mardi 16 décembre 2008

Conduis-moi, douce lumière

Conduis-moi,
douce lumière,
A travers les ténèbres qui m'encerclent.
Conduis-moi, toi,
toujours plus avant !
Garde mes pas :
je ne demande pas à voir déjà
Ce qu'on doit voir là-bas : un seul pas à la fois
C'est bien assez pour moi.
Je n'ai pas toujours été ainsi
Et je n'ai pas toujours prié
Pour que tu me conduises, toi, toujours plus avant.
J'aimais choisir et voir mon sentier ;
mais maintenant :
Conduis-moi, toi, toujours plus avant !
Si longuement ta puissance m'a béni !
Sûrement elle saura encore
Me conduire toujours plus avant
Par la lande et le marécage,
Sur le rocher abrupt et le flot du torrent
Jusqu'à ce que la nuit s'en soit allée...
Conduis-moi, douce lumière,
Conduis-moi, toujours plus avant !
Cardinal, John Henry Newman
1801-1890

vendredi 12 décembre 2008

Persévérer - nous laisser enseigner - Lectio divina

LIRE LA PAROLE DE DIEU : C'EST PRIER AVEC LE COEUR


Durant la première étape de cette pédagogie divine – la LECTURE – nous nous laissons enseigner, comme le Seigneur l’entend :

Certains jours, ce sera une lecture peut-être lumineuse, où un mot, un verset, une attitude, s’imposent soudain à nous ; dans ce cas, accomplissons ce qui nous est donné dans ce temps de lecture.

D’autres jours, ce sera plus laborieux, voire plus décevant (à vue humaine) ; c’est alors une invitation à persévérer et non à se décourager, le Seigneur travaille plus souvent dans le secret du cœur que dans la lumière éblouissante, il faut du temps pour que le grain semé commence à laisser apparaître une jeune pousse. Respectez ce temps nécessaire. Je vous rappelle que le vrai fruit de toute prière ne s’évalue pas dans la prière elle-même, mais dans notre vie, nos actes et nos choix.

D’autres jours enfin, vous vous sentirez moins disponibles et le temps de la Lectio Divina lui-même, indépendamment du texte prié parce qu'il est lu, vous semblera plus difficile à « habiter », ou même à prendre. Dans une vie bien occupée, il est normal que cela arrive. Je vous conseille alors de prendre quand même ce temps, au moins le minimum, de faire un acte de foi en la puissance de la Parole de Dieu et de lire comme vous le pouvez le ou les texte(s) prévu(s). Saint Paul nous a bien dit que l’Esprit-Saint venait au secours de notre faiblesse, pour nous apprendre à prier. N’attendons pas d’être dans une disponibilité d’esprit idéale pour se mettre à la prière ; et si c’était la prière elle-même, même pauvre et peu satisfaisante, qui pouvait nous aider à grandir dans notre disponibilité ?

N’oublions pas que l’Ecriture s’éclaire elle-même. A un autre moment, il peut donc être utile de prendre l’habitude de noter sur un carnet, dans un cahier, les versets qui auront été votre nourriture du jour.

Durant le temps quotidien de lectio divina, après avoir invoqué l’Esprit Saint et pris le temps de lire posément, calmement, le texte de la Parole de Dieu, on peut alors s’appuyer sur un mot, une phrase, un verset du texte biblique que l’on vient de lire, pour entrer dans la prière silencieuse où nous laissons la Parole de Dieu nous imprégner.

mardi 9 décembre 2008

Nous nourrir de la Parole, Jean-Paul II


Jean-Paul II, Novo Millennio Ineunte. § 39-40

" Il est nécessaire que l'écoute de la Parole devienne une rencontre vitale, selon l'antique et toujours actuelle tradition de la lectio divina permettant de puiser dans le texte biblique la parole vivante qui interpelle, qui oriente, qui façonne l'existence. Nous nourrir de la Parole, pour que nous soyons des « serviteurs de la Parole » dans notre mission d'évangélisation, c'est assurément une priorité pour l'Église au début du nouveau millénaire. "

mardi 2 décembre 2008

LA PAROLE : FESTIN DE DIEU


Dieu nous restaure, nous refait, nous recrée sans cesse pas sa Parole. « La Sagesse a immolé ses victimes ; elle a envoyé ses servantes pour convoquer à la forteresse et aux remparts de la ville : « Si quelqu’un est petit, qu’il vienne à moi » Prov 9,1-4. Elle a dressé une table, c’est-à-dire l’Ecriture Sainte ; nous qui, fatigués, venons à elle avec les fardeaux de ce monde, elle nous restaure du pain de la Parole et nous fortifie à son festin contre les adversités. D’où aussi il est dit ailleurs pas l’Eglise : Tu as préparé une table devant moi contre ceux qui m’oppriment, Ps 22,5. Il est remarquable que Grégoire applique ces textes à l’Ecriture plutôt qu’à l’Eucharistie.

Le Seigneur nous rend forts contre les tentations en nous refaisant par la nourriture de sa Parole. La faim de l’esprit, c’est le silence de Dieu subi par le réprouvé. Quand manque à l’esprit la Parole de Dieu, il se trouve démuni contre la tentation.

L’Ecriture sainte est pour nous nourriture et boisson. La lire, c’est la manger ; encore faut-il l’assimiler. « Notre bouche mange quand nous lisons la Parole de Dieu ; nos entrailles se remplissent quand nous comprenons et gardons ce que nous avons pris la peine de lire ». Et Grégoire explique ensuite que ces entrailles, ne sont autre chose que la profondeur de l’esprit : l’intention droite, le désir saint, la volonté humble devant Dieu, la bienveillance pour le prochain. Quand notre esprit a reçu la nourriture de la vérité, notre intérieur ne doit pas rester vide.

Les paroles de Dieu restaurent l’esprit affamé et façonnent la beauté morale de notre vie. Elles sont les aliments que Dieu nous donne ; on s’en remplit le ventre au festin de Dieu. Tout chrétien rumine soigneusement dans son esprit la nourriture de sa sainte Parole. Les païens eux aussi sont tenaillés par la soif de la Parole ; quand enfin ils y accèdent, ils en boivent avec d’autant plus d’avidité qu’ils en ont eu soif plus longtemps.

Les paroles de l’Ecriture sont paroles de paix et paroles de vie. Elles sont la vie du croyant et elles lui donnent la vie. L’Ecriture est le roc sur lequel elle est bâtie. La saint Eglise tout entière est fondée sur le mystère des Ecritures.

Patrick CATRY, O.S.B., Moine de Wisques, Parole de Dieu, Amour et Esprit Saint chez Saint Grégoire le Grand, Vie monastique N° 17, 11-12

jeudi 27 novembre 2008

1er dimanche de l’Avent, 30 novembre 2008

1 Co 1,3-9 ; Mc 13,33-37

L’avent est une attente. Et tandis qu’il approche, je m’interroge sur ce que j’attends aujourd’hui. Avec la même vigilance que le veilleur sur le rempart guettant l’arrivée du messager, j’attends de voir se lever le blé, même s’il doit pousser dans l’ivraie…

L’incarnation est à la fois aboutissement et commencement d’une histoire d’amour. Dieu a tant aimé et aime le monde qu’il envoie son Fils pour nous montrer le chemin. Notre part est de l’aimer lui le Père, de nous laisser sauver au point de nous laisser entraîner à aimer ce qui demeure invisible. C’est tout le mystère de notre vie, du don fait de nous-même. Modestement, au cœur de notre faiblesse, nous nous laissons entraîner vers ces biens invisibles. « Mais ce trésor, nous le portons en des vases d’argile, pour que cette puissance incomparable soit de Dieu et non de nous » 2 Co 4,7. Tel est le mystère de la puissance de Dieu et celui de notre pauvreté, à accueillir comme le lieu où le Seigneur vient avec puissance. « Lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort » nous dit encore St Paul 2 Co 12,10. Puisque tout est reçu de Dieu, vivons tout en Dieu qui se manifeste puissance d’amour à travers la faiblesse d’un enfant. Déposons lui tout à la crèche, forces et faiblesses, amour, souffrances et prière.


L’avent un temps d’attente actif. Je vous invite à créer un groupe de partage de la Parole de Dieu
Il suffit de commencer à 2 ou 3 pour pouvoir partager

Prions pour que le Seigneur nous aide à entrer réellement dans la "largeur" de sa Parole et nous ouvre ainsi à l'horizon universel de l'humanité qui nous unit avec toutes nos différences ».



Bon avent - Sr Jeanine

lundi 24 novembre 2008

A CŒUR OUVERT

Pour que la lectio divina soit vraiment un acte, pour qu’elle s’épanouisse comme telle, il faut, au principe de tout le processus, une disposition non d’inertie, de farniente intellectuel et spirituel mais de réceptivité, d’éveil, d’ouverture.

Ouverture : Pour faire ta lectio divina, il faut certes que le livre soit ouvert devant toi ; mais il faut aussi qu’au même instant ton cœur soit ouvert en toi… Il faut que tout ton être soit ouvert.

L’homme biblique est un homme éminemment ouvert. Nous avons là une constance de l’anthropologie spirituelle qui se dégage de la Bible, et partant, un modèle de ce que nous devons devenir. Tout dans l’homme biblique est ouvert.

L’oreille : Tu m’as ouvert l’oreille, Ps 40,7.

« Il éveille chaque matin, il éveille mon oreille
pour que j’écoute comme un disciple »,
Is 50,4-5.

Les yeux :

« Ouvre mes yeux : je regarderai
aux merveilles de ta Loi,
Ps 119,18.

Le cœur :

« Aujourd’hui si vous écoutiez ma voix !
N’endurcissez pas votre cœur…,
Ps 95,7-8.

« Nous étant assis, nous adressâmes la parole aux femmes qui s’étaient réunies. L’une d’elles, nommée Lydie, nous écoutait ; c’était une négociante en pourpre de la ville de Thyatire ; elle adorait Dieu. Le Seigneur lui ouvrit le cœur, de sorte qu’elle s’attacha aux paroles de Paul, Ac 16,13-14.


