samedi 29 octobre 2022

Saint Augustin (+ 430), La vision de Dieu promise aux coeurs purs

Tous saints

Évangile selon saint Matthieu 5,1-12 a

Quand Jésus vit toute la foule qui le suivait, il gravit la montagne. Il s'assit, et ses disciples s'approchèrent. Alors, ouvrant la bouche, il se mit à les instruire. Il disait : "Heureux les pauvres de cœur : le Royaume des cieux est à eux ! "

Heureux les coeurs purs : ils verront Dieu, Mt 5,8

Voilà le but de notre amour, la fin qui nous rend parfaits, sans nous détruire.

 Il y a la fin de la nourriture et la fin du vêtement. La fin de la nourriture, c'est d'être détruite par la manducation ; la fin du vêtement, c'est d'être achevé par le tissage. Celui-ci comme celle-là arrivent à leur fin, mais la fin de l'une est sa destruction, tandis que celle de l'autre est son achèvement.

Tout ce que nous faisons, tout ce que nous faisons de bon, tout ce que nous nous efforçons d'obtenir, toutes les causes dignes d'éloges pour lesquelles nous nous dépensons, tout ce que nous désirons d'honnête, nous ne le rechercherons plus quand nous serons parvenus à la vision de Dieu. Que pourrait bien chercher celui qui possède Dieu ? Qu'est-ce qui pourrait satisfaire celui qui ne se satisfait pas de Dieu ?

Nous voulons voir Dieu, nous cherchons à le voir, nous désirons ardemment le voir. Qui n'a pas ce désir ? Mais remarque ce que dit l'évangile : Heureux les coeurs purs: ils verront Dieu ! Fais en sorte de le voir. Pour prendre une comparaison parmi les réalités matérielles, comment voudrais-tu contempler le soleil levant avec des yeux chassieux ? Si tes yeux sont sains, cette lumière sera pour toi un plaisir ; s'ils sont malades, elle sera pour toi un supplice. Assurément, il ne te sera pas permis de voir avec un coeur impur ce que l'on ne peut voir qu'avec un coeur pur. Tu en seras écarté, éloigné, tu ne verras pas. Heureux, en effet, les coeurs purs : ils verront Dieu !

Combien de fois le Seigneur a-t-il proclamé des hommes "bienheureux" ? Quels motifs du bonheur éternel a-t-il cités, quelles bonnes oeuvres, quels dons, quels mérites et quelles récompenses ? Aucune autre béatitude n'affirme: Ils verront Dieu. Voici comment les autres s'énoncent : Heureux les pauvres de coeur: le Royaume des cieux est à eux! Heureux les doux : ils obtiendront la terre promise ! Heureux ceux qui pleurent: ils seront consolés ! Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice : ils seront rassasiés ! Heureux les miséricordieux : ils obtiendront miséricorde ! Aucune, donc, n'affirme : Ils verront Dieu.

La vision de Dieu est promise quand il s'agit d'hommes au coeur pur. Cela n'est pas sans raison, puisque les yeux qui permettent de voir Dieu sont dans le coeur. Ce sont les yeux dont parle l'Apôtre Paul quand il dit : Puisse-t-il illuminer les yeux de votre coeur
Ep 1,18 ! Dans le temps présent, ces yeux, en raison de leur faiblesse, sont donc illuminés par la foi ; plus tard, en raison de leur vigueur, ils seront illuminés par la vision. Car nous sommes en exil loin du Seigneur tant que nous habitons dans ce corps ; en effet, nous cheminons dans la foi, non dans la claire vision 2 Co 5,6-7. Et aussi longtemps que nous cheminons dans cette foi, que dit de nous l'Écriture ? Nous voyons actuellement une image obscure dans un miroir ; ce jour-là, nous verrons face à face 1 Co 13,12.

Sermon 53, 6,6; PL 38, 366.

Clerus.org

 


Philoxène de Mabboug († 523), Dieu notre seul bien


Philoxène de Mabboug est un évêque syrien « orthodoxe oriental » né vers le milieu du Vᵉ siècle à Tahal, ville épiscopale du Beit Garmaï, mort sans doute le 10 décembre 523 à Gangres en Paphlagonie


Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 19,1-10

Jésus traversait la ville de Jéricho. Or il y avait un homme du nom de Zachée ; il était le chef des collecteurs d’impôts, et c’était quelqu’un de riche. Il cherchait à voir qui était Jésus, mais il n’y arrivait pas à cause de la foule, car il était de petite taille.


Tous ceux qui ont été appelés par le Seigneur ont obéi aussitôt à sa voix dès lors que l’amour des choses terrestres n’alourdissait pas leur âme. Car les liens du monde asservissent le cœur et ses pensées, et celui qui en est entravé entend difficilement résonner la voix de Dieu. Mais il n’en alla pas ainsi des Apôtres, ni des justes, ni des Patriarches qui vécurent avant eux : ils obéirent comme des vivants et prirent la route, légers, parce qu’aucune lourde chaîne ne les attachait au monde. Rien ne peut lier ni entraver l’âme qui aperçoit Dieu: elle est ouverte et prête, si bien que la lumière de la loi divine, chaque fois qu’elle s’approche de cette âme, la trouve disposée à la recevoir.

Notre Seigneur a aussi appelé Zachée du sycomore sur lequel il était monté, et aussitôt Zachée s’empressa de descendre et le reçut dans sa maison, car, avant même d’être appelé, il avait l’espoir de le voir et de devenir son disciple. L’admirable est que, sans que le Seigneur lui eût parlé et sans l’avoir vu avec les yeux du corps, Zachée ait cru en lui, simplement sur la parole des autres, car la foi qui était en lui avait été préservée dans sa vie et sa santé naturelles. Le fait qu’il ait cru en notre Seigneur au moment même où il apprit son arrivée, a rendu sa foi manifeste. Et la simplicité de sa foi est apparue lorsqu’il promit de donner la moitié de ses biens aux pauvres et de rendre au quadruple ce qu’il avait pris d’une manière malhonnête.

En effet, si la simplicité qui convient à la foi n’avait pas rempli à ce moment l’âme de Zachée, il n’aurait pas fait cette promesse à Jésus, et il n’aurait pas dépensé et distribué en peu de temps ce qu’il avait amassé en tant d’années de travail. La simplicité a répandu de tous côtés ce que l’astuce avait amassé, la pureté de l’âme a dispersé ce que la tromperie avait acquis, la foi a renoncé à ce que l’injustice avait obtenu et possédé, et elle a proclamé que cela ne lui appartenait pas.

Car Dieu est le seul bien de la foi et celle-ci refuse de posséder d’autres biens avec lui. La foi ne fait aucun cas des biens, quels qu’ils soient, en dehors de Dieu, son seul bien durable. Nous avons reçu en nous la foi pour parvenir à Dieu, ne posséder que lui et regarder comme un désavantage tout ce qui n’est pas lui.

Homélie 4, 79-80, version remaniée de SC 44, 96-97

Clerus.org homélie 30ème dimanche année C

jeudi 20 octobre 2022

Grégoire de Palamas (+ 1359), Aux humbles Dieu accorde sa grâce

 


30e dimanche du temps ordinaire C


Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
18,9-14

Jésus dit une parabole pour certains hommes qui étaient convaincus d'être justes et qui méprisaient tous les autres : "Deux hommes montèrent au Temple pour prier. L'un était pharisien et l'autre, publicain."



Cet être spirituel qui est le premier auteur du mal et qui s'ingénie à le répandre, se montre très habile à détruire par le désespoir et l'infidélité les fondements de la vertu dans l'instant même où ils ont été posés dans une âme. Ensuite, lorsque se dressent les murs de ce que j'appellerai la maison de la vertu, il se sert aussi très astucieusement du découragement et de la négligence pour leur donner l'assaut. Même quand le toit des bonnes oeuvres  vient d'être construit, il l'abat encore avec l'arrogance et la présomption.

