vendredi 26 juillet 2024

Saint Augustin (+ 430), Dieu nous est connu par ses oeuvres

 

 17ème dimanche du temps ordinaire année B

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 6,1-15


Jésus était passé de l'autre côté du lac de Tibériade (appelé aussi mer de Galilée). Une grande foule le suivait, parce qu'elle avait vu les signes qu'il accomplissait en guérissant les malades. Jésus gagna la montagne, et là, il s'assit avec ses disciples.




Les miracles accomplis par notre Seigneur Jésus Christ sont vraiment des oeuvres divines. Ils disposent l'intelligence humaine à connaître Dieu en partant de ce qui est visible, puisque nos yeux sont incapables de le voir en raison même de sa nature. En outre, les miracles que Dieu opère pour gouverner l'univers et organiser toute sa création ont tellement perdu de leur valeur à force de se répéter, que presque personne ne prend la peine de remarquer quelle oeuvre merveilleuse et étonnante il réalise dans n'importe quelle petite graine de semence.

C'est pourquoi il s'est réservé, dans sa bienveillance, d'accomplir au moment choisi certaines actions en dehors du cours habituel des choses et de l'ordre de la nature. Ainsi, ceux qui tiennent pour négligeables les merveilles de tous les jours, restent stupéfaits à la vue d'oeuvres qui sortent de l'ordinaire et cependant ne l'emportent pas sur celles-là. Gouverner l'univers est en vérité un miracle plus grand que de rassasier cinq mille hommes avec cinq pains! Personne toutefois ne s'en étonne, alors que l'on s'extasie devant un miracle de moindre importance parce qu'il sort de l'ordinaire. Qui, en effet, nourrit aujourd'hui encore l'univers sinon celui qui, avec quelques grains, crée les moissons ?

Le Christ a donc fait ce que Dieu fait. Usant de son pouvoir de multiplier les moissons à partir de quelques grains, il a multiplié cinq pains dans ses mains. Car la puissance se trouvait entre les mains du Christ, et ces cinq pains étaient comme des semences que le Créateur de la terre multipliait sans même les confier à la terre.

Cette oeuvre a donc été placée sous les sens pour élever l'esprit, et elle s'est offerte aux regards pour exercer l'intelligence. Il nous est ainsi devenu possible d'admirer le Dieu invisible en considérant ses oeuvres visibles, Rm 1,20. Après avoir été éveillés à la foi et purifiés par elle, nous pouvons même désirer voir sans les yeux du corps l'Être invisible que nous connaissons à partir du visible.

En effet, Jésus a fait ce miracle pour qu'il soit vu de ceux qui se trouvaient là, et ils l'ont mis par écrit pour que nous en ayons connaissance. Ce que les yeux ont fait pour eux, la foi le fait pour nous. Aussi bien, nous reconnaissons en notre âme ce que nos yeux n'ont pu voir et nous avons reçu un plus bel éloge, puisque c'est de nous qu'il a été dit : Heureux ceux qui croient sans avoir vu, Jn 20,29 !

D'après l'évangile, les gens dirent, à la vue du signe qu'il venait d'opérer : Celui-ci est vraiment un prophète, Jn 6,14. Or, il était le Seigneur des prophètes, l'inspirateur des prophètes, le sanctificateur des prophètes. Mais il était aussi un prophète, comme cela avait été dit à Moïse : C'est un prophète comme toi que je leur susciterai, Dt 18,18.

Le Seigneur est prophète, il est la Parole de Dieu et, sans la Parole de Dieu, aucun prophète ne prophétise. La Parole de Dieu est avec les prophètes et la Parole de Dieu est prophète. Dans le passé, les hommes ont mérité d'avoir des prophètes inspirés et remplis de la Parole de Dieu, He 1,1 ; nous, nous avons mérité d'avoir pour prophète la Parole même de Dieu.