L’intelligence :

« Alors il leur ouvrit l’esprit à l’intelligence des Ecritures, Luc 24,45.

Ainsi, quand tu lis, tout doit être ouvert en toi ; tu dois être tout yeux, tout oreilles, un peu comme un curieux Vivant d’Ezéchiel et de l’Apocalypse, « constellés d’yeux par-devant et par derrière », Ap 4,6 ; Ez 1,5-21. Tous les pores de ton être spirituel doivent alors s’ouvrir, comme ceux d’une éponge, pour recevoir la plénitude de l’océan. Epanouis-toi dans les profondeurs sous-marines de l’Ecriture comme dans ton élément vital, et là, regarde ces « merveilles de Dieu dans les profondeurs », Ps 105,24 Vulg.

Et la bouche ! Nous l’avions oubliée… Il faut l’ouvrir largement elle aussi, pour la manducation et la louange :

« Ouvre large ta bouche, et je l’emplirai, Ps 81,11.

« J’ouvre large ma bouche et j’aspire,
avide de tes commandements »,
Ps 119, 131.

« Seigneur, ouvre mes lèvres,
et ma bouche publiera ta louange
, Ps 51, 17.

Ephphata ! Ouvre-toi !, Mc 7,34. Ouvre donc tous tes sens spirituels. Ouvre les yeux : l’Ecriture est lumière ; ouvre les oreilles : l’Ecriture est musique ; l’Ecriture est eau vive.


François Cassingena-Trévedy, Moine de Ligugé, Quand la Parole prend feu, Vie monastique N° 36, abbaye de Bellefontaine, 23-25.

mercredi 19 novembre 2008

La Parole de Dieu est une énergie vivante


La Parole de Dieu est une énergie vivante. Elle communique la vie parce que Dieu est la source perpétuelle d'une énergie rayonnante qui émane de Lui. La Parole divine accomplit sa mission créatrice de vie sans cesse et à jamais :


« Car la Parole de Dieu est vivante et efficace, plus pénétrante qu'une épée à deux tranchants ; elle atteint jusqu'à la division de l'âme et de l'esprit, des jointures et des moëlles ; elle est le juge des intentions et des pensées du cœur. », Heb. 4,12.


La Parole divine emprunte dans les Saintes Ecritures les formes de la vie des hommes sur la terre afin d'être comprise par eux.

Les Ecritures ont, dans toutes les langues du monde, la même énergie et déploient la même puissance. La Parole de Dieu n’est pas expression littérale ; c'est une énergie divine qui assume les formes. La Parole divine est une nourriture réelle.

L'homme possède une âme créée par le souffle de Dieu et distincte du corps mortel. Alors que la vie terrestre de l'humanité est entretenue par la nourriture matérielle, l'air pur, l'activité au sein d'une communauté humaine, la vie spirituelle, conformément à la diginité de l'homme, est nourrie par le Saint-Esprit, la prière et maints autres éléments.

"L'homme ne vivra pas seulement de pain"...
La Parole de Dieu est cependant un aliment spirituel et intellectuel.
« L'homme ne vivra pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu.
», Mt, 4,4.

Les liturgies de l'Eglise orthodoxe copte font une large place à d'innombrables passages de la Bible dans tous les services. Soulignons, à titre d'exemple, «une Divine Liturgie comprend deux lectures ou citations des Psaumes, deux lectures des Évangiles, un extrait d'une épître paulienne, un passage d'une épître « catholique » et des Actes. Des extraits des Psaumes et des Evangiles sont intégrés aux prières personnelles de chaque jour". On incite les fidèles à mémoriser d'importants passages de l'Ancien et du Nouveau Testament. La mémorisation joue toujours un rôle primordial dans la pratique de la foi chrétienne.

Bien que l'Eglise croit en Jésus-Christ, la Parole Incarnée et son Rédempteur éternel, elle est souvent détournée du chemin de la foi en Jésus et s'engage dans d'autres voies opposées au salut.

L'Eglise est parfois considérée comme trop timide pour affronter le monde avec la puissance du salut. Aujourd'hui les chrétiens et les Eglises doivent plus que jamais, dans l'histoire, faire face à un grand défi : affronter le monde courageusement avec la vertu salvatrice du Messie et la puissance agissante des Ecritures.


« En effet, vous êtes nés de nouveau, non des pères mortels, mais grâce à une semence immortelle, grâce à la Parole vivante et éternelle de Dieu... La parole de Dieu demeure pour toujours. », 1 P. 1, 23-25.


Conférence européenne des Sociétés bibliques, avril 1991, Eisenach, Allemagne. En mémoire de Son Eminence Abba ATHANASIOS, Métropolite de BENI-SOUEF, 1923 -2001. Texte tiré de LES ECRITURES - Patriarcat copte d’Alexandrie- Le Lien - La voix de Saint Marc Février-mars 2002.

mardi 18 novembre 2008

La Lectio divina Lecture priante de la Parole de Dieu

Le coeur et l’intelligence cherchent le Seigneur

La Lectio divina nous met à l’écoute de l’Esprit

Dieu nous parle dans l’Ecriture. C’est pourquoi chacun peut lire assidûment les Saintes Ecritures jusqu’à ce qu’elles deviennent une partie de son être. Par la Lectio divina ou lecture priante de la Parole de Dieu consignée dans la Bible, chaque croyant communie au Christ et le Christ lui fait connaître le Père.

Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole et mon Père l’aimera et nous viendrons à lui et nous ferons chez lui notre demeure”;" Jn 14,23.

En lisant l’Ecriture, nous nous mettons à l’écoute de ce que l’Esprit veut nous dire, ici et maintenant.

La Lectio divina nous fait entrer en contact avec le Mystère du Christ

En lisant, le message de la Parole pénètre le coeur et le coeur pénètre le mystère. L’Esprit présent en nous s’unit à la Parole de Dieu, qui est remplie d’Esprit Saint, de sorte que la Lectio stimule en nous la vie de la grâce.
A mesure qu’elle nous éveille, la Lectio développe et approfondit notre être spirituel dans la Parole de Dieu, et nous donne une conscience de plus en plus profonde du Mystère du Christ.

Lectio divina transforme notre coeur

Considérant la vie chrétienne comme l'évangélisation de notre conscience et de notre être profond, la place de la Lectio divina a toute son importance.

Vivre une retraite de Lectio demande de quitter notre quotidien pour mieux le retrouver ensuite.Cela demande de donner du temps, tout notre temps à la Parole de Dieu pour nous laisser transformer par elle. Il faut oser s'exposer simplement face à la Parole qui se révèle agissante et créatrice.

Origène, 3ème siècle

"Lire l’Ecriture est une façon pour Dieu et pour l’homme de se rencontrer. La vraie conversion, c’est de garder ce qu’on a compris dans son coeur et d’y conformer sa vie".

L’oreille du coeur s’affine progressivement et la Parole ne se déchiffre plus seulement dans l’Ecriture, mais aussi dans les rencontres et les événements. Dieu s’annonce dans la Bible et tout au long du jour. Dans cette annonciation, il nous revient d'écouter, en disponibilité et lucidité.En conclusion :La Lectio divina s’adresse à tous. Elle est accessible à tout lecteur humble et bienveillant. C'est une forme de rencontre entre Dieu et l’homme. En lisant l’Ecriture, nous devenons pleinement l'homme ou la femme à qui Dieu parle et dont Il attend une réponse.

Origène

“Il existe dans les Saintes Ecritures une sorte de force qui suffit, même sans explication, à celui qui la lit”, Homélie sur Josué XX 2.

vendredi 14 novembre 2008

LECTURE GRATUITE ET PRIANTE, ECOUTE DE DIEU ET DOCILITE

Saint Cyprien de Carthage a formulé une des lois fondamentales de la lecture biblique, lorsqu’il a dit : «Ou prie assidûment, ou lis ; tantôt parle avec Dieu, tantôt écoute-le». Origène serait pourtant le premier avec lequel serait apparue «avec netteté la pratique d’une lectio divina». Nous savons qu’il avait été formé par des maîtres israélites ; or la lecture de la Bible en synagogue se faisait dans une ambiance de louange et un environnement de chants, et les Juifs connaissaient déjà la lecture savourée et priante de la Bible. Origène était fidèle à ce principe de lecture gratuite, faite dans un climat de recueillement, de passivité, d’écoute de Dieu et de docilité, car, dans sa vie et celle de ses compagnons, selon St Jérôme, «la lecture succédait à la prière et celle-ci à la lecture».
Ce qui est, par contre, spécifiquement chrétien – cela va de soi -, c’est le parallélisme établi entre les deux alliances. Nous trouvons déjà cela dans les évangiles. Ainsi, lorsque Jésus, à Nazareth, s’applique à lui-même les paroles d’Isaïe 61,1-2 : «L’Esprit du Seigneur est sur moi…», Luc 4,16-30 et lorsque, cheminant avec les disciples d’Emmaüs, «commençant par Moïse et tous les Prophètes, il leur interpréta dans toutes les Ecritures ce qui les concernait», Luc 24,27. Dès les lendemains de la Résurrection, les Apôtres reprendront cette méthode, car Saint Pierre, dans le discours de la Pentecôte, dit voir dans le miracle des langues la réalisation de la prophétie de Joël 3,1-5, Actes 2,16-21, et dans la Résurrection de Jésus, celle du psaume 16, Actes 2 ,25-32 ; Ps 16,8-11 et du Psaume 110,1, Actes 2,34-35, Etienne, dans son discours devant le Sanhédrin Actes 7,1-53, et Paul, dans celui d’Antioche de Pisidie, Actes 13,16-41, ainsi qu’à travers ses épîtres, procéderont de même. Les Pères du Désert ont continué cette méthode.

