lundi 23 novembre 2020

Guerric d'Igny, Préparez le chemin du Seigneur

 

1er dimanche de l'Avent  29 novembre 2020

Abbé cistercien.

Sermon V pour l'Avent,

Lectionnaire, éditions du Cerf, 1994, p. 36-37. 

 

Préparez le chemin du Seigneur 





Le chemin du Seigneur, frères, qu'il nous est demandé de préparer se prépare en  marchant. On y marche dans la mesure où on le prépare. Même si vous vous êtes beaucoup avancés sur ce chemin, il vous reste toujours à le préparer, afin que, du point où vous êtes parvenus, vous soyez toujours tendus au-delà.  

Voilà  comment,  à  chaque  pas  que  vous  faites,  le  Seigneur  à  qui  vous préparez les voies vient au-devant de vous, toujours nouveau, toujours plus grand.  

Aussi est-ce avec raison que le juste prie ainsi : Enseigne-moi le chemin de tes volontés et je le chercherai toujours. On donne  à ce chemin le nom  de  vie  éternelle,  peut-être  parce  que  bien  que  la  providence ait examiné le chemin de chacun et lui ait fixé un terme jusqu'où il puisse aller, cependant la bonté de Celui vers lequel vous vous avancez n'a pas de terme. 

C’est pour vous faire miséricorde que le Seigneur attend ; bienheureux tous ceux qui l’attendent, Is  30,18.  Il ne faut pas que le délai imposé à l’espérance attiédisse notre foi ou bien rende inquiète notre patience, et  que  nous  devenions  alors  semblables  à  ceux  qui  croient  pour  un temps et qui se retirent au moment de la tentation. 

Que celui qui croira ne soit pas pressé, Is 28,16, de contempler l’objet de sa foi. Oui, attendre vraiment le Seigneur, c’est Lui conserver notre foi et,  quoique  privés  de  la  consolation  de  sa  présence,  ne  pas  suivre  le séducteur, mais demeurer  suspendu à son retour,  Os  11,7.  Cela signifie qu’étant  comme  entre  ciel  et  terre,  on  ne  peut  encore  atteindre  les biens célestes, sans pour autant vouloir toucher les choses de la terre.  

lundi 16 novembre 2020

Dominique Greiner, A.A., Les œuvres de miséricorde

 Mt 25,31-46,    22 novembre 2020, Christ roi


La tradition retient deux sortes d’œuvres d’amour (ou de miséricorde) : les oeuvres corporelles et les oeuvres spirituelles.

Les œuvres corporelles, ce  sont : vêtir celui qui est nu ; donner l’hospitalité ; visiter les malades et les prisonniers ; nourrir ceux qui ont faim ; donner à boire à ceux qui ont soif ; ensevelir les morts.

 

Les six premières œuvres corporelles ont leur source dans le chapitre 25 de l’Évangile de saint Matthieu (31-46). Le texte de Matthieu décrit le jugement final. Le Fils de l’homme placé sur son trône de gloire convoque toutes les nations et énonce le critère d’entrée dans son royaume : « Car j’ai eu faim et vous m’avez donné à manger, j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire, j’étais un étranger et vous m’avez accueilli, nu et vous m’avez vêtu, malade et vous m’avez visité, prisonnier et vous êtes venu me voir (…). Tout ce que vous avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait.»

L’ensevelissement des morts apparaît au cours du XIIe siècle.

Les œuvres spirituelles sont également au nombre de sept : instruire les ignorants ; prier pour le prochain ; consoler les affligés ; reprendre les pécheurs ; supporter celui qui est à charge ; conseiller son prochain dans le doute ; pardonner les offenses.