Restez fermes pourtant, ne vous effrayez pas, car l'homme zélé pour le bien est plus habile que lui. Et la vertu possède, pour résister au mal, une force plus grande que la sienne. Elle bénéficie, en effet, de l'assistance et du secours envoyés d'en haut par Celui qui peut tout. Dans sa bonté, il rend forts tous ceux qui aiment la vertu.

De la sorte, celle-ci restera inébranlable face aux multiples et funestes machinations ourdies par l'Adversaire. Elle pourra en outre relever et rétablir ceux qui sont tombés dans l'abîme des maux, et les conduire facilement à Dieu par le repentir et l'humilité.

La parabole nous le fait comprendre suffisamment. Le publicain, bien qu'il soit publicain et passe sa vie dans ce que j'appellerai l'abîme du péché, s'unit par une simple prière à ceux qui mènent une vie conforme à la vertu. Grâce à cette courte prière il se sent léger, il s'élève, il triomphe de tout mal, il est agrégé au choeur des justes et justifié par le Juge impartial. Le pharisien, lui, est condamné sur ce qu'il dit, bien qu'il soit pharisien et se considère comme quelqu'un d'important. Car il n'est pas vraiment juste, et de sa bouche sortent beaucoup de paroles d'orgueil qui, toutes, provoquent la colère de Dieu.

Pourquoi l'humilité élève-t-elle l'homme à la hauteur de la sainteté, tandis que la présomption le précipite dans le gouffre du péché ? Voici. Celui qui se prend pour quelqu'un d'important devant Dieu est à juste titre abandonné par Dieu, puisqu'il pense ne pas avoir besoin de son secours. L'autre reconnaît son néant et, de ce fait, se tourne vers la miséricorde divine. Il trouve à juste raison la compassion, l'assistance et la grâce de Dieu. L'Écriture dit en effet : le Seigneur résiste aux orgueilleux, mais il accorde aux humbles sa grâce, c
f. Pr 3,34 grec ;  Jc 4,6 1P 5,5.

Selon la parole du Seigneur, quand ce dernier rentra chez lui, c'est lui qui était devenu juste et non pas l'autre. Qui s'élève sera abaissé ; qui s'abaisse sera élevé,
Lc 18,14. Du fait que le diable est l'orgueil même, et l'arrogance son vice propre, ce mal conquiert puis entraîne avec lui toute vertu humaine à laquelle il se mêle. Pareillement, s'abaisser devant Dieu est la vertu des bons anges : elle triomphe également de tous les vices humains dont sont affligés les pécheurs. Car l'humilité est le char qui nous emmène vers Dieu, sur ces nuées qui doivent emporter jusqu'à lui ceux qui lui seront unis dans les siècles sans fin, selon la prophétie de l'Apôtre : Nous serons emportés, dit-il, sur les nuées du ciel à la rencontre du Seigneur. Ainsi, nous serons pour toujours avec le Seigneur, 1 Th 4,17. Car l'humilité est semblable à une nuée : elle prend corps dans le repentir, elle fait jaillir des yeux un torrent de larmes, elle rend dignes les indignes, elle conduit et unit à Dieu ceux qui, en raison de leur volonté droite, sont justifiés par la grâce.

Homélie 2 ; PG 151, 17-20.28-29.
http://www.clerus.org/bibliaclerusonline/pt/jzt.htm#h3

mardi 4 octobre 2022

Saint Bruno de Segni (+ 1123), La foi qui purifie

 

28e dimanche du temps ordinaire C


Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
17,11-19

Jésus, marchant vers Jérusalem, traversait la Samarie et la Galilée. Comme il entrait dans un village, dix lépreux vinrent à sa rencontre. Ils s'arrêtèrent à distance et lui crièrent : "Jésus, maître, prends pitié de nous." En les voyant, Jésus leur dit : "Allez vous montrer aux prêtres."



