vendredi 22 juin 2018

J'aspire l'Esprit, Guillaume de Saint-Thierry

Signy-l'Abbaye (Ardennes) église, vitrail 13


J'aspire l'Esprit
Seigneur, mon âme misérable est nue, gelée, transie.
Mon âme désire être réchauffée par la chaleur de ton Amour.

Je me tiens dans ma demeure de solitude.
Aspirant le souffle de mon amour, j’ouvre vers Toi et j’aspire l’Esprit.
Et quelquefois, Seigneur, tandis que je suis comme béant vers Toi, les yeux clos,
Tu mets quelque chose dans la bouche de mon coeur.
Je sens une saveur, tellement douce et suave, tellement réconfortante,
que, si elle devenait parfaite en moi, je ne chercherai plus rien.




Quand je la reçois, je veux la retenir et ruminer, mais aussitôt, elle passe.
Je l’avale sans doute, mais en la ruminant longtemps,
je souhaiterais perdre la saveur de toutes les autres affections
et ne plus savourer qu’elle seule à jamais. Mais elle se hâte de passer.

Alors, par expérience, je suis contraint d’apprendre ce que, dans l’Évangile,
Tu dis de l’Esprit : - On ne sait ni d’où il vient, ni où il va. L’Esprit souffle où il veut.
Et j’éprouve aussi en moi qu’il souffle non quand je le veux, mais quand l’Esprit le veut.

Vers Toi, Seigneur, vers Toi sont tournés mes yeux.
Vers Toi va le désir de l’âme.
Que vers Toi, en Toi et par Toi, s’orientent tous les élans de mon âme.
Cache-moi, je T’en supplie, dans le refuge de Ta face.
Protège-moi dans Ta demeure.

Guillaume de Saint-Thierry (v. 1085-1148)
Abbé de Saint-Thierry [Reims].

samedi 16 juin 2018

La patience de la croissance

                                                                                        Commentaire Evangile selon saint Marc, 4,26-34.




Nous devons nous rappeler que la rapidité avec laquelle croît la Parole ne correspond pas  nécessairement à notre désir de la voir s'épanouir avec la plus grande célérité. 

De quelle façon la Parole est tombée dans le cœur, cela reste parfois incompréhensible ?




 Un homme spirituellement revivifié ne va pas d'un coup grandir jusqu'à la maturité. La condition, c'est d'être patient tant avec soi-même qu'avec les autres. En vain nous perdons courage en ne voyant ni en nous, ni chez les autres cette croissance spirituelle désirée, or la semence divine tôt ou tard lèvera. 





Avant que l'épi ne puisse émerger au-dessus de la terre, une étape inévitable doit s'accomplir avec la semence sous terre: elle doit se dissoudre, en quelque sorte disparaître. Cette semence cesse d'être une unité fermée sur elle-même, elle se déchire, se nourrit d'humidité, on ne peut plus la reconnaître ni la distinguer de son milieu terrestre. Et c'est seulement lorsque cette semence se confond avec le sol où elle se trouve que commence la fécondation. Et le fruit peut s'ouvrir non seulement dans une sorte d'éclatement dramatique, mais aussi au cours d'une humble et imperceptible évolution. Métropolite Antoine Bloom (+2003), Magnificat, N° 258, juin 2018, 258.

samedi 9 juin 2018

Que ton règne vienne, Origène




« Comme l'a dit notre Seigneur et Sauveur : "Le règne de Dieu vient sans qu'on puisse le remarquer. 

On ne dira pas : Le voilà, il est ici, ou bien : Il est là. 

Car voilà que le règne de Dieu est au-dedans de vous".  Et en effet, "elle est tout près de nous, cette Parole, elle est dans notre bouche et dans notre coeur", Dt 30,14


En ce cas, il est évident que celui qui prie pour que vienne le règne de Dieu a raison de prier pour que ce règne de Dieu germe, porte du fruit et s'accomplisse en lui-même. Chez tous les saints en lesquels Dieu règne et qui obéissent à ses lois spirituelles, il habite comme dans une cité bien organisée. Le Père est présent en lui et le Christ règne avec le Père dans cette âme parfaite, selon sa parole : "Nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui, Jn 14,23.

