samedi 30 avril 2022

Saint Augustin, Aimer le Christ, aimer nos frères

Saint Jean 21,1-19


Jésus se manifesta encore aux disciples sur le bord du lac de Tibériade, et voici comment. Il y avait là Simon-Pierre avec Thomas, dont le nom signifie "Jumeau", Nathanaël de Cana en Galilée, les fils de Zébédée, et deux autres disciples. Simon-Pierre leur dit: "Je m'en vais à la pêche."




Voici que le Seigneur, après sa résurrection, apparaît de nouveau à ses disciples. Il interroge l'apôtre Pierre, il oblige celui-ci à confesser son amour, alors qu'il l'avait renié trois fois par peur. Le Christ est ressuscité selon la chair, et Pierre selon l'esprit. Comme le Christ était mort en souffrant, Pierre est mort en reniant. Le Seigneur Christ était ressuscité d'entre les morts, et il a ressuscité Pierre grâce à l'amour que celui-ci lui portait. Il a interrogé l'amour de celui qui le confessait maintenant, et il lui a confié son troupeau.

Qu'est-ce donc que Pierre apportait au Christ du fait qu'il aimait le Christ ? Si le Christ t'aime, c'est profit pour toi, non pour le Christ. Si tu aimes le Christ, c'est encore profit pour toi, non pour lui. Cependant le Seigneur Christ, voulant nous montrer comment les hommes doivent prouver qu'ils l'aiment, nous le révèle clairement : en aimant ses brebis.

Simon, fils de Jean, m'aimes-tu ? - Je t'aime. - Sois le pasteur de mes brebis. Et cela une fois, deux fois, trois fois. Pierre ne dit rien que son amour. Le Seigneur ne lui demande rien d'autre que de l'aimer, il ne lui confie rien d'autre que ses brebis. Aimons-nous donc mutuellement, et nous aimerons le Christ. Le Christ, en effet, éternellement Dieu, est né homme dans le temps. Il est apparu aux hommes comme un homme et un fils d'homme. Étant Dieu dans l'homme, il a fait beaucoup de miracles. Il a beaucoup souffert, en tant qu'homme, de la part des hommes, mais il est ressuscité après la mort, parce que Dieu était dans l'homme. Il a encore passé quarante jours sur la terre, comme un homme avec les hommes. Puis, sous leurs yeux, il est monté au ciel comme étant Dieu dans l'homme, et il s'est assis à la droite du Père. Tout cela nous le croyons, nous ne le voyons pas. Nous avons reçu l'ordre d'aimer le Christ Seigneur que nous ne voyons pas, et nous crions tous: "J'aime le Christ".

Mais, si tu n'aimes pas ton frère que tu vois, comment peux-tu aimer, Dieu que tu ne vois pas1 Jn 4,20 ? En aimant les brebis, montre que tu aimes le Pasteur, car justement, les brebis sont les membres du Pasteur. Pour que les brebis soient ses membres, le Pasteur a consenti à devenir la brebis conduite à la boucherie, Is 53,7. Pour que les brebis soient ses membres, il a été dit de lui: Voici l'Agneau de Dieu qui enlève le péché du mondeJn 1,29. Mais cet agneau avait une grande force. Veux-tu savoir quelle force s'est manifestée chez cet agneau ? L'agneau a été crucifié, et le lion a été vaincu.

Voyez et considérez avec quelle puissance le Seigneur Christ gouverne le monde, lui qui a vaincu le démon par sa mort. Aimons-le donc, et que rien ne nous soit plus cher que lui.

Homélie de saint Augustin (+ 430)

Sermon Guelferbytanus 16, 1, PLS 2, 579

http://www.clerus.org/bibliaclerus

mardi 19 avril 2022

Saint Grégoire (532–604), Emmaüs et l'hospitalité aux voyageurs

 


Saint Grégoire trouve dans l’évangile de Luc 24 une véritable pédagogie de la connaissance de Dieu : Dieu se fait connaître grâce à des médiations sensibles comme la pratique de l'hospitalité, qui est l'exercice même de l'amour. 

Les disciples peuvent découvrir ce qu'ils cherchent, grandir dans leur adhésion et garder plus vigoureusement le mystère qui s'est livré à eux. Mais Dieu se fait connaître à travers des médiations sensibles comme la pratique de l'hospitalité, qui est l'exercice même de l'amour.

 


 

Extrait du Sermon 23 du 16 avril 591

Nous ne devons pas seulement offrir l'hospitalité aux voyageurs, mais les contraindre à l'accepter.