Jésus, marchant vers Jérusalem, traversait la Samarie. Comme il entrait dans un village, dix lépreux vinrent à sa rencontre, Lc 17,11-12. Que représentent les dix lépreux sinon l'ensemble des pécheurs ? Lorsque vint le Christ notre Seigneur, tous les hommes souffraient de la lèpre de l'âme, même s'ils n'étaient pas tous atteints de celle du corps. Or la lèpre de l'âme est bien pire que celle du corps. Mais voyons la suite. Ils s'arrêtèrent à distance et lui crièrent : Jésus, maître, prends pitié de nous, Lc 17,13. Ces hommes se tenaient à distance car ils n'osaient pas, étant donné leur état, s'avancer plus près de lui. Il en va de même pour nous : tant que nous demeurons dans nos péchés, nous nous tenons à l'écart. Donc, pour recouvrer la santé et guérir de la lèpre de nos péchés, supplions d'une voix forte et disons : Jésus, maître, prends pitié de nous. Cette supplication ne doit toutefois pas venir de notre bouche, mais de notre coeur, car le coeur parle d'une voix plus forte. La prière du coeur pénètre dans les cieux et s'élève très haut, jusqu'au trône de Dieu.

En les voyant, Jésus leur dit : Allez vous montrer aux prêtres, Lc 17,14. En vérité, lorsque Dieu regarde, il prend pitié. Il voit donc les lépreux, et aussitôt, saisi de pitié, il leur prescrit d'aller trouver les prêtres, non pour que les prêtres les purifient, mais pour qu'ils les déclarent purs.

En cours de route, ils furent purifiés, Lc 17,15. Il faut que les pécheurs entendent cette parole et fassent l'effort de la comprendre. Il est facile au Seigneur de remettre les péchés. Souvent, en effet, le pécheur est pardonné avant de venir trouver le prêtre. En réalité, il est guéri à l'instant même où il se repent. Quel que soit, en effet, le moment où il se convertit, il passe de la mort à la vie. Qu'il se rappelle cependant de quelle conversion il s'agit. Qu'il écoute ce que dit le Seigneur : Revenez à moi de tout votre coeur, dans le jeûne, les larmes et le deuil ! Déchirez vos coeurs et non pas vos vêtements, Jl 2,12. Toute conversion doit donc s'opérer dans le coeur, au-dedans. Car Dieu ne repousse pas un coeur brisé et broyé , Ps 50,19.

L'un d'eux, voyant qu'il était guéri, revint sur ses pas, en glorifiant Dieu à pleine voix. Il se jeta la face contre terre aux pieds de Jésus, en lui rendant grâce. Or, c'était un Samaritain, Lc 17,15-16. En réalité, cet homme représente tous ceux qui ont été purifiés dans l'eau du baptême ou guéris par le sacrement de pénitence. Ils ne suivent plus le démon, mais imitent le Christ, ils marchent à sa suite en le glorifiant et en lui rendant grâce, et ils n'abandonnent pas son service.

Jésus lui dit : Relève-toi et va : ta foi t'a sauvé, Lc 17,19. Grande est donc la puissance de la foi, car sans elle, selon la parole de l'Apôtre, il est impossible d'être agréable à Dieu, He 11,6.Abraham eut foi en Dieu, et, de ce fait, Dieu estima qu'il était juste, Rm 4,3. C'est donc la foi qui sauve, la foi qui justifie, la foi qui guérit l'homme dans son âme et dans son corps.

Homélie de saint Bruno de Segni  (+ 1123)

Commentaire sur l'évangile de Luc, 2, 40, PL 165, 426-428


http://www.clerus.org/bibliaclerusonline/fr/ijb.htm#a3w