Commentaire sur l'évangile de Jean, 24, 1.6.7; CCL 36, 244.247.
Clerus.org

samedi 20 juillet 2024

Frère Jean-Marie, ils étaient comme des brebis sans berger


Saint Marc 6,30-34

"Il étaient comme des brebis sans berger"

En ce temps-là, après leur première mission, les Apôtres se réunirent auprès de Jésus, et lui annoncèrent tout ce qu’ils avaient fait et enseigné.

Il leur dit : « Venez à l’écart dans un endroit désert, et reposez-vous un peu. » De fait, ceux qui arrivaient et ceux qui partaient étaient nombreux, et l’on n’avait même pas le temps de manger. Alors, ils partirent en barque pour un endroit désert, à l’écart.

Les gens les virent s’éloigner, et beaucoup comprirent leur intention. Alors, à pied, de toutes les villes, ils coururent là-bas et arrivèrent avant eux. En débarquant, Jésus vit une grande foule. Il fut saisi de compassion envers eux, parce qu’ils étaient comme des brebis sans berger. Alors, il se mit à les enseigner longuement.

La Parole de Dieu, aujourd’hui, nous centre sur la personne de Jésus.

Le contempler, c’est découvrir en lui le bon pasteur, promis par le prophète Jérémie. Le recevoir ­ comme St Paul ­ c’est accueillir sa Paix, qui nous réconcilie avec Dieu et avec nos frères.

Les apôtres reviennent vers Jésus rendant compte de leur première mission. Il les invite à partir à l’écart pour s’y reposer avec lui. Jésus les appelle, nous appelle à nous arrêter, à prendre distance, à nous reposer pour laisser respirer notre vie intérieure en sa présence. Sommes-nous prêts à déposer notre fardeau de responsabilités et de services pour accueillir sa paix dans le silence de l’amour, le fin silence de sa présence, qui recueille et donne sens à tous nos engagements ?

La foule qui presse Jésus n’est pas abandonnée : l’éloignement de Jésus oblige chacun à creuser son désir et purifier son attente, à poursuivre sa recherche du Christ : car la patience est l’approfondissement de l’amour dans le temps. Jésus se laisse rejoindre et « est remué jusqu’aux entrailles » pour tous ceux qui sont « comme des brebis sans berger » et cherchent en lui un guide pour leur vie et leur mort.

Jésus se met à les enseigner abondamment : peut-être pour leur rappeler ce que chante le psaume 22 : «  Le Seigneur est mon berger (…) passerai-je un ravin de ténèbres, je ne crains aucun mal » : Dieu est notre seul Berger et Père, et Jésus nous le manifeste par tout ce qu’il est.

St Paul nous partage cette compréhension du Christ en son mystère divin, répétant cette exclamation inouïe « En sa personne il a tué la haine ». Avec St Paul dévoilant le mystère de la Croix nous affirmons que l’eau et le sang ­ le baptême et l’eucharistie – jaillis du corps du Christ crucifié ont submergé le péché, l’hostilité de l’orgueil qui nous oppose à Dieu et entre nous, et l’ont anéantit.

En Jésus qui nous associe à sa Pâque, Dieu nous donne le Bon Pasteur et guide qui nous rassemble en un seul Corps par la communion à sa mort et à sa résurrection. L’eucharistie nous fait entrer en plénitude dans le mystère de la personne du Christ. Ouvrons grand notre cœur « à la longueur, la largeur, la hauteur et la profondeur de cette communication du Dieu-avec-nous. Ainsi la foi, l’espérance et l’amour déposés en nos cœurs par l’Esprit-Saint feront de nous les témoins de sa Paix, qui nous rassemble en un seul Corps.

Frère Jean-Marie
Moine du Bec

samedi 6 juillet 2024

Théophylacte (+ 1109), Homélie consignes aux missionnaires

 


15ème dimanche du temps ordinaire


Évangile de Jésus Christ selon 

saint Marc 6,7-13


Jésus appelle les Douze, et pour la première fois il les envoie deux par deux. Il leur donnait pouvoir sur les esprits mauvais.


En plus de l'enseignement qu'il a donné lui-même, le Seigneur a envoyé les Douze deux par deux, pour que leur zèle en soit augmenté, car, envoyés seuls, ils auraient pu manquer d'ardeur. Si, d'autre part, il les avait envoyés à plus de deux, il n'aurait pas eu assez d'Apôtres pour parcourir les nombreux villages.

Il les envoie donc deux par deux: Deux hommes valent mieux qu'un seul, Qo 4,9, dit l'Ecclésiaste. Il leur prescrit aussi de ne rien emporter, ni sac, ni pièces de monnaie, ni pain, leur enseignant par ces paroles à mépriser les richesses. Ainsi mériteront-ils le respect de ceux qui les verront et, en ne possédant rien en propre, ils leur apprendront la pauvreté. Qui donc, à la vue d'un Apôtre sans besace ni pain - qui est la chose la plus nécessaire - ne se laisserait pas fléchir et ne se dépouillerait pas pour vivre dans la pauvreté ?

Il leur ordonne de rester dans une maison pour ne pas s'acquérir une réputation d'hommes inconstants que la gloutonnerie fait passer d'une famille à l'autre. Il leur dit par ailleurs de quitter ceux qui ne les reçoivent pas, en secouant la poussière de leurs pieds. Ils leur montreront ainsi qu'ils ont parcouru un long chemin pour eux sans aucune utilité, ou qu'ils ne gardent rien d'eux, pas même la poussière, qu'ils secouent au contraire en témoignage contre eux, c'est-à-dire en signe de désaveu.

"Amen, je vous le dis, au jour du jugement, Sodome et Gomorrhe seront traitées moins sévèrement, Mt 10,15 que ceux qui ne vous auront pas reçus." Car, pour avoir subi une punition en ce monde, les habitants de Sodome seront frappés d'une peine moins sévère dans l'autre. A quoi il faut encore ajouter que les Apôtres ne leur ont pas été envoyés. Or ceux qui n'auront pas reçu les Apôtres subiront des peines plus lourdes.

Ils partirent et proclamèrent qu'il fallait se convertir. Ils chassaient beaucoup de démons, faisaient des onctions d'huile à de nombreux malades, et les guérissaient, Mc 6,12-13. Marc est le seul à rapporter que les Apôtres faisaient des onctions d'huile. A propos de cette pratique, Jacques, le frère du Seigneur, dit dans son épître catholique: Si l'un de vous est malade, qu'il appelle ceux qui exercent dans l'Eglise la fonction d'Anciens. Ils prieront sur lui après avoir fait une onction d'huile, Jc 5,14. Ainsi l'huile sert-elle à soulager la souffrance. Elle donne la lumière et apporte l'allégresse; elle symbolise la bonté de Dieu, et la grâce de l'Esprit Saint par laquelle nous sommes délivrés de nos souffrances et nous recevons la lumière, la joie et l'allégresse spirituelles.

 

Commentaire sur l'évangile de Marc, PG 123, 548-549.

Clerus, Homéliaires.

Syméon Le Nouveau Théologien, Croire en Jésus aujourd'hui sans le voir

Évangile de Jésus Christ selon saint Marc 6,1-6

Jésus est parti pour son pays, et ses disciples le suivent. Le jour du sabbat, il se mit à enseigner dans la synagogue. Les nombreux auditeurs, frappés d'étonnement, disaient : 

"D'où cela lui vient-il ? Quelle est cette sagesse qui lui a été donnée, et ces grands miracles qui se réalisent par ses mains ?'