Les disciples mettent la table, offrent de quoi manger et Dieu, qu'ils n'avaient pas reconnu à l'explication de l'Écriture sainte, ils le reconnaissent à la fraction du pain.

Ce n'est donc pas en entendant les commandements de Dieu qu'ils ont été éclairés, mais en les mettant en pratique. N'est-il pas écrit : "Ce ne sont pas ceux qui écoutent la Loi qui sont justes devant Dieu, mais ceux qui la mettent en pratique seront justifiés", Romains 2,13 ? Ainsi, celui qui veut comprendre ce qu'il a entendu doit se hâter d'accomplir par ses œuvres ce qu'il a déjà réussi à comprendre. Vous le voyez, le Seigneur n'a pas été reconnu lorsqu'il parlait, mais il a daigné se laisser reconnaître quand on lui a donné à manger Aimez donc, frères très chers, l'hospitalité, aimez les œuvres qu'inspire la charité. Paul affirme à ce sujet : Que la charité fraternelle demeure en vous, et gardez-vous d'oublier l'hospitalité. Car c'est par elle que certains se sont rendus agréables [à Dieu] en hébergeant des anges, Hébreux 131-2. Pierre dit à ce propos "Soyez hospitaliers les uns pour les autres sans rechigner", 1 Pierre 4,9. Et la Vérité elle-même déclare : "J'ai été étranger, et vous m'avez reçu », Matthieu 25,35. Considérez, mes frères, quelle grande vertu est l'hospitalité. Recevez le Christ à vos tables, pour mériter d'être reçus par lui au banquet éternel. Donnez asile aujourd'hui au Christ qui se présente à vous en étranger, pour qu'au jour du jugement vous ne soyez pas pour lui comme des étrangers qu'il ne connaît pas, Luc 13,35, mais qu'il vous reçoive comme siens en son Royaume.

Lire : « Emmaüs vu par Paul Baudiquey

https://croire.la-croix.com/Definitions/Bible/Evangile/Emmaues-et-l-hospitalite-aux-voyageurs

lundi 18 avril 2022

Basile de Séleucie, Jésus entre toutes portes closes

 


         Saint Jean 20,19-31                                   

                                                                                                     Jésus entre toutes portes closes 




Ceux qui doutaient de sa Résurrection, sont alors frappés de stupeur. Mais Thomas, alors absent, demeure incrédule. Thomas désire voir Jésus de ses propres yeux. L’impatience le brûle quand il dit : - Si je ne mets mon doigt dans la marque des clous, et si je ne mets ma main dans son flanc, je ne croirai pas. Il veut être lui-même témoin du Seigneur. Et le Seigneur réapparaît, il dissipe la tristesse de son disciple et vient combler son attente : Jésus entre toutes portes closes.

Cet exploit inouï confirme sa résurrection inouïe. - Mets ton doigt dans la marque des clous, dit-il à son disciple Thomas. Je connais ton désir. Je sais ce que tu penses. Je connais tes doutes, et je t’ai fait attendre, pour mieux regarder ton impatience. - Mets ton doigt dans la marque des clous, mets ta main dans mon flanc, et ne sois plus incrédule, mais crois.

Alors Thomas le touche, toute sa défiance tombe, et comblé d’une foi sincère et de tout l’amour que l’on doit à son Dieu, il s’écrie : - Mon Seigneur et mon Dieu ! Et le Seigneur lui dit : - Parce que tu m’as vu, tu as cru ; heureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru !

Thomas, porte la nouvelle de ma résurrection à ceux qui ne m’ont point vu. Dis-leur qu’ils sont appelés par grâce, et contemple leur foi. - Heureux en vérité ceux qui n’ont pas vu et ont cru !

Telles sont les oeuvres de la grâce et la moisson de l’Esprit.

Ils ont suivi le Christ sans l’avoir vu, ils l’ont cherché et ils ont cru.

Ils l’ont reconnu avec les yeux de la foi, non les yeux du corps.

Ils n’ont pas mis leurs doigts dans les marques des clous, mais, par la grâce, ils se sont attachés au Christ et ils ont fait leur cette parole du Seigneur :

- Heureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru !


in Monique-Anne Giroux, Les chemins de la grâce, Collection Orantes de l'Assomption

dimanche 17 avril 2022

Saint Grégoire le grand (+604), Évangile selon Saint Jean Jn 20, 1-18

Pour le pape Grégoire, Marie de Magdala, Marie, sœur de Marthe, et la pécheresse dont parle Luc, ce sont un même personnage.

