dimanche 28 novembre 2021

Jean Tauler, lève-toi dit Isaïe

in Orantes de l'Assomption, les chemins de la grâce, textes pour l'office des lectures, présentés par soeur Monique-Anne Giroux, Or.A.

Jean Tauler 
(1300 – 1361)mystique Rhénan. L’appel divin : 2 manières d’y répondre, Sermon 5.  Nous laisser façonner par Dieu jusqu'au fond de notre âme : telle était la spiritualité qu'enseignait Jean Tauler aux « amis de Dieu ».

Lève-toi !
Dieu ne désire qu'une seule chose, la seule dont il ait besoin, et il la désire d'une façon si forte qu'il lui donne tous ses soins. Cette seule chose, c'est de trouver vide et accueillant le fond qu'il a mis dans l'esprit de l'homme afin de pouvoir y accomplir son œuvre d'Amour.


Mais que doit faire l'homme pour que Dieu puisse donner sa lumière et agir au fond de l'âme ? Il doit se lever.
 
« Lève-toi ! », dit Isaïe.

Si l'homme a quelque chose à faire, c'est de s'élever au-dessus de tout ce qui n'est pas Dieu, au-dessus de lui-même et au-dessus de toute créature. Cette élévation fait naître un ardent désir de se détacher et de se dépouiller de toute dissimilitude. Plus on se défait de toute dissimilitude et plus le désir grandit de s'en défaire.

 Il y a 2 catégories d'âmes qui répondent à cette touche intérieure et la suivent de 2 manières différentes.

Les premières se présentent avec leur subtilité naturelle et leur conception rationnelle avec lesquelles elles troublent le fond. Elles étouffent le désir de s'élever au-dessus de tout ce qui n'est pas Dieu en voulant écouter et comprendre par les chemins de leur conception rationnelle. Elles s'imaginent qu'elles ont ainsi la paix.

D'autres  veulent trouver leur satisfaction dans les observances et les pratiques de leur choix, dans la prière, les méditations...

C'est par ces exercices qu'elles veulent préparer le fond de leur âme. Elles trouvent une grande paix dans ces pratiques de piété, mais seulement dans celles qu'elles ont réglées elles-mêmes et pas ailleurs.

 Ceux qui se lèvent vraiment et qui ainsi sont illuminés, sont ceux qui  se livrent complètement à Dieu. Ils sortent d'eux-mêmes en toutes choses et ne gardent rien pour eux, ni dans les œuvres, ni dans les pratiques de piété, ni dans ce qu'ils font, ni dans ce qu'ils ne font pas, ni dans la joie, ni dans la peine. Mais ils acceptent tout de Dieu et lui rapportent absolument tout, dans un complet dépouillement d'eux-mêmes. Ils sont toujours contents de la volonté de Dieu, dans la paix et dans l'inquiétude, car ils aiment et désirent uniquement la volonté de Dieu.

 Ces personnes se lèvent en vérité et ils ont la paix dans le trouble, et la joie dans la souffrance. En tout, la volonté de Dieu leur agrée, et c'est pourquoi le monde entier ne saurait leur ravir leur paix.  Ces âmes ne goûtent que Dieu seul et rien d'autre. Ils sont en vérité illuminés, car Dieu répand sur eux sa lumière claire et pure en toutes circonstances, même aux heures de l'obscurité la plus sombre. Ce sont des gens surnaturels qui ne font rien sans Dieu. C'est Dieu qui est en eux. 

Ces personnes portent le monde entier.

Puissions-nous nous lever ainsi dans ce temps de l'attente, pour permettre à Dieu de faire en nous son œuvre.

samedi 20 novembre 2021

Guerric d'Igny, sermon IV pour l'Avent

Bienheureux, cistercien, vers 1070-1157.


Préparez le chemin du Seigneur

Le chemin du Seigneur, frères, qu'il nous est demandé de préparer se prépare en marchant. On y marche dans la mesure où on le prépare. Même si vous vous êtes beaucoup avancés sur ce chemin, il vous reste toujours à le préparer, afin que, du point où vous êtes parvenus, vous soyez toujours tendus au-delà.

Voilà comment, à chaque pas que vous faites, le Seigneur à qui vous préparez les voies vient au-devant de vous, toujours nouveau, toujours plus grand.

Aussi est-ce avec raison que le juste prie ainsi : Enseigne-moi le chemin de tes volontés et je le chercherai toujours. On donne à ce chemin le nom de vie éternelle, peut-être parce que bien que la providence ait examiné le chemin de chacun et lui ait fixé un terme jusqu'où il puisse aller, cependant la bonté de Celui vers lequel vous vous avancez n'a pas de terme.

C’est pour vous faire miséricorde que le Seigneur attend ; bienheureux tous ceux qui l’attendent, Is 30,18. Il ne faut pas que le délai imposé à l’espérance attiédisse notre foi ou bien rende inquiète notre patience, et que nous devenions alors semblables à ceux qui croient pour un temps et qui se retirent au moment de la tentation.

