jeudi 30 janvier 2014

Le sel, la lampe et la ville, Mt 5,13-16

Voici donc le sel, puis la lampe et la ville.
Trois images communes.
Trois vérités proclamées.
Trois exigences à vivre.

                 Matthieu 5,13-16


Le sel est connu à tous les niveaux du monde entier.
À toute nourriture, il donne goût et saveur, Jb 6,6.
Il assainit, conserve, vivifie.
On connaît bien sa symbolique biblique.
il figure la sagesse, exprime l’amitié,
traduit partout l’animation, la joie fraternelle, la vie, Col 4,6.

Il s’agit donc tout d’abord
de rester dans ce monde sans être de ce monde, Jn 17,15;
...
Nous avons à communiquer à la terre la saveur du Royaume !
Nous devons révéler au monde les secrets de la sagesse de Dieu, 1 Co 2,6-13 !
Car nous sommes porteurs d’une parole. La Parole de Dieu
qui est le sel de la vie.
Mais si le sel s’affadit, avec quoi salera-t-on ? Mt 5,132.

Vous êtes la lumière du monde, Mt 5,14.
La deuxième image employée par Jésus
est celle de la lampe que l’on n’allume pas
pour la mettre sous le boisseau,
mais bien sur le lampadaire afin qu’elle éclaire
tous ceux qui sont dans la maison ,5,15.

...
Avec saint Augustin, nous devons commencer par le reconnaître :
«Avoue que toi-même tu n’es pas la lumière...
La lumière que j’ai ne vient pas de moi.
C’est une lumière participée qui me vient toute de toi, mon Dieu» .
L’Église elle-même n’est pas la lumière,
mais le reflet de Sa lumière.
C’est «le Christ», dit le Concile, dans Lumen Gentium justement,

Mais c’est, avant toute chose, la lumière de l’amour.
Ce qu’avec le prophète Isaïe on pourrait appeler
le pur rayonnement de la vraie charité :
Alors ta lumière jaillira comme l’aurore...
Ta lumière se lèvera dans les ténèbres
et ta nuit sera comme la lumière du plein midi, 58,8-10.
Voilà où réside la véritable illumination du monde.
Dans ce rayonnement de clarté qui jaillit des actes de pur amour.
À ce signe, tous vous reconnaîtront pour mes disciples, nous dit le Christ,
à l’amour que vous aurez les uns pour les autres, Jn 13,35.
La visibilité de la communauté est celle du bien qu’elle fait.
C’est parce qu’ils ont pu dire : «Voyez comme ils s’aiment»
que l’entourage des premiers chrétiens a pu reconnaître au milieu d’eux la présence du Christ.
Et que beaucoup, à l’appel de cette lumière, Ac 2,42-47 ; 6,7 ; Ph 2,15 ; 1 Th 5,5-8,
sont devenus chrétiens à leur tour.
Là où est l’amour, là est Dieu, est-il écrit, 1 Jn 4.7.
C’est donc bien notre amour qui est lumière de Dieu !

La troisième image est la plus brièvement mentionnée.
Elle n’est pas pour autant la moins belle.
C’est celle de la ville sise au sommet d’un mont
et qui ne peut être cachée, Mt 5,14.
À première vue, le rapprochement avec la lumière peut paraître étonnant.
Le voyageur égaré en pleine nature dans la nuit
comprend vite pourtant ce que peut représenter
pour tous ceux qui marchent ou errent au loin, dans la campagne,
toutes ces lampes ainsi allumées d’une ville haute habitée.

Oui, le sel de la terre que peuvent devenir nos vies
salées par le feu de la parole de Dieu, Mc 9,49 ;
la lumière du monde que peuvent être nos liturgies
éclairée par l’amour fraternel et la foi rayonnante, Ph 2,15 ;
la ville haute que peuvent représenter nos communautés
élevées dans l’unité en messagères de paix, Ph 4,4-9 ;
tout cela n’a qu’un but : la gloire de Dieu !
Alors, nous dit Jésus, en voyant ce que vous faites de bien,
les hommes rendront gloire à votre Père qui est aux cieux.

