Notre institut entre dans sa 130ème année
Isabelle a eu toute sa vie un grand désir de sainteté. Pour s’assurer qu’elle n’est pas dans l’illusion, elle rend compte de sa vie intérieure au Père PICARD pendant près de 30 ans. Dans nos bibliothèques Orantes, deux grands livres bleus (format A4) rassemblent les lettres d’Isabelle de 1873 à 1888 que nous pouvons lire plus spécialement en cette 130ème année. Les lettres de 1889 à 1903 ont été numérisées, mais pas éditées. Ces lettres disent le cheminement de notre Fondatrice qui aboutit à la fondation.
En 1886, une grâce oriente la recherche d’Isabelle.
Lettre 228 – 7 novembre 1886 / - Pour la première fois de ma vie il me semble que Dieu a peut-être pour moi des intentions de vie contemplative et je me sens totalement dépourvue de tout ce qu'il faut pour cela, mais si Dieu le veut il saura bien transporter les montagnes et j'essaye de lui demander avec ardeur la force pour tout ce qu'il voudra. - Quand je me reporte au passé, au fond je ne trouve d'attrait dans la prière que pour la vie intérieure. Je m'explique : j'ai toujours pensé à autre chose mais c'était plutôt un attrait personnel qui m'y poussait tandis que les lumières de la grâce et de l'oraison n'ont jamais porté sur la vie extérieure. Je ne sais pas si je me fais comprendre ?
Lettre 230 – 22 novembre 1886 / Si vous n'aviez pas la bonté de me répondre au reste de ma lettre, je dirais que vous répondez à une autre pénitente (quand vous écrivez) - "La grâce dont vous me parlez est bien lumineuse".
Son attrait pour les pauvres va se déplacer quand son appel à la vie contemplative devient premier.
En 1887, Isabelle découvre dans sa prière l’appel à fonder une oeuvre suscitée par Dieu et désirée en Assomption. Nous lisons ce qui va caractériser l’oeuvre, c’est-à-dire la fondation de la congrégation.
Lettre 238 – 9 janvier 1887 / - Je suis à même, le jour où vous me le demanderez, de tracer les grandes lignes de l’oeuvre que je crois voulue de Dieu…
23 janvier 1887. Premières vues sur l’oeuvre. (Cahier 1).
En présence de l'athéisme qui nous enveloppe et gagne dans une certaine mesure toutes les classes de la société, je me demande si le remède qu'on y oppose est à la hauteur du mal. À cette société avide de luxe, de bien-être, de liberté de vie et d'esprit, on n'offre pour remède, qu'un Dieu très doux, très bénin, se faisant tout à tous. Les personnes pieuses, les religieuses, les prêtres même ne font guère autre chose. Ne serait-il pas plus logique d'opposer aux grands maux, les grands remèdes et de rappeler aux chrétiens qu'ils ont un roi crucifié, roi de leurs vies et roi de leurs intelligences ? Comme Jésus-Christ est la vie, la sève, la force de toute entreprise, celle-ci ne peut être faite que par un ordre contemplatif, faisant de la prière d'abord, de l'étude religieuse ensuite la base de son existence.
Les ... seront donc contemplatives. Elles auront l'adoration de jour et de nuit, de longues heures d'oraison, le grand office. La prière sera le premier de leurs devoirs. Après la prière, l'étude : l’étude de la religion, la religion dans l'histoire, dans les sciences, dans la philosophie, la liturgie, l'étude du latin, etc.
Les ... seront apôtres, apôtres surtout dans leurs oraisons à la façon dont l'entend sainte Thérèse [d’Avila], et apôtres par les oeuvres extérieures restreintes dans le temps qui leur sera donné, afin que la prière reste toujours la première des oeuvres.
Il existe un ordre ayant certaines analogies avec ce que je voudrais. Ce sont les Dames de l'Adoration perpétuelle qui, d'une part, sont contemplatives et, de l'autre, sont apôtres de l'adoration puisqu'elles ont un tiers ordre de l'adoration. Ce qu'elles font pour l'adoration, je voudrais qu'on le fasse pour l'adoration, l'étude, la liturgie, etc.
Lettre 378 – 9 mai 1895 / - Mademoiselle Dienne trouve la rencontre de nos âmes tout à fait providentielle et tout ce que je lui dis de vos projets répond à ses attraits... Je tâche de la développer du côté de l'étude et de lui donner le cachet de vie contemplative basée sur la doctrine, la liturgie, l'étude sérieuse et se développant dans le zèle pour les âmes…
Lettre 384 – 1895 / - Quelle meilleure vie pour l'âme contemplative que celle d'une sûre doctrine contemplée, aimée, apprise et enseignée dans sa modeste mesure ? Quelle meilleure prière que celle de l'amour de la vérité entière avec le désir de la donner aux âmes par la prière, l'oblation de soi-même et une humble mesure d'enseignement !
Lettre 385 – 1895 / - Pour ma part je crois que quand on est appelé à former une oeuvre nouvelle, il faut bien rester soi-même, c'est-à-dire pas le soi-même humain, mais le soi-même que Dieu a suscité par sa parole intérieure.
La fondation des Orantes a lieu chez les Oblates de l’Assomption, rue Berton à Passy, le 8 décembre 1896. Rue Berton à Passy
Entrée au n°14
S’adressant le 22 novembre 1896 aux Oblates du Cours-la-Reine, le Père PICARD disait : - Le Père d’ALZON était hardi pour aller au-devant de la volonté de Dieu. Il faut que ses fils et ses filles agissent comme lui. C’est pourquoi en ce moment, je prépare une petite fondation. Vous voyez s’élever une nouvelle bicoque à Passy ; dans ce nid, nous mettrons quelques personnes exclusivement consacrées à la prière et à l’étude. On dira que le Père PICARD n’a pas le sens commun ! Vous autres, vous direz : tant mieux, pourvu que l’Assomption grandisse ! Il y a quatorze ans que je mûris ce secret, car j’ai besoin de réfléchir longtemps… L’Assomption ne doit pas reculer devant les oeuvres nouvelles. Seulement, il faut les préparer par l’esprit de prière et de sacrifice.
Lettre 392 – Décembre 1896 / - Je tiens à vous dire ma joie de vous entendre développer l'esprit de notre oeuvre en si parfaite conformité avec tout ce que j'ai reçu à ce sujet dans l'oraison depuis quelques années. - Je n'aurais pas su le dire ainsi, mais c'est le développement, l'explication, l'épanouissement de tout ce que j'ai dans l'âme au sujet de cette oeuvre. Je ne la comprends pas autrement et je ne la comprends qu'ainsi.
Mère Marie du Christ, une jeune soeur Oblate, va former les premières Orantes aux coutumes religieuses.
Lettre 409 – 3 novembre 1901 / - Vous savez combien j'aime Mère Marie du Christ et combien je lui ai de reconnaissance, combien aussi j'apprécie sa formation religieuse, ses idées et le reste. - J'admire tant aussi l'esprit qu'elle donne à ses filles et, en un mot, je suis heureuse de me dire aussi un peu, et même beaucoup, sa fille. - Et puis les Oblates, c'est notre famille religieuse.
Le Père PICARD formera nos premières soeurs à la vie en Assomption, à la vie spirituelle et à la vie contemplative. Il nous donnera le nom d’Orantes de l’Assomption en mars 1898. Archives n°1, p 192. Archives n°2, p 60.
Soeur Marie-Jeanne MASIKA TASIVIWE