 

Que cherche Marie ?

Marie de Magdala était une pécheresse de la ville. Mais en aimant la vérité, elle effaça dans ses larmes les fautes qui la salissaient, et la Parole de vérité s’accomplit, qui disait : « Ses nombreux péchés lui sont pardonnés, car elle a beaucoup aimé ». Le péché l’avait transie ; l’amour l’embrasa du feu soudain.

 

Lorsqu’elle arrive au tombeau et qu’elle ne voit pas le corps du Seigneur, elle pense qu’on l’a enlevé et porte cette nouvelle aux disciples. Ceux-ci se rendent au tombeau, ils ne doutent pas de la parole de Marie.

Après quoi, les disciples s'en retournèrent chez eux.

Marie était restée dehors, près du tombeau, et elle pleurait.

Alors même que les disciples en partaient, cette femme ne voulait pas quitter le tombeau du Seigneur ! Elle ne l’avait pas trouvé ; elle le cherchait encore ; elle le cherchait et pleurait. Elle ne pouvait s’arracher à sa quête, quoi qu’elle pensât le Seigneur enlevé.

Et il advint qu’elle seule le vit, elle qui était restée pour le chercher. Rien de grand ne se fait sans persévérance.

« Celui qui tiendra jusqu’au bout, celui-là sera sauvé », Mt 10,22 

« Marie était restée dehors, près du tombeau, et elle pleurait.

Tout en pleurant elle se penche vers le tombeau ».

Elle avait pourtant déjà vu qu’il était vide et elle avait annoncé la disparition du Seigneur. Pourquoi se penche-t-elle encore, pourquoi désire-t-elle encore voir ? Parce que l’amour ne se contente pas d’un seul regard, l’amour est une quête toujours plus ardente. Elle l’a déjà cherché mais en vain. Elle s’obstine et finit par le découvrir.

 

Ct 3, 1-4                Dans le Cantique des Cantiques, l’Église disait du même Époux :

 « Au long de la nuit, j’ai cherché celui que mon cœur aime.

 Je l‘ai cherché  mais ne l’ai pas trouvé.

Il faut que je me lève et que je fasse le tour de la ville ;

Dans les rues et les places, avez-vous vu celui que mon cœur aime ? 

Je l‘ai cherché  mais ne l’ai pas trouvé.

Les gardes m’ont rencontrée, ceux qui font le tour de la ville:

« Avez-vous vu celui que mon cœur aime ? »

A peine les avais-je dépassés, j’ai trouvé celui que mon cœur aime. 

 

Quand cherchons-nous l’Aimé ? Nous le cherchons la nuit, car si notre esprit veille déjà sur Lui, nos yeux ne voient encore que l’ombre. Cherchons les pas de l’Aimé. Pourquoi se joue-t-il de nos recherches et vient-il si tard ? Pour qu’à sa vue, nous l’étreignions avec plus d’ardeur encore.

Ce désir d’amour faisait dire à David cette prière.

 

Ainsi aime Marie

Elle se penche encore sur la tombe où elle a déjà porté ses regards.

« Et elle voit deux anges vêtus de blanc, assis à l'endroit même où le corps de Jésus avait été déposé, l'un à la tête et l'autre aux pieds ».

Ange veut dire messager. Il fallait bien, après la passion, annoncer celui qui est Dieu avant les temps et homme à la fin des temps.

Un ange se tient à sa tête car «  Au commencement était le Verbe et le Verbe était auprès de Dieu et le Verbe était Dieu » nous dit l’apôtre Jean.

Un ange est assis à ses pieds car le Verbe s’est fait chair et il a demeuré parmi nous. Ces deux anges sont réunis à la place même où git le Seigneur ; tels les deux testaments qui annoncent de la même voix, la naissance, la mort et la résurrection du Seigneur.


Les anges demandent à Marie : "Femme, pourquoi pleures-tu?"

Elle leur répond: "On a enlevé mon Seigneur, et je ne sais où on l'a mis."

Dans le tombeau où seul gisait le corps du Seigneur, Marie cherchait le Seigneur, non son corps.

Tout en parlant, elle se retourne et elle voit Jésus qui se tenait là, mais elle ne savait pas que c'était lui.

Marie qui ignore encore la résurrection du Seigneur, se retourne pour voir Jésus. Le doute lui avait fait tourner le dos au Seigneur, elle ne pensait pas qu’il était ressuscité. Elle restait partagée entre l’amour et le doute. L’amour le lui montrait ; le doute le lui cachait.