Les œuvres spirituelles  reprennent diverses exhortations que l'on trouve dans le Nouveau Testament. Elles peuvent aussi être lues comme le déploiement sur le plan spirituel des œuvres corporelles. Un propos attribué à saint Jean Chrysostome († 407) résume cette perspective : « On ne compte pas dans l'Église que des pauvres de corps, dont le corps est affamé ou sans abri. Il y a aussi ceux qui sont pauvres spirituellement, privés de la nourriture de la justice, de la boisson de la connaissance de Dieu, du vêtement du Christ… Il y a les étrangers au cœur sans abri, d'autres au courage chancelant, les spirituellement aveugles, les sourds emmurés dans leur désobéissance, ceux qui souffrent de toutes sortes de maladies spirituelles, et qui sont si malades qu'ils ont peur de recevoir une nourriture spirituelle".

Les œuvres de miséricorde sont à l'image de la miséricorde de Dieu. Aimer le prochain, aimer comme le Christ aime et à aimer le Christ dans le prochain.

Les œuvres de miséricorde se rapprochent du commandement de l'amour des ennemis « À travers lui, on comprend le mieux ce qu'il en est de l'agapè ou de la miséricorde : une initiative gratuite vers l'autre à travers laquelle se réalise ce qui est au fondement même des interdits du Décalogue, permettre à l'autre d'être reconnu et d'exister en tant qu'autre. » Cette initiative ne se limite pas à l'aumône mais est aussi un appel à la justice, à un engagement social et politique en faveur de l'éradication des injustices. « Nourrir les affamés, donner à boire aux assoiffés, visiter les malades, tout cela est en rapport avec les structures caritatives, avec les lois, les institutions, les organismes qui sont les rouages de la charité. Ainsi sont nés des hôpitaux, des réseaux et installations sociales ».

Dans le texte de Matthieu 25, ceux qui n'ont pas posé les gestes requis à l'égard de ceux qui étaient dans le besoin sont déclarés « maudits » et voués au « feu éternel ». L'accès au salut semble donc bien passer par les œuvres qui sont des manières d'exprimer sa foi, d'en témoigner et de l'approfondir. 

Dans le même temps, la surprise qui saisit aussi bien les justes que les maudits « Quand nous est-il arrivé de te voir affamé… ? ») dispense les croyants de tenir une comptabilité des œuvres accomplies ou omises :  il ne leur appartient pas de déterminer comment ce qu'ils font ou ne font pas à autrui atteint Jésus, le Fils de l'homme, qui s'identifie aux plus petits. Si la pratique des œuvres d'amour est nécessaire au salut, elle ne constitue pas pour autant une garantie pour l'entrée dans le Royaume de Dieu. Le jugement de qui est digne d'avoir part à ce Règne est une prérogative de Dieu seul,« sonde les cœurs et les reins ».

Extrait de https://www.la-croix.com/Religion/Les-oeuvres-misericorde-

samedi 14 novembre 2020

Parabole des talents, Mt 25,14-30 Pères de l'Eglise

 

Dimanche 15 novembre 2020

Saint Grégoire le Grand

Cet homme, qui part pour un long voyage, c'est notre Rédempteur, qui est parti pour le ciel revêtu de la chair qu'il avait prise pour notre salut ; car la terre est comme le pays natal de la chair et le lieu de son habitation, et elle part pour un long voyage lorsqu'elle est placée dans le ciel par notre Rédempteur.


Ce n'est pas comme Dieu qu'il fait ce voyage, mais comme homme revêtu du corps qu'il a pris dans le mystère de son incarnation. Car celui qui a dit : «Voici que je suis avec vous jusqu'à la consommation des siècles », Mt 28, c'est le Fils unique de Dieu, qui n'est point renfermé dans les limites étroites d'un corps mortel. En parlant de la sorte, nous ne divisons pas la personne de Jésus, mais nous conservons à chaque nature ses propriétés distinctes. Nous pouvons dire aussi que le Seigneur voyage loin de ceux qui marchent par la foi, et ne jouissent pas encore de la claire vue, 2 Co 5,6. Or, si, lorsque nous serons éloignés de notre corps, nous sommes avec le Seigneur, il sera lui-même avec nous. Remarquez aussi que le texte ne porte pas : «Je suis, ou le Fils de l'homme est comme un homme qui entreprend un voyage», car il se présente à nous dans cette parabole, non pas comme Fils de Dieu, mais comme homme qui part pour un long voyage.

