samedi 28 mai 2022

Guerric d'Igny, Elevons notre coeur (+ 1157)

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 17,20-26.

A l'heure où Jésus passait de ce monde à son Père, les yeux levés au ciel, il priait ainsi : "Je ne prie pas seulement pour ceux qui sont là, mais encore pour ceux qui accueilleront leur parole et croiront en moi : Que tous, ils soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi."


Mon Père, ceux que tu m'as donnés, je veux que là où je suis, eux aussi soient avec moi, et qu'ils contemplent ma gloire Jn 17,24.

 

 

 

Heureux disciples qui ont pour avocat leur juge même et dont l'intercesseur doit être adoré au même titre que le Père qu'il prie. Le Père ne rejettera pas le souhait de ses lèvres, Ps 20,3. Jésus a avec celui-ci une seule volonté et une seule puissance, parce que Dieu est unique, Mc 12,32. Toute prière du Christ doit s'accomplir, car sa parole est puissante et sa volonté efficace. Toutes choses existent parce qu'Il a parlé, et elles ont été faites, il a ordonné, et elles ont existé, Ps 32,9.

Il dit : Je veux que là où je suis, eux aussi soient avec moi. Quelle sécurité pour ceux qui ont la foi, quelle confiance pour les croyants, si toutefois ils ne rejettent pas la grâce qu'ils ont reçue! Car ce n'est pas seulement aux Apôtres et à ceux qui furent disciples avec eux que cette sécurité est offerte, mais à tous ceux qui, grâce à leur parole, croiront au Verbe de Dieu. Je ne prie pas seulement, dit-il, pour ceux qui sont là, mais encore pour ceux qui accueilleront leur parole et croiront en moi, Jn 17,20.

De plus, mes frères, Il vous a été donné, comme dit l'Apôtre, non seulement de croire en lui mais encore de souffrir pour lui, Ph 1,29. Il va de soi que la foi en la promesse du Christ ne vous rend pas plus négligents à cause de l'assurance qu'elle vous donne. Mais la joie qu'elle vous donne vous rendant plus fervents, elle vous fait gagner la couronne d'un martyre continuel dans le combat que vous menez chaque jour contre les vices. Martyre continuel, mais facile, facile et pourtant sublime. Facile puisque rien ne nous est ordonné qui soit au-dessus de nos forces. Sublime, puisqu'on y triomphe de toute la puissance de l'homme fort et bien armé, Lc 11,21.

N'est-il pas facile de porter le doux fardeau du Christ ? N'est-ce pas une chose sublime que d'occuper un rang élevé dans son Royaume? Quoi de plus facile, je vous le demande, que de porter des ailes portant celui qui les porte? Quoi de plus sublime que de s'envoler plus haut que tous les cieux, là où le Christ est monté?

Mais à quoi pensons-nous, mes frères? Comment celui qui n'aura pas appris ici-bas à voler chaque jour, par l'exercice et par l'expérience, pourra-t-il alors s'élever soudain de terre et s'envoler vers les cieux ?

D'aucuns volent par la contemplation ; toi, vole au moins par l'amour. Paul est ravi en esprit et s'envole jusqu'au troisième ciel. Jean parvient au Verbe qui était au commencement, Jn 1,1. Toi, du moins, ne traîne pas par terre une âme indigne, et ne souffre pas que ton coeur enfoui dans l'indolence pourrisse en terre. Le grand prêtre qui, aujourd'hui, est entré dans le sanctuaire, nous ayant acquis une rédemption éternelle, He 9,12, et se tient maintenant en présence de Dieu où il intercède pour nous, te crie : "Élevons notre coeur". Réponds-lui avec foi : "Nous le tournons vers le Seigneur."

Si même tu as parfois cherché non les réalités d'en-haut mais celles de la terre, Col 3,1.2, adresse-toi des reproches sans plus attendre et dis au Seigneur, avec le prophète : Qu'y a-t-il donc pour moi dans le ciel, et qu'ai-je voulu sur la terre, loin de toi, Ps 72,25 ? Hélas, comme je me suis misérablement trompé ! Ce qui m'est réservé dans le ciel est si grand, et je le méprisais ! Ce qui est sur la terre est un tel néant, et je le désirais tant !