Son ignorance paraît encore : « Elle ne savait pas que c'était Jésus. Femme,  lui dit Jésus,  pourquoi pleures-tu? Qui cherches-tu ? "

Mais elle, croyant qu'elle avait affaire au gardien du jardin, lui dit: "Seigneur, si c'est toi qui l'as enlevé, dis-moi où tu l'as mis, et j'irai le prendre."

Jésus lui dit: "Marie."

Il l’appelait tout à l’heure d’un nom commun à beaucoup de personnes :

- « Femme » et ne se laissait pas encore reconnaître.

Il l’appelle à présent pas son nom : - « Marie ! » l’invitant à reconnaître celui qui la connaît par son nom personnel.

Ainsi appelée par son nom, Marie reconnaît son Créateur, et aussitôt lui répond : "Rabbouni" – c’est-à-dire « Maître ».

Car c’était lui qu’elle cherchait au-dehors, et c’était lui qui lui demandait de le chercher au-dedans.

Elle se retourna et lui dit en hébreu: "Rabbouni" - ce qui signifie maître.

dimanche 10 avril 2022

St Jean Chrysostome homéiie pour les matines de Pâques

Que tout homme pieux et aimant Dieu jouisse de cette belle et 

lumineuse solennité ;
Que tout serviteur fidèle entre joyeux dans la joie de son maître.
Que celui sui s’est donné la peine de jeûner reçoive maintenant le dernier qui lui revient.
Que celui qui a travaillé dès la première heure reçoive à présent son juste salaire.


 

Si quelqu’un est venu après la troisième heure qu’il célèbre cette fête dans la reconnaissance.
Si quelqu’un a tardé jusqu’à près la sixième qu’il n’ait aucune hésitation, car il ne perdra rien.
S’il en est un qui a remis jusqu’à la neuvième qu’il approche sans hésitation et sans crainte.
Et s’il en est un qui a traîné jusqu’à la onzième heure qu’il ne craigne pas son nonchaloir.
Le Seigneur est généreux et il reçoit le dernier comme le premier : il admet au repos celui qui vient à la onzième heure comme le travailleur de la première.


Du dernier il a pitié et il prend soin du premier.
A celui-ci il donne, à l’autre il fait grâce,
Il reçoit l’œuvre et il accueille avec amour la bonne volonté. Il honore l’action , il loue la bonne disposition ;
Ainsi donc, entrez tous dans la joie de votre Maître et les premiers et les seconds , vous recevrez la récompense.
Riches et pauvres ensemble, soyez en fête
Abstinents et paresseux, honorez ce jour
Vous qui avez jeûné et vous qui ne l’avez pas fait, réjouissez-vous aujourd’hui
La table est chargée , goûtez -en tous . Le veau gras ne manque pas
Que personne ne s’en retourne avec sa faim . Tous goûtez au banquet de la foi !
 

Tous recueillez les richesses de la miséricorde
Que personne ne se lamente sur sa pauvreté car le Royaume commun est apparu.
Que personne ne se plaigne de ses péchés car le pardon a jailli du tombeau.
Que personne ne craigne la mort , car la mort su Sauveur nous a délivrés.
Il l’a éteinte, après avoir été retenu par elle .
Celui qui est descendu aux enfers a dépouillé l’Enfer.


Il l’a rendu amer pour avoir goûté à sa chair. Et cela Isaïe l’avait prédit ; l’Enfer , dit-il, a été rendu amer parce qu’il a été anéanti.
Il est devenu amer parce qu’il a été mis à mort ;
Il est devenu amer parce qu il a été terrassé ;
Il est devenu amer parce qu’il a été enchaîné.
Il avait pris un corps et il s’est trouvé devant un Dieu ;
Il avait pris de la terre et il a rencontré le ciel ;
Il avait pris ce qu’il avait vu et il est tombé à cause de ce qu’il n’avait pas vu :
O Mort , où est ton aiguillon ? Enfer où est ta victoire ?


Le Christ est ressuscité et tu as été précipité !
Le Christ est ressuscité et les démons sont tombés !
Le Christ est ressuscité et les anges sont la dans joie !
Le Christ est ressuscité et la vie règne !
.le Christ est ressuscité et il n’y a plus un mort au tombeau.
Car le Christ ressuscité des morts est devenu prémices de défunts
A Lui gloire et puissance, dans les siècles des siècles . Amen.

Martin de la Roncière, Trésors spirituels des chrétiens d'Orient et d'Occident, Pour prier chaque jour de l'année, Artège, p. 179--180.