Dom Louis Leloir, O.S.B., Désert et communion, témoignages des Pères du Désert recueillis à partir des Paterica arméniens, spiritualité orientale, N° 26, 241-242.

vendredi 31 octobre 2008

Ne pleure pas si tu m'aimes

2 novembre
Commémoration de tous les fidèles défunts




Ne pleure pas si tu m'aimes.
Si tu savais le don de Dieu et ce que c'est que le ciel !
Si tu pouvais d'ici entendre le chant des anges et me voir au milieu d'eux.
Si tu pouvais voir se dérouler sous tes yeux les horizons et les chants éternels, les nouveaux sentiers où je marche !





Si un instant, tu pouvais contempler comme moi la Beauté
devant laquelle toutes les beautés pâlissent.
Quoi ! Tu m'as vu et tu m'as aimé dans le pays des ombres,
et tu ne pourras ni me revoir, ni m'aimer dans le pays des immuables réalités !

Crois-moi, quand la mort viendra briser tes liens
comme elle a brisé ceux qui m'enchaînaient
et quand un jour que Dieu connaît et qu'il a fixé,
ton âme viendra dans le ciel où l'a précédée la mienne,
ce jour-là tu me verras,
tu retrouveras mon affection épurée.

A Dieu ne plaise qu'entrant dans une vie plus heureuse,
infidèle aux souvenirs et aux vraies joies de mon autre vie,
je sois devenu moins aimant.

Tu me reverras donc, transfiguré dans l'extase et le bonheur,
non plus attendant la mort,
mais avançant d'instant en instant avec toi
dans les sentiers nouveaux de la Lumière et de la Vie.

Essuie tes larmes et ne pleure plus si tu m'aimes.

Saint Augustin

mercredi 22 octobre 2008

La Parole de Dieu est comme une échelle, homélie de Benoît XVI, 6 octobre 2008

La Parole de Dieu est comme une échelle sur laquelle nous pouvons monter et, avec le Christ, également descendre dans la profondeur de son amour (Benoît XVI). Aujourd'hui, toujours pour soutenir notre lectio divina quotidienne, nous vous proposons un passage de la très riche homélie de Benoît XVI, prononcée au synode, le 6 octobre. Nous vous invitons à la lire entièrement.

La Parole de Dieu est le fondement de tout, elle est la véritable réalité. Et pour être réalistes, nous devons justement compter sur cette réalité. Nous devons changer notre idée que la matière, les choses solides, qu'on peut toucher, seraient la réalité la plus solide, la plus sûre. À la fin du Sermon sur la Montagne, le Seigneur nous parle des deux possibilités de bâtir la maison de sa vie: sur le sable et sur la roche. Sur le sable ne bâtit que celui qui bâtit sur les choses visibles, tangibles, sur le succès, sur la carrière, sur l'argent. Telles sont apparemment les vraies réalités. Mais tout cela, un jour, disparaîtra. Nous le voyons aujourd'hui dans la faillite des grandes banques: cet argent disparaît, il n'est rien. Aussi toutes ces choses, qui semblent être la véritable réalité sur laquelle compter, ne sont qu'une réalité de deuxième ordre. Celui qui bâtit sa vie sur ces réalités, sur la matière, sur le succès, sur tout ce qui apparaît, bâtit sur du sable. Seule la Parole de Dieu est le fondement de toute la réalité, elle est aussi stable que le ciel, plus stable que le ciel, elle est la réalité. Nous devons donc changer notre concept de réalisme. La personne réaliste est celle qui reconnaît dans la Parole de Dieu, dans cette réalité apparemment si faible, le fondement de tout. La personne réaliste est celle qui bâtit sa vie sur ce fondement qui reste en permanence. C'est ainsi que ces premiers versets du Psaume nous invitent à découvrir ce qu'est la réalité et à trouver de cette manière le fondement de notre vie, et comment construire la vie.
En entrant dans la Parole de Dieu, nous entrons réellement dans l'univers divin. Nous sortons de l'étroitesse de nos expériences et entrons dans la réalité qui est vraiment universelle. En entrant dans la communion avec la Parole de Dieu, nous entrons dans la communion de l'Église qui vit la Parole de Dieu . Nous n'entrons pas dans un petit groupe, dans la règle d'un petit groupe, mais nous sortons de nos limites. Nous sortons vers le large, dans la vraie largeur de l'unique vérité, la grande vérité de Dieu. Nous sommes réellement dans l'universel. Et nous sortons ainsi dans la communion de tous nos frères et soeurs, de toute l'humanité, parce que dans notre coeur se cache le désir de la Parole de Dieu qui est une. Aussi l'évangélisation, l'annonce de l'Évangile, la mission ne sont-elles pas une espèce de colonialisme ecclésial, par lequel nous voulons insérer les autres dans notre groupe. C'est sortir des limites de chaque culture dans l'universalité qui nous relie tous, nous unit tous, nous fait tous frères. Prions de nouveau afin que le Seigneur nous aide à entrer réellement dans la "largeur" de sa Parole et nous ouvre ainsi à l'horizon universel de l'humanité qui nous unit avec toutes les différences.

Sainte lectio divina à tous

http://lectiodivina.over-blog.com

dimanche 19 octobre 2008

Hooseek, un moteur de recherche solidaire

Les Orantes de l'Assomption sont de la Famille de l'Assomption.
Notre solidarité de famille me fait vous partager une sensibilisation de nos frères Augustins de l'Assomption. Pourquoi ne pas utiliser un moteur de recherche qui privilégie de financer des associations ? Voici le texte publié dans ATLP de septembre N° 219 (Province de France).

"Il a été créé par une petite équipe de la région parisienne et il fonctionne avec les recherches de Google, Yahoo et autres moteurs de recherche.
Ce qui fait son originalité, c'est que l'argent généré par les flux publicitaires est redistribué à des associations de votre choix.
En clair : 1 recherche = 1 don. C'est un service gratuit.
Chaque recherche rapporte à 0,20 euros à une association de votre choix. On peut choisir jusqu'à 4 associations déclarées au Journal Officiel. Il ne faut rien installer ; juste penser à surfer sur Hooseek plutôt que sur Google. On ne perd rien au change car les résultats de recherche sont ceux de Google, Yahoo ou tout autre moteur de recherche de votre choix.
Alors rendez-vous sur http://www.hooseek.com, cliquez sur le coeur ou sur "soutenir une association", et n'oubliez pas d'indiquer que vous souhaitez que l'argent aille, par exemple, à la Procure Missionnaire de l'Assomption !
Faites circuler l'info ! Plus il y aura d'utilisateurs, plus çà rapportera. De quoi, aussi, vous donnez bonne conscience de surfer !

Alors choisissez la Procure Missionnaire de l'Assomption. La procure soutient la formation de nombreux jeunes et des projets de développement dans des pays de missions.

D'avance merci pour eux, je serai heureuse de connaître votre choix, écrivez-moi sur mon email arbre89fleur@gmail.com

Partagez-moi aussi vos réactions à la lecture des textes publiés, aide, approfondissement ou autres désirs...

merci Sr Jeanine -

jeudi 16 octobre 2008

L’ECRITURE OBSCURITE ET LUMIERE



Dom Louis Leloir, O.S.B., moine de l'abbaye St Maurice-et-Saint-Maur de Clervaux au Luxembourg

Extrait Désert et communion, témoignages des Pères du désert recueillis à partir des Paterica arméniens, spiritualité orientale, N° 26, 253-254.


«Après les Pères du Désert, Saint Augustin a proposé, sur l’obscurité des Ecritures, des réflexions qui paraissent être la conclusion vers laquelle s’acheminerait, mais à tâtons, les moines du III et IVème siècles. Elles valent la peine d’être citées.

St Augustin souligne que le mystère de Dieu demeure certes inaccessible en lui-même, et que le chrétien doit tenir compte de l’avertissement de l’Ecriture : «Ne cherche pas ce qui est plus haut que toi, ne scrute pas ce qui est plus fort que toi", Siracide 3,21. L’Ecriture est obscure, parce qu’elle s’efforce de révéler celui qui habite une lumière inaccessible, le mystère de la vie trinitaire, qu’on ne peut décrire qu’en analogie et paraboles ; sa sainteté, à laquelle on doit épargner tout contact irrespectueux. L’obscurité de l’Ecriture est d’ailleurs miséricorde de la part de Dieu ; la lumière divine serait trop éblouissante pour les faibles yeux de l’homme ; d’où la nécessité de la tamiser par une nuée légère : «J’ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais vous ne pouvez les porter maintenant», Jn 16,12 ; la levée des voiles, pour être proportionnée à la faiblesse de l’homme, devra donc être progressive. Trop de facilité à découvrir les profondeurs de l’Ecriture nuirait à notre conscience de sa valeur et à l’ardeur de notre recherche. On ne frappe pas à une porte ouverte, et on ne cherche pas ce qui est à la portée de la main : si nous avions trop de facilité pour comprendre l’Ecriture, nous l’estimerions moins, et notre recherche de ses beautés serait molle et intermittente. C’est donc vraiment par miséricorde que l’Ecriture sera à la foi "accessible à tous » et « pénétrable par très peu». Il faut que tous, y compris les plus simples, puissent trouver une nourriture, mais il est nécessaire également que les esprits plus pénétrants aient peine à saisir la profondeur de ses mystères».

L’Ecriture, cependant n’a pas son but en elle-même ; elle existe pour notre utilité. Le Christ a dit du reste : «Il n’y a rien de caché qui ne doive être révélé», Mt 10,26 ; Lc 8,17. Le Christ nous a donc promis la révélation progressive des mystères de l’Ecriture : «Hier, tu comprenais un peu ; aujourd’hui tu comprends davantage ; demain tu connaîtras bien plus encore : la lumière même de Dieu grandit en toi».