Que celui qui croira ne soit pas pressé, Is 28,16, de contempler l’objet de sa foi. Oui, attendre vraiment le Seigneur, c’est Lui conserver notre foi et, quoique privés de la consolation de sa présence, ne pas suivre le séducteur, mais demeurer suspendu à son retour, Os 11,7. Cela signifie qu’étant comme entre ciel et terre, on ne peut encore atteindre les biens célestes, sans pour autant vouloir toucher les choses de la terre.

In Orantes de l’Assomption, Les chemins de la grâce, textes pour l’office des lectures, présentés par sœur Monique-Anne Giroux, Or.A., p. 176.

samedi 13 novembre 2021

La lectio : écouter Dieu en lisant : décision pour le temps de l'Avent

 

La Lectio divina Lecture priante de la Parole de Dieu 

 

Le coeur et l’intelligence cherchent le Seigneur

La Lectio divina nous met à l’écoute de l’Esprit

Dieu nous parle dans l’Ecriture. C’est pourquoi chacun peut lire assidûment les Saintes Ecritures jusqu’à ce qu’elles deviennent une partie de son être. Par la Lectio divina ou lecture priante de la Parole de Dieu consignée dans la Bible, chaque croyant communie au Christ et le Christ lui fait connaître le Père.

Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole et mon Père l’aimera et nous viendrons à lui et nous ferons chez lui notre demeure”;" Jn 14,23.

 

En lisant l’Ecriture, nous nous mettons à l’écoute de ce que l’Esprit veut nous dire, ici et maintenant.

La Lectio divina nous fait entrer en contact avec le Mystère du Christ

En lisant, le message de la Parole pénètre le coeur et le coeur pénètre le mystère. L’Esprit présent en nous s’unit à la Parole de Dieu, qui est remplie d’Esprit Saint, de sorte que la Lectio stimule en nous la vie de la grâce.
A mesure qu’elle nous éveille, la Lectio développe et approfondit notre être spirituel dans la Parole de Dieu, et nous donne une conscience de plus en plus profonde du Mystère du Christ.

Lectio divina transforme notre coeur

Considérant la vie chrétienne comme l'évangélisation de notre conscience et de notre être profond, la place de la Lectio divina a toute son importance.

Vivre une retraite de Lectio demande de quitter notre quotidien pour mieux le retrouver ensuite.Cela demande de donner du temps, tout notre temps à la Parole de Dieu pour nous laisser transformer par elle. Il faut oser s'exposer simplement face à la Parole qui se révèle agissante et créatrice.

Origène, 3ème siècle

"Lire l’Ecriture est une façon pour Dieu et pour l’homme de se rencontrer. La vraie conversion, c’est de garder ce qu’on a compris dans son coeur et d’y conformer sa vie".

L’oreille du coeur s’affine progressivement et la Parole ne se déchiffre plus seulement dans l’Ecriture, mais aussi dans les rencontres et les événements. Dieu s’annonce dans la Bible et tout au long du jour. Dans cette annonciation, il nous revient d'écouter, en disponibilité et lucidité.En conclusion :La Lectio divina s’adresse à tous. Elle est accessible à tout lecteur humble et bienveillant. C'est une forme de rencontre entre Dieu et l’homme. En lisant l’Ecriture, nous devenons pleinement l'homme ou la femme à qui Dieu parle et dont Il attend une réponse.

Origène

“Il existe dans les Saintes Ecritures une sorte de force qui suffit, même sans explication, à celui qui la lit”, Homélie sur Josué XX 2.

vendredi 12 novembre 2021

Mon royaume n'est pas de ce monde, Saint Augustin, + 430.

 

21 novembre 2021, Christ Roi Saint Jean 18,33b-37.

Lorsque Jésus devant Pilate, celui-ci l'interrogea: "Es-tu le roi des Juifs?"

Écoutez donc, Juifs et Gentils ; écoutez, circoncis et incirconcis ; écoutez, tous les royaumes de la terre. Je ne m'oppose pas à votre exercice du pouvoir en ce monde, mon royaume n'est pas de ce monde, Jn 18,36.

Ne vous laissez pas égarer par la peur, comme Hérode le Grand, qui fut frappé d'épouvante quand on lui annonça la naissance du Christ. La peur, plus encore que la colère, déchaîna sa cruauté et, pour faire mourir Jésus, il ordonna le massacre de nombreux enfants, Mt 2,3.16. Mon royaume, dit le Christ, n'est pas de ce monde. Que voulez-vous savoir de plus? Venez dans le royaume qui n'est pas de ce monde ; venez-y par la foi, et que la peur ne vous rende pas cruels !

Le Christ, il est vrai, dit dans un psaume prophétique, en parlant de son Père : Il m'a sacré roi sur Sion, sa sainte montagne, Ps ,26. Mais cette ville et cette montagne ne sont pas de ce monde. Qu'est-ce, en effet, que le royaume du Christ ? Simplement ceux qui croient en lui, ceux à qui il dit : Vous n'êtes pas du monde, comme moi je ne suis pas du monde, Jn 17,16. Il veut pourtant qu'ils soient dans le monde. Aussi prie-t-il le Père pour eux : Je ne demande pas que tu les retires du monde, mais que tu les gardes du Mauvais, Jn 17,15. Voilà pourquoi il ne dit pas : "Mon royaume n'est pas dans ce monde", mais : Mon royaume n'est pas de ce monde. Il le confirme ensuite en ajoutant : Si mon royaume était de ce monde, j'aurais des gardes qui se seraient battus pour que je ne sois pas livré aux Juifs, Jn 18,36.

Il ne dit donc pas : "Mon royaume n'est pas ici", mais : Mon royaume n'est pas d'ici, Jn 18,36. Car son royaume est établi ici-bas et il durera jusqu'à la fin des temps ; il contiendra un mélange d'ivraie jusqu'à la moisson, qui est la fin du monde. Alors viendront les moissonneurs, qui sont les anges, et ils enlèveront tous ceux qui font tomber les autres. Ce qui serait impossible si son royaume n'existait pas ici-bas, Mt 13,38-41.

Pourtant, comme il est exilé dans le monde, il n'est pas d'ici. Le Christ dit en effet à ceux qui font partie de son royaume: Vous n'appartenez pas au monde, puisque je vous ai choisis en vous prenant dans le monde, Jn 15,19. Ils étaient donc du monde, quand ils n'étaient pas encore sujets du royaume, mais du prince de ce monde. Aussi, tous les hommes, bien que créés par le Dieu véritable, sont du monde en tant qu'issus de la race d'Adam, race corrompue et condamnée. Mais ceux d'entre eux qui sont régénérés dans le Christ forment le royaume qui n'est plus de ce monde.

Voilà comment Dieu nous a arrachés au pouvoir des ténèbres et nous a fait entrer dans le royaume de son Fils bien-aimé, Col 1,13, ce royaume dont le Christ dit : Mon royaume n'est pas de ce monde, ou bien : Mon royaume n'est pas d'ici, Jn 18,36.

Commentaire sur l'évangile de Jean, 115, 2; CCL 36, 644-645.

mercredi 3 novembre 2021

Le rassemblement des élus à la fin des temps, Grégoire de Palamas (+ 1359).

 

33e dimanche saint Marc 13,24-32            14 novembre 2021


Ceux qui professent la foi droite en notre Seigneur Jésus Christ et en témoignent dans leurs actions, ceux qui restent vigilants ou, s'ils ont péché, se purifient de leurs souillures par la confession et le repentir, ceux qui combattent les vices en exerçant les vertus de tempérance, de chasteté, de charité, de miséricorde, de justice et de sincérité, tous ceux-là entendront à la résurrection le Roi des cieux en personne leur dire: Venez les bénis de mon Père, recevez en héritage le royaume préparé pour vous depuis la création du monde (Mt 25,34). Héritiers d'un royaume céleste, inébranlable, ils régneront ainsi avec le Christ. Ils vivront pour toujours dans la lumière ineffable et sans déclin qu'aucune nuit jamais n'interrompt. Ils demeureront avec les saints d es temps anciens dans des délices inexprimables, auprès d'Abraham, là où il n'y a plus aucune douleur, aucune peine ni aucun gémissement.

Il existe une moisson pour les épis de blé matériels et une autre pour les épis doués de raison, c'est-à-dire le genre humain. Celle-ci, avons-nous dit, s'effectue chez les infidèles et rassemble dans la foi ceux qui accueillent l'annonce de l'évangile. Les ouvriers de cette moisson sont les Apôtres du Christ, puis leurs successeurs, puis, au cours du temps, les docteurs de l'Église. Le Christ a dit à leur sujet ces paroles, que nous avons déjà citées: Le moissonneur reçoit son salaire: il récolte du fruit pour la vie éternelle (Jn 4,36). En effet, les docteurs de la foi obtiendront aussi de Dieu une pareille récompense, parce qu'ils rassemblent pour la vie éternelle ceux qui obéissent.

Et il y a encore une autre moisson : c'est le passage de cette vie à la vie future qui, pour chacun de nous, s'opère par la mort. Les ouvriers de cette moisson-là ne sont pas les Apôtres, mais les anges. Ils ont une plus grande responsabilité que les Apôtres, car ils font le tri qui suit la moisson et ils séparent les méchants des bons, comme on le fait avec l'ivraie et le grain. Ils envoient d'abord les bons dans le Royaume des cieux, puis précipitent Les méchants dans la géhenne de feu.

Nous sommes aujourd'hui le peuple choisi de Dieu, la race sainte, l'Église du Dieu vivant, mise à part de tous les impies et infidèles. Puissions-nous être séparés de l'ivraie de la même manière dans le siècle futur, et agrégés à la foule de ceux qui sont sauvés dans le Christ, notre Seigneur, qui est béni dans les siècles. Amen.

Homélie 26 ; PG 151, 340-341