 Ainsi, le Christ, ton trésor, est monté au ciel : que là aussi soit ton coeur ! C'est de là que tu tires ton origine, c'est là que tu as ta part et ton héritage, c'est de là que tu attends le Sauveur.


Homélie du bienheureux Guerric d'Igny (+ 1157), Sermon pour l'Ascension, 2-5, SC 202, 274-280

Clerus.org

vendredi 13 mai 2022

Saint Cyrille d'Alexandrie, + 444, Le commandement nouveau

5e dimanche de Pâques C

Saint Jean 13,31-35

Au cours du dernier repas que Jésus prenait avec ses disciples, quand Judas fut sorti, Jésus déclara: "Maintenant le Fils de l'homme est glorifié, et Dieu est glorifié en lui."



Je vous donne un commandement nouveau: Aimez-vous les uns les autres. Mais, demandera-t-on peut-être, comment Jésus peut-il dire que ce commandement est nouveau, lui qui a prescrit aux anciens, par l'intermédiaire de Moïse : Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme, de tout ton esprit, et ton prochain comme toi-mêmeDt 6,5 Mt 22,37.

Il faut voir ce que Jésus ajoute. Il ne s'est pas contenté de dire : Je vous donne un commandement nouveau: aimez-vous les uns les autres. Mais pour montrer la nouveauté de cette parole et que son amour a quelque chose de plus fort et de plus remarquable que l'ancienne charité envers le prochain, il ajoute aussitôt : Comme je vous ai aimés, vous aussi, aimez-vous les uns les autres. Il faut donc creuser le sens de ces paroles, et rechercher comment le Christ nous a aimés. Alors, en effet, nous pourrons apprécier ce qu'il y a de différent et de nouveau dans le précepte qui nous est donné maintenant. Donc, lui qui était dans la condition de Dieu, il n'a pas jugé bon de revendiquer son droit d'être traité à l'égal de Dieu, mais au contraire il se dépouilla lui-même en prenant la condition de serviteur. Devenu semblable aux hommes et reconnu comme un homme à son comportement, il s'est abaissé lui-même en devenant obéissant jusqu'à mourir, et à mourir sur une croixPh 2,6-8. Et saint Paul affirme encore : Lui qui est riche, il s'est fait pauvre2Co 8,9.

Voyez-vous la nouveauté de son amour envers nous ? La Loi prescrivait en effet d'aimer son frère comme soi-même. Or notre Seigneur Jésus Christ nous a aimés plus que lui-même, puisque, vivant dans la même condition que Dieu le Père et dans l'égalité avec lui, il ne serait pas descendu jusqu'à notre bassesse, il n'aurait pas subi pour nous une mort physique aussi affreuse, il n'aurait pas subi les gifles, les moqueries et tout ce qu'il a subi, - si je voulais énumérer dans le détail tout ce qu'il a souffert, je n'en finirais pas - et d'abord, il n'aurait pas voulu, étant riche, se faire pauvre, s'il ne nous avait pas aimés plus que lui-même. Une telle mesure d'amour est donc inouïe et nouvelle.

Il nous ordonne d'avoir les mêmes sentiments, de ne faire passer absolument rien avant l'amour de nos frères, ni la gloire ni les richesses. Il ne faut même pas craindre, si c'est nécessaire, d'affronter la mort corporelle pour obtenir le salut du prochain. C'est ce qu'ont fait les bienheureux disciples de notre Sauveur et ceux qui ont suivi leurs traces. Ils ont fait passer le salut des autres avant leur propre vie, ils n'ont refusé aucun labeur. Ils ont accepté de supporter des maux extrêmes pour sauver des âmes qui se perdaient. C'est ainsi que saint Paul dit parfois: Je meurs chaque jour1Co 15,31, et aussi: Si quelqu'un faiblit, je partage sa faiblesse; si quelqu'un vient à tomber, cela me brûle2 Co 11,29.