Le règne de Dieu qui est en nous, alors que nous progressons toujours, parviendra à sa perfection lorsque la parole de l'apôtre Paul s'accomplira : le Christ "après avoir soumis" tous ses ennemis, "remettra son pouvoir royal à Dieu le Père pour que Dieu soit tout en tous", 1 Co 15,28.C'est pourquoi, priant sans relâche, avec des dispositions divinisées par le Verbe, disons : "Notre Père qui es aux cieux, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne", Mt 6,9.

Origène (v.185-253), Traité sur la prière, 25 ; GCS 3, 356 (trad. Bréviaire).

http://www.chemindamourverslepere.com

dimanche 3 juin 2018

Culte du Saint Sacrement - Océan de lumière, Mère Isabelle, Fondatrice des Orantes de l'Assomption






La lampe qui éclaire la Jérusalem des âmes, c’est Jésus-Christ. Et lucerna ejus est agnus : il doit en éclairer tous les replis.





Notre vie c’est le Christ ; notre lumière, Jésus au tabernacle. Notre vie doit se passer devant le tabernacle. C’est là que Notre-Seigneur se trouve pour ne faire qu’un avec nous. Il y a différents degrés dans cette union, et nous devons aspirer au degré qui nous unit le plus au Christ Jésus.

Tout dans le monde est unité et multiplicité. L’Eglise est une dans sa doctrine et une dans sa foi ; cependant elle est multiple dans ses oeuvres, dans sa direction des âmes. Dans les âmes, il y a aussi multiplicité et unité. On voit des âmes si différentes les unes des autres, et pourtant elles tendent toutes à Dieu.

De même, dans la vie religieuse, il y a l’unité de la vie religieuse, l’unité des vertus religieuses. L’ensemble des vertus religieuses sont les mêmes partout, néanmoins vous avez la multiplicité des oeuvres ; et nous, dans nos prières, nous devons avoir cette multiplicité qui va toujours à l’unité du salut des âmes, mais qui est pleine de zèle et s’étend sur le monde entier, car nous devons prier pour toutes les oeuvres. Et aujourd’hui nous devons prier saints Cyrille et Méthode qui ont travaillé pour les oeuvres d’Orient, les mêmes dont s’occupe l’Assomption. Dans notre adoration, dans la lumière de Dieu, demandons ce qu’il y a de plus parfait pour ces oeuvres ; demandons-le avec un grand zèle, un grand amour, en nous plongeant dans la lumière. Mais pour nous plonger dans la lumière, il faut que nous pratiquions les vertus que Notre-Seigneur nous enseigne dans son tabernacle. Notre vie est une par l’adoration ; elle doit être une adoration perpétuelle. Nous ne le comprenons pas assez. Il y a une unité non seulement dans la vie de prière, mais dans la vie tout entière. Il ne faut pas oublier que nous sommes des adoratrices. Nous l’oublions souvent dans nos actes. Nous oublions que nous sommes là pour demander des grâces pour les âmes, pour les pécheurs. L’adoration n’est pas une contention ; c’est un simple regard qui fait qu’on est toujours en adoration devant Dieu : les actes en ressortent tout naturellement.

Notre-Seigneur était toujours en adoration devant son Père, parce qu’Il était parfait. Plus nous sommes parfaits, plus nous sommes en adoration devant le Saint-Sacrement, devant le Christ Jésus qui est resté pour nous dans son sacrement d’amour. Plus nos actes, nos pensées sont imparfaits, plus nous nous éloignons du tabernacle, non de fait, mais spirituellement. Or, dans la vie mystique, c’est l’intérieur qui compte, l’effort sur nous-mêmes qui compte pour notre adoration. C’est un moyen de prouver à Notre-Seigneur que nous l’aimons... Instruction de Mère Isabelle aux Orantes, Culte du Saint Sacrement Océan de lumière, Directoire chapitre VI, 7 juillet 1917