Et c'est pourquoi les Pères du Désert, lisant l'Ecriture, nourriront toujours l'espoir, après une lecture hésitante, de mieux comprendre au cours d'une lecture ultérieure.

dimanche 12 octobre 2008

LES SENS DE L’ECRITURE

«L’homme spirituel juge de tout et ne relève du jugement de personne», a dit Saint Paul 1 Co 2,15. Les Patrologues savent quelle pistes précieuses ont été décelées par les Pères et les anciens moines ; c’est qu’ils étaient mus par l’Esprit de Dieu, les conduisant où il voulait, vers les dimensions multiples de la Parole de Dieu. La plénitude du texte sacré est, en fait, illimitée ; l’expérience des générations chrétiennes qui coexistent et se succèdent dans des situations variées met sans cesse en valeur de nouveaux aspects de la Bible ; de constantes relectures du texte sacré ouvrent à des perspectives toujours nouvelles.

C’est ainsi que l’inspirations créatrice des vrais spirituels, tels qu’étaient les Pères du Désert, peut beaucoup apporter : une exégèse prophétique viendra assouplir les méthodes techniques, et enrichir la science de la Bible des intuitions que communique l’expérience de Dieu : « Les paroles divines augmentent avec celui qui les lit », disant Saint Grégoire ; plus est spirituel celui qui lit la Bible, et plus il approfondit la Parole de Dieu, plus celle-ci s’éclaire de significations nouvelles ; la mystique n’apporte pas moins à l’exégèse que l’exégèse à la mystique.


Dom Louis Leloir, O.S.B., Moine de Clervaux, Désert et communion, témoignages des Pères du Désert recueillis à partir des Paterica arméniens, spiritualité orientale, N° 26, 264-265.

samedi 27 septembre 2008

La lecture de l’Ecriture chasse de l'âme le découragement

Comment se comporter pendant les périodes de déréliction, ou au moins pour en réduire les dommages ?

Un des conseils est de prier en attendant que cela se termine : « Pendant les périodes de tentations, lorsque quelqu’un se trouve dans l’obscurité, une recommandation serait de s’occuper à la lecture des écrits des Pères » :

Lorsqu’il arrive que ton âme soit enveloppée de fortes ténèbres au-dedans d’elle-même, comme lorsque les rayons du soleil au milieu des nuages sont cachés à la terre, et que ton âme est privée pour un bref moment de réconfort spirituel et de la lumière de la grâce, à cause de la nuée des passions qui la couvre, et qu’en plus, la force produisant la joie est réduite pour un peu de temps, alors que ton esprit est couvert par un brouillard inaccoutumé, que ton esprit ne se trouble pas et ne t’abandonne pas au découragement. Mais sois patient, occupe-toi par la lecture des écrits des Docteurs de l’Eglise, efforce-toi de prier, et attends de recevoir de l’aide. L’aide viendra alors sans tarder et sans que tu t’en aperçoives.

La lecture de l’Ecriture (qeryana) : le mot syriaque s’applique à la fois à la Bible et aux Pères de l’Eglise chasse de l’âme le découragement et les ténèbres.

Quand quelqu’un souffre d’un sentiment de lourdeur alors qu’il se trouve dans la quiétude, celui-ci se dissout à quelque lecture des Ecritures ; parfois cela se produit grâce au discernement qu’ils goûtent, et qui vient de la lumière que procure la sagesse qui gît dans ses paroles.


Hilarion Alfeyev, L’univers d’Isaac le Syrien, spiritualité orientale, N° 76, abbaye de Bellfontaine, 126.

lundi 22 septembre 2008

La spiritualité biblique

Les Pères de l’Eglise vivaient de la Bible, pensaient et parlaient par la Bible avec cette admirable pénétration qui va jusqu’à l’identification de leur être avec la substance biblique elle-même. Si on se met à leur école, on comprend immédiatement qu’il s’agit du fait intérieur de toute lecture biblique : la Parole lue ou écoutée conduit toujours à la Parole vivante, à la présence de la Personne du Verbe. Saint Ephrem conseille ; « Avant toute lecture, prie et supplie Dieu pour qu’il se révèle à toi ». « Lui que je cherche dans tes livres », disait St Augustin. La légitime aspiration à comprendre, à trouver des réponses, se soumet au plus grand, à l’unique nécessaire et se place dans la perspective sacramentelle de l’avènement : « On consomme eucharistiquement la parole mystérieusement rompue », Origène, en vue de la communion avec le Christ. Connaître, ce n’est pas voir de l’extérieur, mais assimiler, prendre, s’identifier, de sorte que Dieu assume, dans l’acte même de sa connaissance, la souffrance de l’homme.

L’Ēvangile selon St Luc 24,45 nous dit que Dieu « ouvre l’intelligence » de ses disciples en montrant comment il faut lire la Bible pour y découvrir « tout ce qui est écrit de moi » ; en commençant par Moïse et par tous les prophètes, il leur expliqua dans toutes les Ecritures ce qui le concernait. C’est ainsi que le Seigneur « ouvrait le sens des Ecritures », en révélant que la Bible est l’icône verbale du Christ .

C’est dans le Christ, au-dedans de son Corps, dans l’Eglise qu’il faut lire la Bible et écouter Dieu. C’est toujours l’Eglise qui lit la Bible dès que s’ouvrent ses pages. Même seul, on lit ensemble, liturgiquement.

Paul Evdokimov, La nouveauté de l’Esprit, étude de spiritualité, spiritualité orientale, N0 20, collection Bellefontaine, extrait p. 18.

jeudi 18 septembre 2008

Le Christ - Parole unique de l'Écriture Sainte

Dans la condescendance de sa bonté, Dieu, pour se révéler aux hommes, leur parle en paroles humaines : "En effet, les paroles de Dieu, exprimées en langues humaines, ont pris la ressemblance du langage humain, de même que le Verbe du Père éternel, ayant assumé l'infirmité de notre chair, est devenu semblable aux hommes", Dei Verbum 13.


A travers toutes les paroles de l'Écriture Sainte, Dieu ne dit qu'une seule Parole, son Verbe unique en qui Il se dit tout entier, cf. He 1, 1-3 :

Rappelez-vous que c'est une même Parole de Dieu qui s'étend dans toutes les Écritures, que c'est un même Verbe qui résonne dans la bouche de tous les écrivains sacrés, lui qui, étant au commencement Dieu auprès de Dieu, n'y a pas besoin de syllabes parce qu'il n'y est pas soumis au temps, St Augustin, Psal. 103, 4, 1 : PL 37, 1378.

Pour cette raison, l'Église a toujours vénéré les divines Écritures comme elle vénère aussi le Corps du Seigneur. Elle ne cesse de présenter aux fidèles le Pain de vie pris sur la Table de la Parole de Dieu et du Corps du Christ, cf. Dei Verbum 21.


Dans l'Écriture Sainte, l'Église trouve sans cesse sa nourriture et sa force, cf. Dei Verbum 24, car en elle, elle n'accueille pas seulement une parole humaine, mais ce qu'elle est réellement : la Parole de Dieu, cf. 1 Th 2, 13. "Dans les Saints livres, en effet, le Père qui est aux Cieux vient avec tendresse au-devant de ses fils et entre en conversation avec eux", Dei Verbum 21.

Toute l'Écriture divine n'est qu'un seul livre,
et ce seul livre c'est le Christ,
"car toute l'Écriture divine parle du Christ, et
toute l'Écriture divine s'accomplit dans le Christ "
Hugues de Saint Victor

lundi 15 septembre 2008

Lecture priante

Si le but immédiat d’une lecture spirituelle est d’acquérir des connaissances religieuses, son but final est d’alimenter l’oraison. Et plus le livre ouvre l’âme au contact de Dieu, soit par son contenu, soit grâce à l’ambiance de silence, de liberté de cœur et de gratuité dans laquelle se fait la lecture, plus celle-ci sera féconde.

Or du point de vue du contenu, la Bible est dans une situation privilégiée. Parole de Dieu, elle nous met immédiatement en contact avec lui ; si nous la lisons dans un esprit d’accueil, d’écoute et de docilité, l’Esprit de Dieu nous y remue et nous y blesse. La Bible ne s’occupe du reste que de Dieu, ou du monde vu dans sa relation vis-à-vis de Dieu, ou de l’homme pour lui apprendre comment servir Dieu ; la lecture de la Bible est donc bien une lectio divina, une lecture qui plonge en Dieu. Aussi le moine en fera-t-il ses délices, répétant et surtout vivant ces paroles de Jérémie, 15,16 : « Quand tes paroles se présentaient, je les dévorais ; ta parole était mon ravissement et l’allégresse de mon cœur ».

Présent dans l’Eucharistie, Dieu l’est aussi dans la Bible, autre pain de vie ; comme l’Eucharistie, la Bible provoque à l’amour et à la prière ; elle en sera l’aliment et le soutien, après en avoir été le point de départ.


« Du champ vient la joie de la moisson ; de la vigne les fruits qui nous nourrissent et de l’Ecriture la doctrine vivifiante »,
Isaac d’Antioche (+460-461).

Le champ donne la moisson une fois l’année ; la vigne ne fournit qu’une vendange par an, tandis que la doctrine salutaire jaillit de l’Ecriture aussi souvent qu’on la lit. Le champ une fois moissonné, arrête et se repose ; de même la vigne, une fois la vendange faite, n’a plus d’utilité ; la Sainte Ecriture, au contraire, même si on la moissonne journellement, donne toujours des épis à ceux qui la scrutent. Allons donc à ce champ jouir de ses sillons et cueillir ses épis vivifiants.