Frère Pierre-Marie, St Gervais, Paris

lundi 27 janvier 2014

Sophrone de Jerusalem, lumière pour éclairer les nations, St Luc 2,22-40

Saint Luc 2,22-40 ... Lumière pour éclairer les nations

« Si nos cierges procurent un tel éclat,
c'est d'abord pour montrer la splendeur divine
de Celui qui vient »
Sophrone de Jérusalem.
 
« Allons à la rencontre du Christ, nous tous qui honorons et vénérons son mystère avec tant de ferveur, avançons vers lui dans l'enthousiasme ! Que tous sans exception participent à cette rencontre, que tous sans exception y portent leurs lumières. Si nos cierges procurent un tel éclat, c'est d'abord pour montrer la splendeur divine de Celui qui vient, qui fait resplendir l'univers et l'inonde de lumière éternelle en repoussant les ténèbres mauvaises ; c'est aussi et surtout pour manifester avec quelle splendeur de notre âme, nous-mêmes devons aller à la rencontre du Christ. De même, en effet, que la Mère de Dieu, la Vierge Très Pure, a porté dans ses bras la véritable lumière à la rencontre de ceux qui gisaient dans les ténèbres ; de même nous, illuminés par ses rayons et tenant en mains une lumière visible pour tous, hâtons-nous vers celui qui est vraiment la lumière. C'est évident : puisque la lumière est venue dans le monde et l'a illuminé alors qu'il baignait dans les ténèbres, puisque le Soleil levant qui vient d'en haut nous a visités, ce mystère est le nôtre. C'est pour cela que nous avançons en tenant des cierges, que nous accourons en portant des lumières, afin de signifier la lumière qui a brillé pour nous, mais aussi afin d'évoquer la splendeur que cette lumière nous donnera. Courons donc ensemble, allons tous à la rencontre de Dieu. Cette lumière véritable, qui éclaire tout homme venant en ce monde, voici qu'elle vient. Soyons-en tous illuminés, mes frères, soyons-en tous resplendissants. Que nul d'entre nous ne demeure, comme un étranger, à l'écart de cette lumière; que nul, alors qu'il en est inondé, ne s'obstine à rester plongé dans la nuit. Avançons tous dans la lumière, tous ensemble, illuminés, marchons à sa rencontre, avec le vieillard Syméon, accueillons cette lumière glorieuse et éternelle. Avec lui, exultons de tout notre cœur et chantons un hymne d'action de grâce à Dieu, Père de la lumière, qui nous a envoyé la clarté véritable pour chasser les ténèbres et nous rendre resplendissants.

Le Salut que Dieu a préparé à la face de tous les peuples et qu'il a manifesté pour la gloire du nouvel Israël que nous sommes, voilà que nous l'avons vu à notre tour, grâce au Christ ; nous avons été aussitôt délivrés de la nuit de l'antique péché, comme Syméon le fut des liens de la vie présente, en voyant le Christ. Nous aussi, en embrassant par la foi le Christ venu de Bethléem à notre rencontre, nous qui venions des nations païennes, nous sommes devenus le peuple de Dieu, car c'est le Christ qui est le Salut de Dieu le Père. Nous avons vu de nos yeux Dieu qui s'est fait chair. Maintenant que la présence de Dieu s'est montrée et que nous l'avons accueillie dans notre âme, nous sommes appelés le nouvel Israël ; et nous célébrons sa venue par une fête annuelle pour ne jamais risquer de l'oublier ».
Homélie de Saint Sophrone, évêque de Jérusalem, † 638 ou 639
Discours 3, sur la fête des Lumières 6.7; texte grec: PG 87-3, 3291-3293)
 