Le Sauveur nous a ordonné de cultiver la racine de cette piété très parfaite envers Dieu, bien plus grande que l'amour prescrit par la loi ancienne. Il savait que nous n'avons pas d'autre moyen de plaire à Dieu que de suivre la beauté de l'amour, tel qu'il l'a introduit chez nous, et de recevoir ainsi les plus hautes et les plus parfaites bénédictions.

Commentaire sur l'évangile de Jean, 9; PG 74, 161-164. Clerus.org

jeudi 5 mai 2022

Saint Grégoire le Grand, le Bon Pasteur


St Jean 10,11-18 
St Jean  10,27-38

En ce temps-là, Jésus dit aux pharisiens : « Je suis le Bon  Pasteur. Le Bon Pasteur donne sa vie pour ses brebis. Le mercenaire, celui qui n’est pas le pasteur, à qui les brebis n’appartiennent pas, voit-il venir le loup, il abandonne les brebis et s’enfuit. Et le loup les emporte et les disperse. Le mercenaire s’enfuit parce qu’il est mercenaire et qu’il ne se soucie pas des brebis. Je suis le Bon Pasteur; je connais mes brebis et mes brebis me connaissent, comme le Père me connaît et que je connais le Père. Et je donne ma vie pour mes brebis. J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cette bergerie; celles-là aussi, il faut que je les conduise ; et elles écouteront ma voix, et il y aura une seule bergerie et un seul Pasteur ».

Vous avez entendu, frères très chers, l’instruction qui vous est adressée par la lecture d’Evangile ; vous avez entendu aussi le péril que nous courons. Voici en effet que celui qui est bon, non par une grâce accidentelle, mais par essence, déclare : « Je suis le Bon Pasteur ». Et nous donnant le modèle de la bonté que nous devons imiter, il ajoute : « Le Bon Pasteur donne sa vie pour ses brebis ». Il a fait ce qu’il nous a enseigné ; il a montré ce qu’il nous a ordonné. Le Bon Pasteur a donné sa vie pour ses brebis au point de changer son corps et son sang en sacrement pour nous, et de rassasier par l’aliment de sa chair les brebis qu’il avait rachetées. Il nous a tracé la voie du mépris de la mort, pour que nous la suivions ; il a placé devant nous le modèle auquel nous devons nous conformer : dépenser d’abord nos biens extérieurs en toute charité pour les brebis du Seigneur, et si nécessaire, donner même à la fin notre vie pour elles. La première forme de générosité, qui est moindre, conduit à cette dernière, qui est plus élevée. Mais puisque l’âme, par laquelle nous vivons, est incomparablement supérieure aux biens terrestres que nous possédons au-dehors, comment celui qui ne donne pas de ses biens à ses brebis serait-il disposé à donner sa vie pour elles ? Car il en est qui ont plus d’amour pour les biens terrestres que pour les brebis, et qui perdent ainsi à bon droit le nom de pasteur. C’est d’eux que le texte ajoute aussitôt après : « Le mercenaire, celui qui n’est pas le pasteur, à qui les brebis n’appartiennent pas, voit-il venir le loup, il abandonne les brebis et s’enfuit ».
 
Il n’est pas appelé pasteur, mais mercenaire, celui qui fait paître les brebis du Seigneur, non parce qu’il les aime du fond du cœur, mais en vue de récompenses temporelles. Il est mercenaire, celui qui occupe la place du pasteur, mais ne cherche pas le profit des âmes. Il convoite avidement les avantages terrestres, se réjouit de l’honneur de sa charge, se repaît de profits temporels et se complaît dans le respect que lui accordent les hommes. Telles sont les récompenses du mercenaire : il trouve ici-bas le salaire qu’il désire pour la peine qu’il se donne dans sa charge de pasteur, et se prive ainsi pour l’avenir de l’héritage du troupeau. Tant que n’arrive aucun malheur, on ne peut pas bien discerner s’il est pasteur ou mercenaire. En effet, au temps de la paix, le mercenaire garde ordinairement le troupeau tout comme un vrai pasteur. Mais l’arrivée du loup montre avec quelles dispositions chacun gardait le troupeau. Un loup se jette sur les brebis chaque fois qu’un homme injuste ou ravisseur opprime les fidèles et les humbles. Celui qui semblait être le pasteur, mais ne l’était pas, abandonne alors les brebis et s’enfuit, car craignant pour lui-même le danger qui vient du loup, il n’ose pas résister à son injuste entreprise. Il fuit, non en changeant de lieu, mais en refusant son assistance. Il fuit, du fait qu’il voit l’injustice et qu’il se tait. Il fuit, parce qu’il se cache dans le silence. C’est bien à propos que le prophète dit à de tels hommes : « Vous n’êtes pas montés contre l’ennemi, et vous n’avez pas construit de mur autour de la maison d’Israël pour tenir bon dans le combat au jour du Seigneur »Ez 13, 5. Monter contre l’ennemi, c’est s’opposer par la voix libre de la raison à tout homme puissant qui se conduit mal. Nous tenons bon au jour du Seigneur dans le combat pour la maison d’Israël, et nous construisons un mur, quand par l’autorité de la justice, nous défendons les fidèles innocents victimes de l’injustice des méchants. Et parce que le mercenaire n’agit pas ainsi, il s’enfuit lorsqu’il voit venir le loup.
 
Mais il y a un autre loup, qui ne cesse chaque jour de déchirer, non les corps, mais les âmes : c’est l’esprit malin. Il rôde en tendant des pièges autour du bercail des fidèles, et il cherche la mort des âmes. C’est de ce loup qu’il est question tout de suite après : « Et le loup emporte les brebis et les disperse ». Le loup vient et le mercenaire fuit, quand l’esprit malin déchire les âmes des fidèles par la tentation et que celui qui occupe la place du pasteur n’en a pas un soin attentif. Les âmes périssent, et il ne pense, lui, qu’à jouir de ses avantages terrestres. Le loup emporte les brebis et les disperse : il entraîne tel homme à la luxure, enflamme tel autre d’avarice, exalte tel autre par l’orgueil, jette tel autre dans la division par la colère; il excite celui-ci par l’envie, renverse celui-là en le trompant. Comme le loup disperse le troupeau, le diable fait mourir le peuple fidèle par les tentations. Mais le mercenaire n’est enflammé d’aucun zèle ni animé d’aucune ferveur d’amour pour s’y opposer : ne recherchant en tout que ses avantages extérieurs, il n’a que négligence pour les dommages intérieurs du troupeau. Aussi le texte ajoute-t-il aussitôt : « Le mercenaire s’enfuit parce qu’il est mercenaire et qu’il ne se soucie pas des brebis ». En effet, la seule raison pour laquelle le mercenaire s’enfuit, c’est qu’il est mercenaire. C’est comme si l’on disait clairement : « Demeurer au milieu des brebis en danger est impossible à celui qui conduit les brebis, non par amour des brebis, mais par recherche de profits terrestres ». Car du fait qu’il s’attache aux honneurs et se complaît dans les avantages terrestres, le mercenaire hésite à s’opposer au danger, pour ne pas perdre ce qu’il aime. Après nous avoir montré les fautes du faux pasteur, notre Rédempteur revient sur le modèle auquel nous devons nous conformer, quand il affirme : « Je suis le Bon Pasteur ». Et il ajoute : « Je connais mes brebis — c’est-à-dire :  je les aime — et mes brebis me connaissent », comme pour dire clairement : « Elles me servent en m’aimant ». Car il ne connaît pas encore la Vérité, celui qui ne l’aime pas.
 
Maintenant que vous avez entendu, frères très chers, quel est notre péril, considérez également, dans les paroles du Seigneur, quel est le vôtre. Voyez si vous êtes de ses brebis, voyez si vous le connaissez, voyez si vous percevez la lumière de la Vérité. Précisons : si vous la percevez, non par la seule foi, mais par l’amour. Oui, précisons : si vous la percevez, non en vous contentant de croire, mais en agissant. En effet, le même évangéliste Jean qui parle dans l’évangile de ce jour déclare ailleurs « Celui qui dit connaître Dieu, mais ne garde pas ses commandements, est un menteur », 1 Jn 2, 4. C’est pourquoi ici le Seigneur ajoute aussitôt : « Comme le Père me connaît et que je connais le Père. Et je donne ma vie pour mes brebis ». C’est comme s’il disait clairement : « Ce qui prouve que je connais le Père et que je suis connu du Père, c’est que je donne ma vie pour mes brebis ; je montre combien j’aime le Père par cette charité qui me fait mourir pour mes brebis ». Mais parce qu’il était venu racheter, non seulement les Juifs, mais aussi les païens, il ajoute : « J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cette bergerie; celles-là aussi, il faut que je les conduise; et elles écouteront ma voix, et il y aura une seule bergerie et un seul Pasteur ». C’est notre rédemption à nous, venus des peuples païens, que le Seigneur avait en vue lorsqu’il parlait de conduire aussi d’autres brebis. Et cela, mes frères, vous pouvez en constater chaque jour la réalisation. C’est ce que vous voyez aujourd’hui accompli dans la réconciliation des païens. Il a pour ainsi dire constitué une seule bergerie avec deux troupeaux, en réunissant les peuples juif et païen dans une même foi en sa personne, comme l’atteste Paul par ces paroles : « Il est notre paix, lui qui des deux peuples n’en a fait qu’un »Ep 2, 14. Il conduit les brebis à sa propre bergerie quand il choisit pour la vie éternelle des âmes simples de l’un et l’autre peuple. C’est de ces brebis que le Seigneur dit ailleurs : « Mes brebis écoutent ma voix, et je les connais, et elles me suivent, et je leur donne la vie éternelle »Jn 10, 27-28. C’est d’elles qu’il déclare un peu plus haut : « Si quelqu’un entre par moi, il sera sauvé, et il entrera et il sortira, et il trouvera des pâturages »Jn 10, 9. Il entrera en venant à la foi ; il sortira en passant de la foi à la vision face à face, de la croyance à la contemplation; et il trouvera pour s’y rassasier des pâturages d’éternité (suite et fin du sermon de Saint Grégoire le Grand).

(Début du sermon de Saint Grégoire le Grand) « Les brebis du Seigneur trouvent des pâturages, puisque tous ceux qui le suivent d’un cœur simple se rassasient en pâturant dans des prairies éternellement vertes.
Et quels sont les pâturages de ces brebis, sinon les joies intérieures d’un paradis à jamais verdoyant ? Car les pâturages des élus sont la présence du visage de Dieu, dont une contemplation ininterrompue rassasie indéfiniment l’âme d’un aliment de vie. Ceux qui ont échappé aux pièges du plaisir fugitif goûtent, dans ces pâturages, la joie d’un éternel rassasiement. Là les chœurs des anges chantent des hymnes; là sont réunis les citoyens du Ciel. Là se célèbre une fête solennelle et douce pour ceux qui reviennent de ce triste et pénible exil terrestre. Là se rencontrent les chœurs des prophètes qui ont prévu l’avenir; là siège pour juger le groupe des apôtres ; là est couronnée l’armée victorieuse des innombrables martyrs, d’autant plus joyeuse là-haut qu’elle a été plus cruellement éprouvée ici-bas; là, les confesseurs sont consolés de leur constance par la récompense qu’ils reçoivent; là se rencontrent les hommes fidèles dont les voluptés du monde n’ont pu amollir la robuste virilité, là les saintes femmes qui, outre le monde, ont vaincu la faiblesse de leur sexe, là les enfants qui ont devancé le nombre des années par la maturité de leurs mœurs, là enfin les vieillards que l’âge a rendus si faibles, sans pourtant leur faire perdre le cœur à l’ouvrage.

Recherchons donc, frères très chers, ces pâturages où nous partagerons la fête et la joie de tels concitoyens. Le bonheur même de ceux qui s’y réjouissent nous y invite. N’est-il pas vrai que si le peuple organisait quelque part une grande foire, ou qu’il accourait à l’annonce de la dédicace solennelle d’une église, nous nous empresserions de nous retrouver tous ensemble ? Chacun ferait tout pour y être présent, et croirait avoir beaucoup perdu s’il n’avait eu le spectacle de l’allégresse commune. Or voici que dans la cité céleste, les élus sont dans l’allégresse et se félicitent à l’envi au sein de leur réunion; et cependant, nous demeurons tièdes quand il s’agit d’aimer l’éternité, nous ne brûlons d’aucun désir, et nous ne cherchons pas à prendre part à une fête si magnifique. Et privés de ces joies, nous sommes contents !

Réveillons donc nos âmes, mes frères ! Que notre foi se réchauffe pour ce qu’elle a cru, et que nos désirs s’enflamment pour les biens d’en haut : les aimer, c’est déjà y aller. Ne laissons aucune épreuve nous détourner de la joie de cette fête intérieure : lorsqu’on désire se rendre à un endroit donné, la difficulté de la route, quelle qu’elle soit, ne peut détourner de ce désir. Ne nous laissons pas non plus séduire par les caresses des réussites. Combien sot, en effet, est le voyageur qui, remarquant d’agréables prairies sur son chemin, oublie d’aller où il voulait. Que notre âme ne respire donc plus que du désir de la patrie céleste, qu’elle ne convoite plus rien en ce monde, puisqu’il lui faudra assurément l’abandonner bien vite. Ainsi, étant de vraies brebis du céleste Pasteur, et ne nous attardant pas aux plaisirs de la route, nous pourrons, une fois arrivés, nous rassasier dans les pâturages éternels ».

Notredamedesneiges.over-blog.com

Extrait d’un Sermon sur le Bon Pasteur, par le Pape Saint Grégoire le Grand,

Mère Isabelle, sentiment de la présence de Dieu

 4ème dimanche de Pâques, Saint Jean 10-27-30

... Nous voyons bien Notre-Seigneur chercher la brebis égarée, mais pas assez, peut-être, dans toute sa bonté, sa mansuétude de tous les jours... Nous voyons combien Notre-Seigneur est bon, miséricordieux, combien, à chaque instant, nous rencontrons les bontés du Bon Pasteur; combien de fois Il nous relève et nous donne des pensées de contrition; nous voyons qu'Il nous donne toutes les lumières dont nous avons besoin ; nous voyons qu'Il nous a mises sous le joug de l'obéissance, car c'est celui qui nous conduit le plus facilement à Lui. Et pourtant nous n'avons pas toujours en Lui la confiance que nous devrions avoir.


Nous sommes souvent des brebis courant de ci, de là, et le Bon Pasteur nous rapporte là où nous devons être. Si nous nous rappelons tous les sentiers par lesquels nous avons marché dans notre vie quand nous étions loin de la vie religieuse, de la perfection !... combien Notre-Seigneur a été patient avec nous et nous a toujours ramenées au bercail. Notre-Seigneur est infiniment et souverainement sage. La Sainte Vierge l'a été, on peut le dire d'elle autant que cela peut lui convenir. Elle a eu la plénitude des grâces ; puisque l'ange lui a dit: "Vous êtes pleine de grâce", nous pouvons donc presque lui prêter les attributs de Dieu

Imitons le Bon Pasteur. Il ne suffit pas de l'aimer, il faut l'imiter. Dans nos rapports avec le prochain, soyons comme le Bon Pasteur. On est souvent Bon Pasteur sans avoir de l'autorité, par la simple influence de la vertu. Une soeur toujours patiente, toujours bienveillante est Bon Pasteur des âmes. On ne l'est pas que pour les pécheurs, on peut l'être avec les personnes qui nous entourent par l'amour, la charité qu'on doit avoir les unes pour les autres. Il faut ce lien de la charité qui est celui de la perfection...

Mère Isabelle, IFondatrice, nstruction aux Orantes de l'Assomption, Sentiment de la présence de Dieu, 6 mai 1916.