Saint Jérôme

Après avoir appelé ses apôtres, il leur confia la doctrine de l'Évangile. S'il donne à l'un plus, à l'autre moins, ce n'est ni prodigalité d'une part, ni parcimonie de l'autre ; il proportionne ses dons à la capacité de ceux qui les reçoivent. C'est ainsi que l'Apôtre nous apprend qu'il avait nourri avec du lait ceux qui ne pouvaient supporter une nourriture plus solide. «Et il donne cinq talents à l'un, deux à l'autre», etc. Ces talents, au nombre de cinq, de deux et d'un, représentent les diverses grâces qui furent données à chacun d'eux.

Origène

Parmi ceux à qui Jésus-Christ a confié le ministère de la parole de Dieu, vous voyez que les uns ont reçu davantage, les autres moins, et n'ont pas, pour ainsi-dire, la moitié de l'intelligence des premiers; d'autres enfin ont reçu beaucoup moins encore. Or, pourquoi cette différence entre ceux qui ont reçu de Jésus-Christ le même ministère de la parole divine ? C'est que la vertu et la capacité n'étaient pas les mêmes dans celui qui a reçu cinq talents, dans celui qui en a reçu deux et dans celui qui n'en a reçu qu'un, et que tous ne pouvaient recevoir la même mesure de grâces. Cependant, celui qui n'a reçu qu'un talent a reçu un don qui n'est pas sans importance, car un seul talent, venant d'un si grand maître, est d'une grande valeur. Il y a toutefois trois sortes de serviteurs, comme il en est aussi trois sortes parmi ceux qui portent des fruits. Celui qui a reçu cinq talents est celui qui peut donner aux figures de l'Écriture sainte un sens plus élevé et tout divin. Celui qui ne connaît que le sens littéral et extérieur de la doctrine a reçu deux talents ; car le nombre deux se rapporte aux choses extérieures et charnelles, 1 Co 3,4. Enfin, celui à qui le père de famille ne donne qu'un talent est moins capable encore.

Saint Grégoire le Grand

Ou bien, dans un autre sens, les cinq talents figurent les dons des cinq sens, c'est-à-dire la science des choses extérieures ; les deux talents désignent l'intelligence et l'action, et le talent unique n'indique que le don de l'intelligence.

Origène

Ou bien, ceux qui après avoir exercé leurs sens à la pratique de la vertu, tendent à une science supérieure et l'enseignent aux autres, gagnent cinq autres talents ; car on ne peut recevoir l'accroissement d'une vertu si on ne la possède déjà, de même qu'on ne peut enseigner aux autres que ce que l'on sait soi-même. Ou bien, ils gagnèrent deux autres talents, c'est-à-dire la science des choses extérieures et une autre un peu plus élevée.

Saint Grégoire le Grand

Cacher le talent dans la terre, c'est enfouir, pour ainsi-dire, dans des occupations toutes terrestres le don de l'esprit qu'on a reçu.

La lecture de cet Évangile doit nous faire sérieusement réfléchir sur cette vérité : que ceux qui ont reçu en ce monde des grâces plus abondantes seront l'objet d'un jugement plus sévère, car plus on reçoit, plus est grand le compte que l'on devra rendre. Il faut donc s'humilier profondément des dons que l'on a reçus, en considérant que l'on devra être jugé d'autant plus sévèrement sur l'usage qu'on en aura fait.

 Extrait de https://www.apolétique.net/EvangilePere

jeudi 5 novembre 2020

Jeanine Gindrey, Prier avec les arbres


Dans l'Ancien et le Nouveau Testament, les arbres représentent le lieu de la rencontre, mais aussi celui du choix ou la fécondité des disciples. 
Petit parcours biblique. 

" Et Dieu vit que cela était bon ».