Originaire de Damas, rhéteur distingué, Sophrone ne tarde pas à abandonner le monde pour vivre le monachisme. Il eut tout de même la passion du voyage notamment en Égypte et en Palestine. C’est en Palestine, en 634, qu’il fut élu, tout laïc qu’il était, patriarche de Jérusalem, siège qu’il occupa peu de temps, obligé de céder devant l’envahisseur et livrer sa ville sainte au calife Omar en 637. Dès son intronisation comme patriarche, ce juge de la foi rassemble autour de lui un concile appelé à se pencher sur l’unité de la personne dans le Christ. Au cours de sa longue carrière, Sophrone écrit des vies de saints, des poèmes et prononce quelques homélies.

vendredi 24 janvier 2014

Philoxène de Mabboug, Aussitôt, laissant leurs filets... St Mt 4,12-17









St Matthieu 4,12-17

"Aussitôt, laissant leurs filets, ils le suivirent"






De même que l'œil sain et pur reçoit le rayon lumineux qui lui est envoyé, ainsi l'œil de la foi, avec la pupille de la simplicité, reconnaît la voix de Dieu aussitôt que l'homme l'entend. La lumière émanant de sa parole se lève en lui, il se lance joyeusement au-devant d'elle et il la reçoit, comme l'a dit notre Seigneur dans son Évangile : "Mes brebis entendent ma voix et elles me suivent", Jn 10,27...

C'est avec cette pureté et cette simplicité que les apôtres ont suivi la parole du Christ. Le monde n'a pas pu les empêcher, ni les habitudes humaines les retenir, ni aucun des biens qui passent pour être quelque chose dans le monde les entraver. Ces âmes avaient senti Dieu et vivaient de la foi, et chez de telles âmes, rien dans le monde ne peut l'emporter sur la parole de Dieu. Celle-ci est faible dans les âmes mortes ; c'est parce que l'âme est morte que, de puissante, la Parole devient faible et que l'enseignement de Dieu, de valide, devient sans force chez elles. Car toute l'activité de l'homme se porte là où il vit ; celui qui vit pour le monde met au service du monde ses pensées et ses sens, tandis que celui qui vit pour Dieu se tourne vers ses commandements puissants dans toutes ses actions.

Tous ceux qui ont été appelés ont obéi sur-le-champ à la voix qui les appelait lorsque le poids de l'amour des choses terrestres n'était pas suspendu à leur âme. Car les liens du monde sont un poids pour l'intelligence et les pensées, et ceux qui en sont liés et entravés entendent difficilement la voix de Dieu qui les appelle. Mais les apôtres et, avant eux, les justes et les pères n'étaient pas ainsi ; ils ont obéi comme des vivants, et ils sont sortis légers, parce que rien du monde ne les liait de son poids. Rien ne peut lier et entraver l'âme qui sent Dieu ; elle est ouverte et prête, en sorte que la lumière de la voix divine la trouve en état de la recevoir chaque fois qu'elle vient.

Commentaire patristiquepar Philoxène de Mabboug († 523)
http://www.crypte.fr/evangiles/mt0412.html




mercredi 8 janvier 2014

St Jean Chrysostome, Dieu vous appelle à votre patrie qui est dans le ciel





Is 42, 1-4, 6-7 Ps 28 Ac 10, 34-38 Mt 3, 13-17


 Baptême du Christ


Considérons le grand miracle qui s’est produit après le baptême du Sauveur ; il est le prélude de ce qui allait bientôt arriver. Ce n’est pas l’ancien Paradis, c’est le ciel même qui s’ouvre : « Dès que Jésus fut baptisé, voici que les cieux s’ouvrirent », Mt 3, 16. Pourquoi le ciel s’ouvre-t-il lorsque Jésus Christ est baptisé ? Pour nous apprendre que la même chose arrive invisiblement à votre baptême : Dieu vous appelle alors à votre patrie qui est dans le ciel, et vous invite à ne plus rien avoir de commun avec la terre… Si nous ne voyons plus maintenant les mêmes signes, nous recevons néanmoins les mêmes grâces, dont ces signes étaient le symbole.


