains d’une manière toute spéciale. Le bruit de la voix n’enseigne rien si l’esprit de l’auditeur n’est pas oint de l’Esprit Saint. Les prédicateurs sont les coopérateurs de Dieu, et tandis que le prédicateur agit à l’extérieur par son ministère d’exhortation, Dieu agit intérieurement par Son Esprit. - Celui qui plante n’est rien. C’est Dieu qui donne la croissance, c’est Dieu, par sa grâce intérieure, qui ouvre invisiblement l’accès du cœur.

Lire l’Écriture ou écouter les prédicateurs ne suffit pas pour changer de vie. Il ne faut pas compter sur ses propres forces, mais tout attendre du don de l’Esprit. Cette attente n’est pas une attitude paresseuse ou purement passive. L’enseignement des hommes est le plus souvent indispensable pour qu’agisse l’Esprit. À la Pentecôte, l’Esprit a rendu les apôtres ardents et éloquents, il les a embrasés et les a faits parler. Ceux qui sont remplis de l’Esprit aiment les réalités célestes dont ils parlent. Même ce que nous ne comprenons pas encore pleinement, nous pouvons déjà l’aimer du fond du cœur, parce que nous avons reçu la promesse de l’Esprit. L’amour précède en quelque sorte la connaissance. Quand le feu de l’amour se répand, le cœur est atteint comme l’intelligence, et alors plus rien n’a vraiment d’importance pour l’homme que Dieu.

On ne comprend bien les choses de Dieu que si on va jusqu’à les aimer et tout cela vient de l’Esprit Saint. On ne peut aimer que ce que l’on connaît et, comme ici-bas on connaît les choses de Dieu par la foi, on ne peut aimer que ce qu’on croit. La foi précède la charité. L’esprit ne voit pas parfaitement ce qu’il aime, il ne fait que commencer à le voir. C’est pourquoi la vie présente dans la foi est une vie de désir. Quand on a commencé à connaître Dieu par la foi, on aspire à le voir face à face.

Soeur Monique-Anne GIROUX, Les chemins de la grâce, T 2, 250-251.


Syméon le Nouveau Théologien, prière à l'Esprit saint


Esprit Saint,

c'est toi qui m'environnes,
Toi qui m'enflammes,
Et qui allumes en mon cœur en peine,
L'amour infini de Dieu et de mes frères.
Car c'est toi le docteur des prophètes,
Le compagnon de tous les apôtres,
La force des martyrs,
L'inspiration des Pères et des docteurs,
Et la perfection de tous les saints.