Pour ma profession religieuse perpétuelle, j’avais choisi une photo d’arbres avec ce témoignage de Paul Claudel : "J’ai besoin comme un arbre, de la profondeur des racines et de l’immensité du ciel pour me tenir debout". J’ai toujours été fascinée par les nombreux arbres de ma région natale, peupliers, platanes, saules, noyers... liens vivants entre la terre et le ciel. Se promener en forêt, en respirer les parfums, cela invite à se tourner vers son intériorité, à prier. Dans le jardin d’Eden, « le Seigneur Dieu fit germer du sol des arbres d’aspect attrayant et bons à manger, l’arbre de vie et l’arbre de la connaissance du bonheur et du malheur "l’homme et sa femme allèrent se cacher aux regards du Seigneur Dieu parmi les arbres du jardin", Gn 3,8. 
 
Dieu donne à l’homme la liberté de choisir, d’agir avec prudence et discernement. Vois, je mets aujourd’hui devant toi la vie et le bonheur, la mort et le malheur, moi qui te commande aujourd’hui d’aimer le Seigneur ton Dieu, de suivre ses chemins, de garder ses commandement", Dt 30,15-1. Dieu bénit ceux qui mettent en pratique ses commandements. "Je vous donnerai les pluies en leur saison ; la terre donnera ses produits et les arbres des champs donneront leurs fruits", Lv 26,4. Jésus promet à ceux qui lui sont fidèles, de leur donner à goûter les fruits de l'arbre de vie qui se trouvent dans le jardin de Dieu, Ap 2,7. Ps 1,3. L’homme se sert des arbres pour se chauffer et cuisiner, Is 44,15. Il en fait des cadres en bois d’acacia pour le Sanctuaire", Ex 36,20, et des instruments de musique pour louer Dieu : "David et toute la maison d’Israël dansaient devant le Seigneur au son de tous les instruments de cyprès, 2 S 6,5. Mais il invente des instruments de supplice pour les condamnés. >Le Dieu de nos pères a ressuscité Jésus, que vous aviez exécuté en le pendant au bois, Ac 5,30. 

 Les disciples comme des arbres fructueux 

 Au livre des Juges, "les arbres s’étaient mis en route pour aller oindre celui qui serait leur roi.L’olivier, le figuier, la vigne, chacun son tour, ils refusent de renoncer à leurs biens, l’huile, le fruit et le vin. Le buisson d’épines ne possède rien que son ombre, mais il pose une condition, que les arbres viennent s’abriter sous son ombre. Ces réactions de pouvoirs, de calculs, ces conditions posées, nous sont presque familières, quand nous acceptons ou refusons de rendre un service, ou d’assumer une responsabilité. Et Jésus répond au jeune homme qui l’interroge : «Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel. Puis viens, et suis-moi. Après avoir entendu ces paroles, le jeune homme s'en alla tout triste, car il avait de grands biens. Renoncer à nos idées, nos projets ou nos objets n’est pas simple… 
Le disciple est comparé à un arbre qui produit un bon fruit Lc 6,43. Le délai accordé au figuier stérile est celui du temps de la conversion, pour produire du fruit et ainsi éviter à l’arbre d’être coupé,Lc 13,9.

L'arbre, lieu de la Parole 

Des combats sont menés aujourd’hui pour la reforestation quand on interdit de couper le bois pour en faire du charbon de bois, et des États appellent les habitants à planter chacun un arbre fruitier dans sa parcelle. Autant de gestes qui recréent l’harmonie entre la terre et l’homme. L’usage de produits nocifs pour la terre et les insectes, l’industrialisation et les nouvelles technologies polluent la terre, l’eau et l’air. Des peuples sont affamés. L’homme responsable de ses actes doit modifier ses comportements pour sauvegarder son milieu de vie. 
 En Afrique, la palabre est un jeu de relations qui se vit à l’ombre des arbres. Quand, Dieu cherche à rencontrer l’homme dans son intériorité, quand il apparaît à Abraham à Mambré, Gn 18,1-16, c’est à l’ombre d’un chêne qu’Abraham reçoit trois hommes, à l’ombre d’un figuier quand Jésus l’aperçoit, Jn 1,48. Zachée monte sur un sycomore pour voir Jésus, et Jésus l’appelle à descendre, Lc 19-4-6. Dieu nous rencontre dans sa Parole. À l’écoute de l’Esprit, le contact avec le mystère du Christ transforme notre cœur pour nous conduire à agir en choisissant la vie. 