On vit alors descendre une colombe : elle indiquait à Jean Baptiste et aux juifs que Jésus était le Fils de Dieu. Elle devait en plus apprendre à chacun qu’au moment du baptême le Saint Esprit descend en notre âme. Il ne vient plus sous une forme visible, parce que nous n’en avons plus besoin : la foi suffit maintenant…

Pourquoi le Saint Esprit paraît-il sous la forme d’une colombe ? C’est parce que la colombe est douce et pure, et le Saint Esprit est un esprit de douceur et de paix. Cette colombe nous rappelle aussi un événement que nous lisons dans l’Ancien Testament : lorsque la terre a été inondée par le déluge et toute la race des hommes en danger de périr, la colombe est apparue pour annoncer la fin du cataclysme ; elle portait un rameau d’olivier, apportant la bonne nouvelle du rétablissement de la paix dans le monde. Or tout cela était une préfiguration de l’avenir… Alors que tout était perdu, la délivrance et la rénovation sont survenues. Ce qui est arrivé autrefois par le déluge des eaux arrive aujourd’hui comme par un déluge de grâce et de miséricorde… Ce n’est plus un seul homme que la colombe appelle à sortir de l’arche pour repeupler la terre : elle attire tous les hommes au ciel. Au lieu d’un rameau d’olivier, elle apporte aux hommes la dignité de leur adoption comme enfants de Dieu.

jeudi 2 janvier 2014

Guerric d'Igny, Maintenant tu es venue, ô ma lumière, Epiphanie


Bienheureux Guerric d’Igny (+ 1157)
Moine cistercien, ami de saint Bernard.

, Troisième sermon pour l’Épiphanie, Source Chrétienne, n. 166, p. 271.

 

Maintenant tu es venue, ô ma Lumière

«Lève-toi, resplendis, Jérusalem, car elle est venue, ta lumière ! », Is 60, 1.
 
Sois bénie, Lumière «venue au nom du Seigneur» !
 
«Le Seigneur est Dieu et il a brillé sur nous», Ps 117, 26-27. Par sa bienveillance, ce jour sanctifié par l’illumination de l’Église a brillé sur nous. C’est pourquoi nous te rendons grâce, «Lumière véritable qui éclaire tout homme venant en ce monde», Jn 1, 9, et qui, pour cela précisément, es venue dans le monde en prenant une forme humaine. Elle resplendit Jérusalem, notre mère , Ga 4, 26, mère de tous ceux qui ont mérité d’être illuminés ; elle éclaire désormais tous ceux qui sont dans le monde.
 
Nous te rendons grâce, Lumière véritable : tu t’es faite lampe pour éclairer Jérusalem et pour que le Verbe, la Parole de Dieu, devienne «la lampe de mes pas», Ps 118, 105… Et elle n’a pas seulement été illuminée, elle a été « élevée sur un lampadaire », tout en or massif, Mt 5, 15 ; Ex 25, 31. La voilà devenue «la ville située au sommet des montagnes», Mt 5, 14…pour que son Évangile brille aussi loin que s’étendent les empires du monde…
 
Dieu, toi qui illumines toutes les nations, pour toi nous avons chanté : «Le Seigneur va venir, il illuminera les yeux de ses serviteurs». Maintenant tu es venue, ô ma Lumière : «Illumine mes yeux, pour que je ne m’endorme jamais dans la mort», Ps 12, 4…
 
Tu es venue, Lumière des croyants, et aujourd’hui tu nous as donné la joie d’être illuminés par la foi, qui est notre lampe. Donne-nous aussi toujours la joie de voir s’éclairer ce qui reste en nous de ténèbres…
 
Voilà la route qu’il faut prendre, âme fidèle, pour parvenir à la patrie où « es ténèbres seront comme midi», Is 58, 10 et «la nuit sera claire comme le jour»,  Ps 138, 12.  Alors  «tu verras et tu seras radieuse, ton cœur s’émerveillera et se dilatera», lorsque toute la terre sera remplie de la majesté de la lumière infinie et que «sa gloire sera manifestée en toi», Is 60, 5.2… «Venez, marchons à la lumière du Seigneur !», Is 2, 5. Alors «en fils de lumière » nous marcherons «de clarté en clarté, comme conduits par le Seigneur qui est Esprit», 2 Co 3, 18.