Dom Louis Leloir, o.s.b., moine de Clervaux, Désert et communion, témoignage des Pères du Désert recueillis à partir des Paterica arméniens, spiritualité orientale, N° 26, collection Bellefontaire, extrait 272-275.

mercredi 10 septembre 2008

DIEU PARLE ENCORE, St Grégoire le Grand


Est-il bien tout à fait vrai cependant que Dieu nous a tout dit dans l’Ecriture ? Dieu est vivant. «Dieu parle tantôt par l’Ecriture, tantôt par une inspiration secrète». Grégoire n’enferme pas la Parole de Dieu dans une théorie. Dieu a tout dit dans l’Ecriture mais il ne s’y est pas enfermé. «Dieu parle par une révélation secrète quand il révèle par son Esprit à l’esprit élu ce qu’il faut faire ou enseigner”. Toutefois la norme de toute révélation secrète, c’est l’Ecriture. «Quand donc Samuel entendit le Seigneur l’appeler, il s’empressa vers Héli, parce que l’ordre élu des prédicateurs de la sainte Eglise confronte ce qu’il a appris par une révélation de Dieu à ce qui se trouve dans l’Ecriture sainte. La règle d’une juste intelligence se trouve exprimée dans les livres de la sainte Ecriture, parce que les conseils divins y sont exposés par nos vénérables Pères qui ont eu l’Esprit. Saint Samuel accourt donc vers Héli aussi souvent qu’il est appelé par le Seigneur parce que l’ordre des prédicateurs consulte les dits des anciens Pères au sujet de tout ce qu’il apprend par révélation spirituelle avant de croire que cette révélation vient bien du Seigneur en reconnaissant que cela ne diffère pas de ce qu’il lit dans l’Ecriture sainte. On tombe facilement dans l’erreur si on ne sait pas confronter à l’éminente vérité de l’Ecriture sainte ce qu’on a recueilli dans une contemplation secrète”. Dieu continue à se révéler aux hommes. Il existe une parole cachée, Job 4,12, parce qu’elle se fait entendre à l’intime de l’âme, c’est une parole de l’Esprit-Saint qu’on perçoit par le cœur et qui entraîne à désirer les biens invisibles ; c’est une parole sans bruit de voix ; elle élève l’esprit parce que la parole de l’Esprit se fait entendre silencieusement â l’oreille du cœur. Dieu est plus grand que son Ecriture et il n’est pas limité par elle, mais l'Ecriture demeure la norme de toute révélation secrète.

Ni la connaissance de l’Ecriture ni aucune révélation n’est chose que l’on s’arroge soi-même. Toute parole est don libre L’Esprit de prophétie n’est pas toujours présent aux prophètes, il n’est pas toujours à leur disposition, afin qu’au temps où ils ne l’ont pas, ils reconnaissent que c'est par don qu’ils l’ont quand l’Esprit vient à eux. Aussi quand Elisée interdit à son serviteur Giézi de repousser la Sunamite qui pleurait à ses pieds, il lui dit “Laisse-la, son âme est dans l’amertume; le Seigneur me l’a caché, il ne me l’a pas fait savoir”, 2 Rois 4,27. De même quand Josaphat l’interrogea sur l’avenir, alors que l’Esprit de prophétie ne lui était pas présent, il fit venir un joueur de lyre pour que l’Esprit de prophétie descende sur lui par la louange de la psalmodie, 2 Rois 3,11-15. L’inspiration de l’Esprit est libre don de Dieu ; elle n’est pas continue, pour que l’homme éprouve la vérité de l’inspiration en comparant les temps où il l’a et ceux où il ne l’a pas.
Patrick Catry, o.s.b., Moine de Wisques, Parole de Dieu, Amour et Esprit-Saint chez St Grégoire le Grand, 17.

mercredi 3 septembre 2008

DANS L'ECRITURE DIEU NOUS A TOUT DIT


Le pape saint Grégoire le Grand vécut de 540 à 604. Il est docteur de l'Eglise, sa fête a lieu le 3 septembre.
Né à Rome dans une famille patricienne, il devint préfet de la ville. En 575, ayant renoncé à ses charges et à sa fortune, il devint moine et se retira dans un monastère qu'il fonda et établit sous la règle bénédictine. Après une ambassade à Byzance pour le compte du pape Gélase II, il fut élu pape et eût à organiser la défense et l'organisation de Rome lors de l'invasion des lombards ainsi qu'à négocier avec eux, pour éviter un plus grand malheur à la ville. Ce fut lui qui envoya saint Augustin de Cantorbéry en Grande-Bretagne pour évangéliser ce pays. Il tourna l'Eglise vers les jeunes nations barbares qui s'étaient implantées dans les ruines de l'ancien empire Romain d'Occident. On doit à saint Grégoire de nombreuses lettres, homélies, dialogues et traités de pastorale. Il est à l'origine d'une réforme liturgique et le chant dit "grégorien" porte son nom.
Dans l’Ecriture qui contient sa Parole, Dieu nous a tout dit. Dieu a parlé une fois et cela suffit, il n’y a plus d’autre révélation à attendre. C’est ce qu’explique Eliu à son ami Job «Tu protestes contre Dieu parce qu’il ne répond pas à chacune de tes questions. Dieu parlera une fois et ne répétera pas deux fois la même chose...”. C’est comme s’il disait : Dieu ne répond pas au cœur de chacun par des révélations privées, car il a préparé une parole qui puisse satisfaire aux questions de tous. Dans la parole de son Ecriture en effet, si nous cherchons bien, nous trouvons réponse à chacun de nos besoins ; il n’est pas nécessaire que la voix de Dieu réponde en particulier à ce que chacun doit supporter. Dans l’Ecriture, il nous est répondu à tous d’une manière générale ; là en effet, la vie des prédécesseurs sert de modèle aux successeurs. Pour prendre un seul exemple, si nous sommes affligés d’une souffrance quelconque ou d’une maladie corporelle, peut-être désirons-nous connaître les causes cachées de cette souffrance ou de cette maladie pour trouver soulagement par la connaissance des maux dont nous souffrons. Mais parce qu’à chacune de nos tentations, il ne nous est pas répondu en particulier, nous recourons à l’Ecriture sainte. Nous y trouvons que Paul, tenté par l’infirmité de sa chair, entendit cette réponse : “Ma grâce te suffit, car ma puissance se déploie dans la faiblesse”, 2 Cor 12,9. Et cela lui fut dit dans sa propre faiblesse pour que cela ne nous soit pas dit à chacun d’entre nous individuellement. Dans l’Ecriture sainte, nous entendons la voix de Dieu qui s'adresse à Paul dans l’affliction afin que nous ne cherchions pas à l’entendre chacun pour notre propre compte en une consolation privée quand il nous arrive aussi d’être dans l’affliction. Le Seigneur ne nous répond donc pas à chacune de nos questions parce qu’il parlera une fois et qu’il ne répétera pas deux fois la même chose par ce qu’il a déclaré à nos Pères dans l’Ecriture, il a voulu aussi nous instruire ; Dieu ne répond plus aux pensées ou aux tentations de chacun par les voix des prophètes ou par l’office des anges parce qu’il a enfermé dans l’Ecriture sainte tout ce qui peut arriver à chacun, et qu’il a pris soin de donner pour modèle aux successeurs les exemples des prédécesseurs. Admirable leçon sur l’aujourd’hui de la Parole de Dieu.

Patrick Catry, o.s.b., Moine de Wisques, Parole de Dieu, Amour et Esprit-Saint chez St Grégoire le Grand, 16.

dimanche 31 août 2008

La Parole de Dieu engendre la vie

André Louf, né en 1929, cistercien trappiste, a été père abbé de l'Abbaye du Mont des Cats durant près de 36 ans. Il est l'une des grandes figures spirituelles de notre temps, aujourd'hui retiré ermitage, mais toujours attentif à la rumeur du monde. Plus que toute parole, toute poésie humaine, la Parole de Dieu est insondable et inépuisable.







"Appuie-toi sur la Parole de Dieu
pour devenir fidèle"







"Celui qui tente de la saisir ne peut que la réduire à ce qu’il est capable d’en percevoir.

Car la Parole de Dieu s’élève au-dessus de tout ce que l’homme peut en saisir dans l’aujourd’hui. Elle a sa vie propre et son histoire.

Toute Parole de Dieu ne pourra être mesurée qu’à la plénitude des temps. Elle ne cesse jamais d’accompagner l’Amour de Dieu pour le monde et de l’accomplir toujours à nouveau.

C’est pourquoi la signification de la Parole de Dieu ne peut être établie une fois pour toutes.

Cette Parole est pleine de vie et elle engendre la vie en celui qui l’écoute. Dans sa Parole, Dieu est constamment en train de créer.

En chaque liturgie, Il construit Son Eglise convoquée autour de la Parole.

En chaque croyant qui Lui ouvre son cœur et son esprit, Il creuse un abîme insoupçonné de connaissance et d’amour".

Père André Louf

mercredi 27 août 2008

La contemplation (extase) d’Ostie


Mercredi 27 août Sainte Monique

Mère de Saint Augustin, dont elle obtint la conversion par son affection discrète et sa prière contemplative. Elle mourut à Ostie en 387


Jeudi 28 août 2008 Saint Augustin

Après avoir mené une vie frivole, Augustin entreprit une longue quête de Dieu. Devenu évêque d'Hyppone, en Afrique du Nord, il fut un pasteur incomparable et un écrivain à la foi pénétrante. Il mourut en 430.


Si en quelqu'un faisait silence le tumulte de la chair,
silence les images de la terre et des eaux et de l'air,
silence même les cieux, et si l'âme aussi en soi faisait silence
et se dépassait ne pensant plus à soi,
silence les songes et les visions de l'imagination ;

si toute langue et tout signe
et tout ce qui passe en se produisant
faisaient silence en quelqu'un absolument
- car, si on peut les entendre, toutes ces choses dise :
“Ce n'est pas nous qui nous sommes faites
mais celui-là qui nous a faites demeure à jamais”.

cela dit, si désormais elles se taisaient
puisqu'elles nous ont dressé l’oreille
vers celui qui les a faites,
et s'il parlait lui-même, seul,
non par elles mais par lui-même,

et qu’il nous fît entendre son verbe
non par langue de chair, ni par voix d'ange,
ni par fracas de nuée, ni par énigme de parabole,
mais que lui-même, que nous aimons en elles,
lui-même se fit entendre à. nous sans elles,

- comme l'instant nous avons tendu nos êtres
et d'une pensée rapide nous avons atteint
l'éternelle sagesse qui demeure, au-dessus de tout -
si cela se prolongeait et que se fussent retirées
les autres visions d'un ordre bien inférieur,
et que celle-là seule ravît et absorbât et plongeât
dans les joies intérieures celui qui la contemple,
et que la vie éternelle fût telle qu'a été cet instant d'intelligence
après lequel nous avons soupiré...