"Lorsque je lis les Saintes Écritures, c’est Dieu qui se promène avec moi dans le paradis". 
 Saint Ambroise. 

 Une prière 

 Se promener dans la forêt, 
 Écouter le bruissement des feuilles, 
 Admirer leurs couleurs, 
 Sentir l’odeur de l’écorce. 
 Regarder les oiseaux se poser sur les branches, 
 Écouter la mélodie de leur chant, 
 Regarder leur envol. 

 Sentir la brise légère, 
 Percevoir le murmure de Dieu en nos cœurs. 
 Étendre comme un arbre des racines profondes 
 Vers la source de Dieu, 
 Étancher sa soif de Vie, 
 S’enraciner dans la foi. 
 Se laisser renouveler au souffle de l’Esprit. 

 Désirer atteindre le ciel, 
 Élever ses pensées en Dieu. 
 Prier avec foi et persévérance, 
 Vivre de Sa Vie. 
 Marcher au pas de Dieu, 
 Jouir du silence 

Décider de changer, 
 Agir pour le prochain, 
 Modifier nos comportements,  
Sauvegarder l’environnement. 
Percevoir la main Dieu dans la création. 
Le louer pour sa vie et pour ses dons. 

 Jeanine Gindrey, in l'Assomption ses oeuvres, N° 763, octobre-novembre-décembre 2020.

mardi 3 novembre 2020

Saint Séraphin de Sarov, Mt 25,1-13

32ème dimanche du temps ordinaire                                                                                        18ème - 19ème siècle


Notre Seigneur compare notre vie à un marché.

La Parabole des Vierges Sages et des Vierges Folles.

 

     Dieu, le Verbe, Notre Seigneur Dieu Homme, Jésus-Christ, compare notre vie à un marché et notre activité sur cette terre à un commerce. Il nous dit à tous : « Négociez jusqu'à Mon Avènement en économisant le temps, car les jours sont incertains... ». C'est-à-dire : gagnez du temps pour l'acquisition des biens célestes, en utilisant les biens terrestres, ceux-ci étant représentés par les vertus pratiquées au nom de Jésus-Christ nous apportant la grâce du Saint-Esprit.

Dans la parabole des Vierges Sages et des Vierges Folles, quand ces dernières manquent d'huile, il faut aller en acheter au marché. Or, quand elles en ont acheté, les portes de la chambre nuptiale : sont déjà fermées, et elles ne peuvent y entrer. Certains disent que le manque d'huile chez les Vierges Folles, symbolise l'insuffisance de bonnes actions. 
Cette explication n'est point juste. 
 
Quelle insuffisance de bonnes oeuvres auraient-elles, en effet, puisqu'elles sont nommées 
« VIERGES » quoique folles. ...

     Moi, humble Séraphin, je pense qu'il leur manquait justement la Grâce de l'Esprit de Dieu. Pratiquant les vertus, ces vierges croyaient justement en ces pratiques. « Ayant fait une bonne action, pensaient-elles, nous avons fait, par cela même, l'oeuvre de Dieu ». Quant à la grâce du Saint-Esprit, elles ne se souciaient point de l'obtenir. C'est sur ce mode de vie, basé uniquement sur la pratique des vertus, sans avoir examiné minutieusement si elles rapportaient ces grâces du Saint-Esprit, et combien exactement, qu'il a été dit dans les Écritures :

     « Certaines voies paraissent être bonnes au commencement, mais leurs fins conduisent dans les abîmes infernaux ».

     Saint Antoine le Grand, dans ses Épîtres aux moines, dit de ces vierges : « Beaucoup de moines et de vierges ignorent totalement les différences dans les volontés agissantes dans l'homme. Ils ne savent pas que nous sommes le champ d'action de trois volontés : 

1°) celle de Dieu, très parfaite et salvatrice pour tous ; 

2°) notre propre volonté humaine qui, en soi, n'est ni mauvaise, ni salutaire; 

3°) celle du démon, nous conduisant à la perdition.

     Et c'est bien cette troisième volonté de l'ennemi qui apprend à l'homme, soit à ne pas pratiquer la vertu du tout, soit à le faire par vanité - ou pour le « bien » seulement, et jamais au nom du Christ.

 
     La deuxième, notre propre volonté, nous apprend à tout faire pour notre jouissance, ou alors, pareillement à celle de l'ennemi, nous apprend à faire le bien au nom du « bien » seul, sans se soucier de la grâce que l'on peut ainsi acquérir.

     Quant à la première volonté, celle de Dieu, elle consiste essentiellement dans la pratique du bien uniquement au nom du Christ, pour l'acquisition de l'Esprit Saint, ce trésor éternel inépuisable que rien ne peut, ici, estimer à sa juste valeur. Cette acquisition du Saint-Esprit est symbolisée par l'huile qui manquait chez les vierges folles. C'est pour cela qu'on les a appelées « folles », parce qu'elles ont oublié la chose essentielle, le fruit indispensable de la vertu - la grâce de l'Esprit Saint - sans quoi il ne peut y avoir de salut pour personne.

     Puisque : « Toute âme est vivifiée par l'Esprit-Saint et s'élève par la pureté, et, mystérieusement sacrée, s'éclaire par l'Unité Trinitaire », l'Esprit Saint Lui-même vient habiter nos âmes. Cette habitation dans nos âmes par Lui, Tout Puissant, et la coexistence de son Unité Trinitaire avec notre propre esprit, nous est accordée seulement si nous nous efforçons d'acquérir par tous les moyens Sa Grâce. Cette acquisition de la grâce prépare dans notre âme et dans notre corps, le trône où Dieu vient pour coexister avec notre propre esprit en un acte créateur.

     Selon la parole immuable de Dieu : « Je viendrai et j'habiterai en eux et je serai leur Dieu et ils seront Mon peuple », c'est cette huile qui brûlait avec force et clarté dans les lampes des Vierges Sages, et elles purent ainsi attendre le Fiancé venu à minuit et pénétrer avec Lui dans la chambre nuptiale de la joie.

     Les Vierges folles, voyant que leurs lampes s'éteignaient, allèrent, en vain, acheter de l'huile au marché, car à leur retour les portes étaient déjà fermées.

     Le marché symbolise notre vie. Les portes de la chambre nuptiale fermées, qui empêchent l'accès vers le Fiancé, notre mort. Les Vierges folles et sages, les âmes chrétiennes L'huile ne symbolise pas les actions, mais bien la grâce du Très Saint-Esprit divin qui transforme ceci en cela : c'est-à-dire le corruptible en incorruptible, la mort psychique en vie Spirituelle, les ténèbres en lumière, notre étable existentielle, Où les passions sont enchaînées comme des bêtes, en temple de Dieu, en Chambre nuptiale de la joie ineffable en le Christ Jésus Notre Seigneur, Créateur, Rédempteur, Éternel Fiancé de nos âmes.

     Que la miséricorde divine envers notre malheur est grande ! Notre malheur, c'est notre inattention pour les soins qu'Il prend de nous, c'est cela notre malheur !

 
     Dieu dit : « Je suis à la porte et Je frappe! », comprenant par le mot « porte », le cours de notre vie non encore fermé par la Mort.

     Oh ! Combien j'aurais désiré, votre Théophilie, que dans cette vie vous fussiez toujours en la grâce du Saint-Esprit.

     « Je vous jugerai dans l'état où je vous trouverai », dit le Seigneur. Malheur, grand malheur s'il nous trouve appesantis par les soucis et les peines terrestres. « Qui pourra résister à son courroux et qui pourra lui faire face? ».. Et il est dit encore : « Veillez et priez afin de ne pas succomber dans la tentation », c'est-à-dire de ne pas perdre la grâce du Saint-Esprit, car les veilles et la prière sont les moyens pour en acquérir.

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