Frères et Pères, beaucoup ne cessent de dire - et leurs paroles parviennent à nos oreilles - : "Si nous avions vécu au temps des Apôtres, et si nous avions été jugés dignes de voir le Christ comme eux, nous serions aussi devenus des saints comme eux." Ils ignorent qu'il est le même, lui qui parle, maintenant comme alors, dans tout l'univers. Car s'il n'était pas le même jadis et maintenant, identiquement Dieu à tous égards, par ses opérations et par ses rites, comment le Père se montrerait-il toujours présent dans le Fils, et le Fils dans le Père, par l'Esprit, puisque le Christ dit: Mon Père est à l'oeuvre jusqu'à maintenant, et moi aussi je suis à l'œuvre, Jn 5,17 ?

Mais quelqu'un dira peut-être : "Ce n'est pas la même chose de l'avoir vu lui-même corporellement, en ce temps-là, ou d'entendre uniquement ses paroles aujourd'hui et recevoir un enseignement sur lui et sur son Royaume. Et je réponds : "La situation actuelle n'est sûrement pas la même que celle d'alors, mais c'est la situation d'aujourd'hui, de maintenant, qui est beaucoup plus heureuse. Elle nous conduit plus facilement à une foi et une conviction plus profondes que le fait de l'avoir vu et entendu alors corporellement. "

Alors, en effet, c'était un homme qui apparaissait aux Juifs sans intelligence, un homme d'humble condition ; mais maintenant c'est un Dieu véritable qui nous est prêché. Alors, il fréquentait corporellement les publicains et les pécheurs et mangeait avec eux; mais maintenant il est assis à la droite de Dieu le Père, n'ayant jamais été séparé de lui en aucune manière. Nous croyons qu'il nourrit le monde entier et nous disons, si du moins nous sommes croyants, que sans lui rien ne s'est fait. Alors, même les gens de rien le méprisaient en disant : N'est-il pas le fils de Marie, Mc 13,15  et de Joseph, Lc 4,22, le charpentier, Mt 13,55 ? Mais maintenant les rois et les princes l'adorent comme le Fils du vrai Dieu, et vrai Dieu lui-même, et il a glorifié et glorifie ceux qui l'adorent en esprit et en vérité, même s'il les corrige souvent quand ils pèchent. Eux qui étaient d'argile, il les rend de fer, les plaçant au-dessus de toutes les nations qui sont sous le ciel. Alors, il était tenu pour un homme corruptible et mortel parmi tous les autres. Dieu sans forme et invisible, il a reçu, sans subir d'altération ni de changement, une forme dans un corps humain et s'est montré totalement homme, en n'offrant aux regards rien de plus que les autres hommes. Mais il a mangé, bu, dormi, transpiré et s'est fatigué; il a fait tout ce que font les hommes, excepté le péché.

C'était une grande chose de reconnaître et de croire qu'un homme pareil était Dieu, celui qui a fait le ciel même, la terre et tout ce qu'ils contiennent. C'est pourquoi, lorsque Pierre a dit: Tu es le Fils du Dieu vivant, le Maître l'a déclaré bienheureux en ces termes : Heureux es-tu, Simon, fils de Yonas : ce n'est pas la chair et le sang qui t'ont révélé cela - c'est-à-dire qui te l'ont fait voir et dire - mais mon Père qui est aux cieux, Mt 16,16-17.

Ainsi, celui qui actuellement écoute chaque jour Jésus proclamer et annoncer par les saints évangiles la volonté de son Père béni, sans lui obéir avec crainte et tremblement et sans garder ses commandements, n'aurait pas plus accepté alors de croire en lui, absolument pas, même s'il avait été présent, s'il l'avait vu lui-même et entendu prêcher. Il est même à craindre que, dans sa totale incrédulité, il l'aurait regardé comme un ennemi de Dieu, non comme le vrai Dieu, et l'aurait blasphémé.

Catéchèse de Syméon le Nouveau Théologien (+ 1022)
Catéchèses, 29, version remaniée de SC 113, 164-169.

Clerus, Homéliaires