N'est-ce pas cela que signifie :
“Entre dans la joie de ton Seigneur” ?
Et pour quand cette joie ? N'est-ce pas pour le jour
où nous ressusciterons tous sans être tous changés ?
Confessions 9,10.

lundi 25 août 2008

Le miroir de la Parole


La Lectio est toujours une lecture éminemment personnelle, en ce sens qu’elle implique un élément en quelque sorte subjectif : l’effort que chacun consent pour adapter à son cas ce que rapporte la Bible.

«Toutes ces choses qui sont ici écrites et mêlées, enseigne St Augustin – repris par Saint Grégoire – c’est le miroir de vous-même», Augustin, En. In Ps 33,III,1.

Le lecteur est invité à examiner s’il est conforme à ce que l’Ecriture présente à ses yeux ; et s’il ne l’est pas, il portera tous ses efforts à le devenir. La Parole de Dieu se révèle ici acte qui me dévoile, mais aussi qui fait émerger en vérité ma liberté singulière. «La découverte que réalise celui qui est assidu à la Lectio Divina, précise Enzo Bianchi, est celle d’être lu par la page biblique bien mieux, plus profondément et plus complètement, que lui-même ne lit la page biblique», Enzo Bianchi, « Les difficultés de la lectio divina », Revue La vie spirituelle, décembre 2001, 81ème année, N° 741, tome 155, p. 595-604. Au cœur du message universel, le Maître intérieur nous adresse un message personnel et unique qu’il revient à chacun d’individualiser, d’intérioriser.

«Sachez être contents de ce que pouvez comprendre, disait le Staretz Macaire, et tâchez de le mettre à l’œuvre ; alors ce qui demeurait caché se révélera à votre esprit».
La Parole n’est pas d’abord destinée à nous informer sur Dieu ; elle veut avant tout, nous transformer selon la forme du Christ. «Lire, écrit Nicole Fabre, ce n’est pas d’abord vouloir comprendre, mais consentir à être transformé, engendré par la Parole de Celui qui se révèle. Dire cela, c’est aussi dire que la vérité de cette parole n’est ni dans la lettre, ni dans l’expérience que nous en faisons, mais reste à jamais dans la personne même du Fils».

Toute vie ainsi renouvelée appelle à une action conforme, c’est-à-dire une conversion de l’agir :
«Une vie bonne, conduite à partir des commandements de Dieu, dit encore Augustin, est comme un stylet écrivant dans le cœur ce qu’on entend. Si l’on écrivait dans la cire cela s’effacerait facilement : écrivez-le dans vos cœurs, par votre manière de vivre, et jamais cela ne s’effacera», Augustin, En. In Ps 93,30.

Joseph-Marie Verlinde, Initiation à la Lectio Divina, Parole et silence, 198-199.

vendredi 22 août 2008

La lectio est une lecture de Dieu

« La Parole vit en nous, elle s’enrichit de résonances et d’harmoniques provenant des autres passages déjà mémorisés, et dans cette communion qui s’établit entre elle et nous, la symphonie divine de la Parole alimente notre propre substance de la substance même du texte : « C'est que, comme descend la pluie ou la neige, du haut des cieux, et comme elle ne retourne pas là-haut sans avoir saturé la terre, sans l'avoir fait enfanter et bourgeonner, sans avoir donné semence au semeur et nourriture à celui qui mange, ainsi se comporte ma parole du moment qu'elle sort de ma bouche: elle ne retourne pas vers moi sans résultat, sans avoir exécuté ce qui me plaît et fait aboutir ce pour quoi je l'avais envoyée », Isaïe 55,10-11.

L’homme devient semblable à ce qu’il regarde, devient ce qu’il contemple ou ce qu’il fréquente. La lectio est une lecture de Dieu avec des yeux d’épouse et un cœur d’Eglise ; une lecture transformante qui nous évangélise et nous convertit. C’est dans la mesure où l’âme s’occupe des choses spirituelles que ses préoccupations deviennent spirituelles et divines. Voilà pourquoi la pratique de la lectio divina devrait tenir une si large place dans la vie du chrétien » : « Ces paroles que je vous dis, mettez-les dans votre cœur et dans votre âme, attachez-les à votre main comme un signe, à votre front comme un bandeau », Dt 11,18.

Joseph-Marie Verlinde, Initiation à la Lectio Divina, Parole et silence, 2002,202.

jeudi 7 août 2008

La Parole de Dieu, source inépuisable

La Parole de Dieu est un arbre de vie

« Vous scrutez les Ecritures…; or ce sont elles qui me rendent témoignage », Jn 5,39.

“Qui donc est capable de comprendre toute la richesse d'une seule de tes paroles Seigneur ?
Ce que nous en comprenons est bien moindre que ce que nous en laissons, comme des gens assoiffés qui boivent à la source.
Les perspectives de ta Parole sont nombreuses, comme sont nombreuses les orientations de ceux qui l’étudient.

Le Seigneur a coloré sa Parole de multiples beautés, pour que chacun de ceux qui la scrutent puissent contempler ce qu'il aime.
Dans sa Parole, il a caché tous les trésors pour que chacun de nous trouve une richesse dans ce qu'il médite.

La Parole de Dieu est un arbre de vie, qui de tous côtés, te présente des fruits bénis ; elle est comme ce rocher qui s'est ouvert dans le désert pour offrir à tous les hommes une boisson spirituelle, 1 Co 10,3 ; Ex, 17,1s.

Celui qui obtient en partage une de ces richesses ne doit pas croire qu'il y a seulement dans la Parole de Dieu ce qu'il y trouve. Il doit comprendre, au contraire, qu'il a été capable d'y découvrir une seule chose parmi bien d'autres. Enrichi par sa Parole, il ne doit pas croire que celle-ci est appauvrie : incapable de l'épuiser, qu'il rende grâce pour sa richesse.

Réjouis-toi parce que tu es rassasié, mais ne t'attriste pas de ce qui te dépasse. Celui qui a soif se réjouit de boire, mais il ne s'attriste pas de ne pouvoir épuiser la source.
Que la source apaise ta soif, sans que ta soif épuise la source.
Rends grâce pour ce que tu as reçu et ne regrette pas ce qui demeure inutilisé. Ce que tu as pris et emporté est ta part: mais ce qui reste est aussi ton héritage. Ce que tu n'as pas pu recevoir aussitôt à cause de ta faiblesse, tu le recevras une autre fois, si tu persévères.
N'aies donc pas la mauvaise pensée de vouloir prendre d'un seul trait ce qui ne peut être pris en une seule fois, et ne renonce pas par négligence à ce que tu es capable d'absorber peu à peu”.

Saint Ephrem, 4ème siècle

jeudi 31 juillet 2008

Préparez les voies du Seigneur, Guerric d'Igny 1080-1157

L'abbaye cistercienne de Notre-Dame d'Igny, au diocèse de Reims, possède les reliques du Bienheureux Guerric, qui fut le second abbé de ce monastère fondé pour des moines par saint Bernard en 1128.

Qui était-il? Né à Tournai vers 1080 Guerric, avant d'être cistercien, fut assez longtemps "enseignant" à l'école cathédrale de sa ville. Il était devenu écolâtre, selon le vocabulaire de l’époque, dans cette école où lui-même avait été formé. S'il n'était pas "exégète" au sens où nous l'entendons aujourd'hui, il avait une connaissance approfondie de l'Ecriture Sainte. Il menait une vie retirée dans une maison proche de l'église, dont il ne sortait que pour aller retrouver ses élèves. Cependant vers 1125, ayant entendu parler du jeune abbé de Clairvaux, Bernard, il alla lui rendre visite. Et c'est ainsi que, sur le conseil de celui-ci, il entra au noviciat et devint son disciple âgé de plus de quarante ans. Nous ne savons pas grand chose de sa vie à Clairvaux. Par des bribes de lettres de saint Bernard et par quelques récits plus ou moins légendaires provenant de ses contemporains, nous savons qu'il fut un moine exemplaire, d'une grande pureté de vie et d'une grande humilité. Il demeura à Clairvaux jusqu'en 1138, date à laquelle il fut élu abbé d'Igny. Il atteignait alors la soixantaine. Sa mauvaise santé l'empêchait souvent de suivre la vie commune, ce dont il se plaignait auprès de ses frères. Cela n'empêcha pas l’abbaye de prospérer sous son gouvernement et de faire une seconde fondation en 1148, la première ayant eu lieu au temps de son prédécesseur. Surtout Guerric enseignait ses moines. Nous avons encore de lui 54 sermons pour l'année liturgique qui nous permettent de connaître sa riche et profonde spiritualité. Nous en relèverons deux traits dominants. D'abord elle tend à reproduire dans les âmes la vie de Jésus; le Christ en croix est le modèle de notre vie crucifiée et sa résurrection est cause et modèle de la nôtre. Puis nous avons à partager avec Marie sa maternité par rapport au Christ; elle désire former en nous son Fils unique et nous donner ainsi naissance jour après jour.La parole que Guerric adressait à ses moines est encore valable pour nous. Nous pouvons lui demander de nous en instruire et de nous aider à la faire passer dans nos vies. Guerric est mort au milieu de ses frères le 19 août 1157 après dix-neuf ans d'abbatiat. En 1889 la Sacrée Congrégation des Rites a concédé au monastère d'Igny et à tout le diocèse de Reims l'autorisation de célébrer l'office liturgique du Bienheureux Guerric.


"Préparez le chemin du Seigneur. Le chemin du Seigneur, frères, qu'il nous est demandé de préparer se prépare en marchant. On y marche dans la mesure où on le prépare. Même si vous vous êtes beaucoup avancés sur ce chemin, il vous reste toujours à le préparer, afin que, du point où vous êtes parvenus, vous soyez toujours tendus au-delà. Voilà comment, à chaque pas que vous faites, le Seigneur à qui vous préparez les voies vient au-devant de vous, toujours nouveau, toujours plus grand. Aussi est-ce avec raison que le juste prie ainsi : Enseigne-moi le chemin de tes volontés et je le chercherai toujours. On donne à ce chemin le nom de vie éternelle, peut-être parce que bien que la providence ait examiné le chemin de chacun et lui ait fixé un terme jusqu'où il puisse aller, cependant la bonté de celui vers lequel vous vous avancez n'a pas de terme."

Guerric d'Igny : Sermon V pour l'Avent, in Lectionnaire pour les dimanches et fêtes de Jean-René Bouchet, Cerf, 1994, pp. 36-37.

mercredi 30 juillet 2008

Les trois critères de lecture de la Bible, selon Vatican II

Le Concile Vatican II indique trois critères pour une interprétation de l’Écriture conforme à l’Esprit qui l’a inspirée (cf. Dei Verbum 12, § 3). Le Catéchisme de l'Eglise catholique donne ces trois critères dans ses articles 112 à 114 :

112 1. Porter une grande attention " au contenu et à l’unité de toute l’Écriture ":
En effet, aussi différents que soient les livres qui la composent, l’Écriture est une en raison de l’unité du dessein de Dieu, dont le Christ Jésus est le centre et le cœur, ouvert depuis sa Pâque, (cf. Lc 24, 25-27. 44-46).
Le cœur (cf. Ps 22, 15) du Christ désigne la Sainte Écriture qui fait connaître le cœur du Christ. Ce cœur était fermé avant la Passion car l’Écriture était obscure. Mais l’Écriture a été ouverte après la Passion, car ceux qui désormais en ont l’intelligence considèrent et discernent de quelle manière les prophéties doivent être interprétées (cf. S. Thomas d’A., Psal. 21, 11).

113 2. Lire ensuite l’Écriture dans " la Tradition vivante de toute l’Église ":
Selon un adage des Pères, la Sainte Écriture se lit bien plus dans le cœur de l’Église que dans les moyens matériels de son expression. En effet, l’Église porte dans sa Tradition la mémoire vivante de la Parole de Dieu, et c’est l’Esprit Saint qui lui donne l’interprétation spirituelle de l’Écriture (" ... selon le sens spirituel dont l’Esprit gratifie l’Église " : Origène, hom. in Lev. 5, 5).

114 3. Être attentif " à l’analogie de la foi " (cf. Rm 12, 6) :
Par " analogie de la foi " nous entendons la cohésion des vérités de la foi entre elles et dans le projet total de la Révélation.

dimanche 27 juillet 2008

Le printemps de l'âme, Isaac le Syrien

Le froid de l’hiver cesse soudain et aussi inopinément qu’il a débuté ; à sa suite, c’est le printemps de l’âme qui éclôt :

Dieu permet que froidure et lourdeur surviennent à quelqu’un pour l'exercer et le mettre à l'épreuve, mais si celui-ci s'excite avec zèle et se force un peu pour rejeter ces sentiments, la grâce viendra sans tarder auprès de lui, telle qu'elle y était jadis, et une force différente viendra sur lui, qui porte cachée en elle tous les biens et des secours de toutes sortes. Il s'émerveillera d'une grande stupeur, en se rappelant la lourdeur d’avant et la légèreté et la force qui en ont maintenant triomphé. Il verra la différence avec son état présent, et comment un changement aussi important a pu se produire en lui aussi inopinément. Dès lors, il sera devenu sage, et si une telle lourdeur devait à nouveau s'emparer de lui, il la reconnaîtra à partir de l'expérience précédente.

Isaac décrit ensuite l'illumination spirituelle et l'exultation qui fait suite à cette période de ténèbres, à l'aide d'un vocabulaire haut en couleurs :

Il y a des moments où l'on est assis dans la quiétude... sans savoir par où entrer ou par où sortir. Mais après avoir longuement fréquenté l'Écriture, après avoir continuellement supplié et rendu grâces pour son état de faiblesse, et avoir fixé sans cesse son regard sur la grâce de Dieu, il arrive, qu'à partir de cette grande détresse vécue dans la quiétude, le coeur peu à peu s'élargit, que quelque chose se met à y germer qui fait naître une joie qui vient de l'intérieur, même si cette joie ne vient pas de la personne en question par un début d'activité de sa pensée. Elle se rend compte de ce que son coeur est dans la joie, mais elle ne sait pas pourquoi. Car une certaine exultation occupe maintenant son âme, dont l'allégresse donne de mépriser tout ce qui existe et tout le visible. À travers la force de cette allégresse, l'esprit voit où se trouve le fondement du ravissement de sa pensée, mais il ne saisit pas pourquoi cela lui arrive. Cette personne voit que son esprit est élevé au-dessus de tout contact avec les choses, et que, dans cette exaltation, il se trouve au-delà du monde..., mais elle ne discerne aucune extension de l'intellect lorsque son coeur danse de la sorte, ou que l’esprit est attiré hors de lui-même et qu’il ainsi provoqué.

Hilarion Alfeyev, L’univers spirituel d’Isaac Le Syrien, Spiritualité orientale, N° 76, Abbaye de Bellefontaine, 129.

mardi 15 juillet 2008

La lectio, expérience de dialogue avec Dieu, Isaac le Syrien, 7ème siècle

Isaac parle souvent de la lecture ou lectio et il nous en donne des descriptions. Ce terme vise d’abord la lecture de l’Ecriture, mais non pas exclusivement. Pour Isaac, comme pour toute la tradition monastique ancienne, cette lecture ne consiste pas tellement dans une étude du texte biblique dans un but intellectuel, mais plutôt dans un dialogue avec elle, une rencontre, une révélation reçue d’elle : le texte de la Bible est un moyen de faire l’expérience directe de dialogue avec Dieu, de le rencontrer mystiquement, de recueillir des intuitions sur la réalité profonde.
Isaac parle de la lecture de l’Ecriture comme du moyen le plus important de la transformation spirituelle.
Isaac donne quelques conseils sur la façon de lire l’Ecriture. La première «Persévère dans la lecture, pendant que tu demeures dans la quiétude, afin que ton intellect soit en tout temps attiré vers l’étonnement et la stupeur… » « Que ta lecture se fasse dans une quiétude que rien ne vient troubler ». La deuxième condition est le recueillement de l’esprit et l’absence de pensées venant de l’extérieur : « Sois libre de toute préoccupation concernant le corps et le tracas des affaires, afin que, par la douce compréhension du sens des Ecritures, qui surpasse tout sentiment, tu puisses en goûter la très douce saveur en ton âme… ». La troisième condition est de prier avant de commencer : « N’approche pas des paroles des mystères contenus dans les divines Ecritures, sans prier et sans supplier Dieu de t’aider, mais dis : « Seigneur, accorde-moi de ressentir la force qu’elles contiennent ! Tiens la prière pour la clé d’une vraie compréhension de la divine Ecriture ».
Lorsqu’un moine lit l’Ecriture, essayant de percevoir son contenu caché, sa compréhension s’accroît au fur à mesure de sa lecture, et le conduit par degrés à l’état de stupeur spirituelle.
Aux yeux d’Isaac, ce n’est pas le texte lu qui est tellement important, mais bien plutôt les intuitions spirituelles et mystiques que l’on peut recevoir à travers la lecture.
Lorsque la lecture est un moyen de fréquenter Dieu, elle conduit là où cesse l’activité humaine de l’esprit, quand celui-ci entre directement en contact avec Dieu.

Extrait, Hilarion Alfeyev, l’univers spirituel d’isaac le Syrien, spiritualité orientale, N° 76, abbaye de Bellefontaine. 207.

vendredi 11 juillet 2008

La Parole de Dieu est une semence, Gilbert de Hoyland vers 1110-1172

GILBERT DE HOYLAND (vers 1110-1172)

De nationalité anglaise, Gilbert fut abbé de Swineshead, abbaye bénédictine qui passa à l'Ordre de Cîteaux en 1147. Sa communauté est nombreuse, et Gilbert s'occupe également des moniales du voisinage. Il meurt en 1172 au monastère de Larivoir, près de Troyes (Aube).

Gilbert nous a laissé quelque traités, lettres et sermons, mais son oeuvre principale fut de poursuivre le "Commentaire du Cantique des Cantiques" que Bernard avait laissé inachevé en 1153. Aux 86 sermons de Bernard, il en ajouta 48 autres. Il laisse aussi 7 opuscules sur la prière, un bref sermon et 4 lettres.
Disciple fervent de Bernard, Gilbert en est un continuateur habile ; par son insistance sur l'amour, il reste bien dans le sillage de l'abbé de Clairvaux : il s'émerveille devant l'amour de Dieu qui est toujours premier et qui appelle notre réponse. À nous de nous laisser conformer au Christ progressivement. Pour lui, comme pour Bernard, l'expérience de la vie monastique doit conduire à l'expérience de Dieu ; elle est un moyen privilégié de connaissance immédiate de Dieu.

http://www.citeaux-abbaye.com

La Parole de Dieu est une semence

La parole s’envole
et rien ne peut la rappeler si l’Ecriture ne la fixe pas.
L’Ecriture la rend visible et durable ;
quand vous le voudrez, vous demanderez à la page,
le dépôt qui lui a été confié.

Le livre est un bon dépositaire,
il rend en entier tout ce qu’on lui a donné.
Lorsque cela vous plaira, vous le prendrez,
vous lirez où vous voudrez,
vous vous y arrêterez tout le temps qu’il vous plaira.

L’Ecriture répare la mémoire
et rétablit les souvenirs en représentant la Parole.
Vous lui confiez en toute assurance les remèdes de la Parole,
elle les conserve sans altération.
Si la Parole a la force de guérir lorsqu’elle est prononcée,
pourquoi ne l’aurait-elle point lorsqu’on la lit ?

Gilbert de Hoyland,
Sermon du Cantique des Cantiques, commenté par Saint Bernard, XLII,2.

samedi 5 juillet 2008

Commencer l’été avec les conseils de Lectio divina, Guillaume de Saint Thierry



À des heures déterminées, il faut vaquer à une lecture déterminée. Une lecture de rencontre, sans suite, trouvaille de hasard, bien loin d’édifier l’âme, la jette dans l’inconstance. Accueillie à la légère, elle disparaît de la mémoire plus légèrement encore. Au contraire, il faut s’attarder dans l’intimité de maîtres choisis et l’âme doit se familiariser avec eux. Les Écritures, en particulier, demandent à être lues et pareillement comprises, dans l’esprit qui les a dictées. Tu n’entreras jamais dans la pensée de Paul si, par l’attention suivie à le lire et l’application assidue à le méditer, tu ne t’imprègnes au préalable de son esprit. Jamais tu ne comprendras David, si ta propre expérience ne te revêt des sentiments exprimés par les psaumes. Ainsi des autres auteurs. Au reste, quel que soit le livre, l’étude et la lecture diffèrent autant l’une de l’autre que l’amitié de l’hospitalité, l’affection confraternelle d’un salut occasionnel. Il faut aussi chaque jour détacher quelque bouchée de la lecture quotidienne et la confier à l’estomac de la mémoire : un passage que l’on digère mieux et, qui, rappelé à la bouche, fera l’objet d’une fréquente rumination ; une pensée plus en rapport avec notre genre de vie, capable de soutenir l’attention, d’enchaîner l’âme et de la rendre insensible aux pensées étrangères. De la lecture suivie, il faut tirer d’affectueux élans, former une prière qui interrompe la lecture. Pareilles interruptions gênent moins l’âme qu’elles ne la ramènent aussitôt plus lucide à la compréhension du texte. La lecture est au service de l’intention. Si vraiment le lecteur cherche Dieu dans sa lecture, tout ce qu’il lit travaille avec lui et pour lui dans ce but et sa pensée rend captive ou asservit l’intelligence du texte en hommage au Christ. Mais s’il s’écarte de cette fin, son intention entraîne tout après elle. Il ne trouve alors rien de si saint, de si pieux dans les Écritures, qu’il n’arrive, par vaine gloire, perversion de sentiment ou dépravation d’esprit, à faire servir à sa malice et à sa vanité. C’est que la crainte du Seigneur doit être au principe de toute lecture des Ecritures : en elle s’affermit d’abord l’intention du lecteur ; de son sein jaillissent ensuite, harmonisés, l’intelligence et le sens du texte.
Lettre aux frères du Mont-Dieu, SC n° 223, p. 239-241.

mardi 10 juin 2008

Révélation de Dieu et Ecriture Sainte

L'Eglise en son Magistère a toujours enseigné que l'Ecriture Sainte (Ancien et Nouveau Testaments) était une Ecriture sacrée, c'est-à-dire inspirée à ses auteurs, par Dieu Lui-même en son Esprit Saint. Ainsi, pour l'Eglise, tous les textes de la Première Alliance sont une préparation, à travers autant d'auteurs inspirés, de la Révélation évangélique par le Christ lui-même dans la Nouvelle Alliance.

Pour les Pères de l'Eglise, la Bible est le Christ, car chacune de ses paroles nous met en sa présence :

"Que le soleil levant te trouve la Bible à la main". Cette exclamation d’Evagre exprime bien la tradition patristique… Les Pères de l’Eglise vivaient la Bible, pensaient et parlaient par la Bible, avec cette admirable pénétration qui va jusqu’à l’identification de leur être avec la substance biblique elle-même. Si on se met à leur école, on comprend rapidement que la Parole lue et entendue conduit toujours à la Personne vivante du Verbe. Saint Jean Chrysostome prie ainsi devant le livre Saint : "Seigneur Jésus Christ, ouvre les yeux de mon cœur afin de comprendre et d’accomplir ta volonté… illumine mes yeux par ta lumière". De même Saint Ephrem conseille : "Avant toute lecture, prie et supplie Dieu pour qu’il se révèle à toi". On pourrait dire que pour les Pères, la Bible est le Christ, car chacune de ses paroles nous met en sa présence :
«Lui, que je cherche dans les livres», confesse Saint Augustin...

Selon le Catéchisme de l'Eglise Catholique, l’Église a toujours vénéré les divines Écritures comme elle vénère aussi le Corps du Seigneur

Quant au catéchisme de l'Eglise catholique, voici comment il introduit l'article consacré à la Sainte Ecriture :
- 102 "A travers toutes les paroles de l’Écriture Sainte, Dieu ne dit qu’une seule Parole, son Verbe unique en qui Il se dit tout entier" (cf. Heb 1, 1-3) : "Rappelez-vous que c’est une même Parole de Dieu qui s’étend dans toutes les Écritures, que c’est un même Verbe qui résonne dans la bouche de tous les écrivains sacrés, lui qui, étant au commencement Dieu auprès de Dieu, n’y a pas besoin de syllabes parce qu’il n’y est pas soumis au temps" (St. Augustin, Psal. 103, 4, 1 : PL 37, 1378).
- 103 Pour cette raison, l’Église a toujours vénéré les divines Écritures comme elle vénère aussi le Corps du Seigneur. Elle ne cesse de présenter aux fidèles le Pain de vie pris sur la Table de la Parole de Dieu et du Corps du Christ (cf. Dei Verbum 21)."

mis en ligne 10 juin 2008

mercredi 21 mai 2008

Si tu aspires à prier; Evagre le Pontique

Evagre le Pontique
Vitrail de Paris

La prière est un rejeton
de la douceur
et de l'absence
de la colère.

Évagre (345-399) naquit à Iborna, dans la région du Pont (actuelle Turquie), d'où son surnom de Ponticus, Pontique. Ordonné diacre par Grégoire de Naziance, il l'accompagne à Constantinople, à partir de 380.Puis il s'embarque pour Jérusalem, où il est accueilli dans le monastère fondé par Mélanie (l'Ancienne) et Rufin, au Mont des Oliviers. Ensuite il se retira en Egypte, où il devint le disciple de Macaire d'Alexandrie. Il gagnait sa vie en copiant des manuscrits.

Si tu aspires à prier, renonce à tout pour obtenir le tout.
Que tu pries avec des frères ou seul, tâche de prier non par habitude, mais avec sentiment.
Qui aime Dieu, converse toujours avec lui comme avec un père, se dépouillant de toute pensée passionnée.
Si tu veux prier, tu as besoin de Dieu qui donne la prière à celui qui prie. Invoque-te donc en disant : «Que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne, c'est-à-dire «que ton Esprit soit reconnu comme saint et que vienne ton Fils unique», car c'est ce qu'il a enseigné quand il a dit d'adorer le Père en “esprit et en vérité» Jn 4,23. Celui qui prie en esprit et en vérité ne glorifie plus le Créateur à partir des créatures, mais c'est de Dieu même qu'il loue Dieu.



Le Saint Esprit, compatissant à notre faiblesse, nous visite même si nous ne sommes pas encore purifiés. Pourvu seulement qu'il trouve notre intelligence priant avec sincérité, il survient alors en elle, il dissipe toute la phalange des raisonnements et des pensées qui l'assiègent, et il l'amène à l'amour de la prière spirituelle.
Si tu es théologien, tu prieras vraiment, et si tu pries vraiment, tu es théologien.
Si tu aspires à prier, ne fais rien de tout ce qui est incompatible avec la prière, afin que Dieu s'approche et fasse route avec toi.
Ne te représente pas une figure de Dieu, quand tu pries, ni ne laisse ton intelligence subir l’impression d'aucune forme ; mais va à l’immatériel, et tu comprendras.
Si tu t'appliques à la prière, prépare-toi aux assauts des démons et supporte vaillamment leurs coups. Efforce-toi d'acquérir beaucoup d'humilité et de courage, et les insultes des démons ne toucheront pas ton âme. Nul fléau n'approchera de ta tente, parce qu'il donnera en ta faveur des ordres à ses anges pour qu'ils te gardent, Ps 91,10-11, et les anges chasseront invisiblement loin de toi toutes les entreprises hostiles.
Ne veuille pas que ce qui te concerne s'arrange selon tes idées, mais selon Le bon plaisir de Dieu. Alors tu seras sans trouble et plein de reconnaissance dans ta prière.
Fais tous tes efforts pour ne rien dire contre personne dans ta prière ; ce serait démolir ce que tu veux édifier et rendre ta prière abominable.
À un saint plein d'amour pour Dieu et de zèle pour la prière, survinrent, tandis qu'il marchait dans le désert, deux anges qui le prirent au milieu et cheminèrent avec lui, mais il ne fit pas attention à eux pour ne pas perdre ce qu'il y a de meilleur; car il se rappelait ce mot de l'apôtre : «Ni les anges, ni les principautés, ni les puissances ne pourront nous séparer de l'amour du Christ», Rm 8,38.

Si tu n'as pas encore reçu le charisme de la prière ou de la psalmodie, obstine-toi et tu recevras.
Lorsque dans ta prière tu seras parvenu au-dessus de toute autre joie, c'est alors qu'en toute vérité, tu auras trouvé la prière.

In Philocalie, Chapitres de la prière, fascicule 8, Abbaye de Bellefontaine, 1987, p. 52s, in Daniel Bourguet, l’Evangile médité par les Pères, Marc, Veillez et priez, éd. Olivétain, 133-134.