Pêcheurs à Merimendroso, Madagascar
Vous avez entendu, mes frères que Pierre et André ont laissé leurs filets pour suivre le Rédempteur au premier appel de sa voix… Peut-être quelqu’un se dira-t-il tout bas : Pour obéir à l’appel du Seigneur, qu’est-ce que ces deux pêcheurs ont abandonné, eux qui n’avaient presque rien ? Mais en cette matière, nous devons considérer les dispositions du cœur plutôt que la fortune. Il a beaucoup laissé celui qui n’a rien retenu pour lui ; il a beaucoup laissé celui qui a tout abandonné, même si c’est peu de chose. Nous, ce que nous possédons, nous le conservons avec passion, et ce que nous n’avons pas, nous le poursuivons de nos désirs. Oui, Pierre et André ont beaucoup laissé, puisque l’un et l’autre ont abandonné jusqu’au désir de posséder. Ils ont beaucoup abandonné, puisqu’en renonçant à leurs biens, Ils ont aussi renoncé à leurs convoitises. En suivant le Seigneur, ils ont renoncé à tout ce qu’ils auraient pu désirer s’ils ne l’avaient pas suivi.
Que personne donc, lorsqu’il voit certains quitter de grands biens, ne se dise : Je voudrais bien imiter ceux qui se détachent ainsi du monde, mais je n’ai rien que je puisse quitter. Vous abandonnez beaucoup, mes frères, lorsque vous renoncez aux désirs terrestres. Nos biens extérieurs, même s’ils sont petits, suffisent aux yeux du Seigneur. C’est le cœur qu’il regarde, et non la fortune. Il ne pèse pas la valeur marchande du sacrifice, mais l’intention de celui qui l’offre. A considérer les biens extérieures, nos saints marchands ont obtenu la vie éternelle, qui est celle des anges, pour une barque et des filets. Le Royaume de Dieu n’a as de prix, et cependant il te coûte exactement ce que tu as. Il a coûté à Pierre et à André l’abandon d’une barque et de filets ; il a coûté à la veuve deux piécettes d’argent, Lc 21,2 ; il a coûté à quelqu’un d’autre un verre d’eau fraîche, Mt 10,42. Le Royaume de Dieu, avons-nous dit, te coûte ce que tu as. Voyez-donc, mes frères, quoi de plus facile à acquérir et quoi de plus précieux à posséder ?
Mais peut-être n’as-tu même pas un verre d’eau fraîche à offrir au pauvre qui en a besoin. Même dans ce cas la Parole de Dieu nous apaise. Car, à la naissance du Rédempteur, les habitants du ciel se sont montrés en s’écriant : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur terre aux hommes de bonne volonté », Lc 2,14. En effet, aux yeux de Dieu, la main n’est jamais dépourvue de présent si le secret du cœur est rempli de bonne volonté. D’où cette parole du psalmiste : « ils sont en moi, mon Dieu, les présents que j’offrirai à ta louange », Ps 56,13 Vulg. C’est comme s’il disait ouvertement : Même si je n’ai rien d’extérieur à t’offrir, je trouve cependant, en moi-même, ce que je déposai sur l’autel à ta louange. Car si tu ne te nourris pas de nos dons, tu te plais aux offrandes du cœur.
Homélie 5 sur l’Evangile, PL 76, 1093-1094, in Daniel Bourguet, L’évangile médité par les Pères, Marc, 17-18, Veillez et priez, Editions olivétan.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire