16 avril 1903 décès du Père Picard
Passy, 22 octobre 1894.
Il n’est pas
nécessaire d’accomplir de grandes choses pour être riches selon Dieu. Il suffit
d’offrir tout ce qu’on est et tout ce qu’on fait. Alors Notre Seigneur marque
de son sceau notre prière et nos actes de dévouement. Ce rien que le monde
méprise, et que quelquefois les religieuses ont l’air de mépriser parce
qu’elles n’y font pas attention, ce rien, dès l’instant qu’il est offert à
notre Seigneur, porte pour ainsi dire en lui une goutte de son sang, et il a un
mérite immense pour le ciel.
Le degré de
gloire que vous posséderez un jour est attaché à ces riens, à ces petits actes
que Dieu recueille. Et au moment du jugement, vous serez étonnées et vous
direz : « Comment ai-je pu acquérir un tel degré de
gloire ? ». Et Dieu vous répondra : « C’est en faisant les
choses les plus simples, les plus ordinaires. Tu me les as données, je les ai
marqué du sang de mon Fils. »
Il y a
beaucoup de sœurs qui emploient leur temps à faire le contraire de ce qu’elles
devraient faire ; à faire autre chose que ce qu’on leur demande ; à
perdre le temps que Dieu leur a donné. Nous sommes faibles, nous croyons
impossible de veiller sur nous-mêmes, et nous ne pensons pas que nous pouvons
arriver à des choses très grandes en accomplissant des actes très petits. Si
nous y croyions, nous veillerions sur nous, et nous ne laisserions pas ravir
les grâces de Dieu par le tentateur.
Tous, dans un
coin de notre être, nous avons une petite tendance à l’oisiveté. La paresse
laisse perdre des trésors de grâce. Est-ce que ce n’est pas un mal de ne rien
faire ? Le repos n’est ni la paresse, ni l’oisiveté, et l’on peut offrir à
Dieu son repos comme son activité. Mais je ne crois pas qu’on puisse dire à
Notre Seigneur : « Je vous offre la paresse à laquelle je viens de me
livrer ». Se reposer, c’est bien. Mais la paresse nous fait perdre les
trésors de la grâce. Rien ne repose comme un peu de distraction. Il y a des
distractions qui sont dans l’ordre, les temps de détente communautaire ou
certaines études, et nous pouvons les offrir à Notre Seigneur. Mais nous
n’oserions pas offrir les distractions que nous avons dans la prière ou dans le
travail.
Néanmoins,
les moments de détente nécessaires pour pouvoir porter le poids de la vie,
peuvent être sources de mérites. Rien n’est méritoire comme les temps de
détente communautaire bien vécus. Une sœur qui offre ce temps communautaire à
Notre Seigneur lui dit : « Je vais être tellement à la disposition de
mes sœurs que je les distrairai si j’en
suis capable ; je les intéresserai si je peux ; je les écouterai –
c’est toujours possible – et souvent c’est le meilleur moyen de les distraire. Je
ne les contredirai en rien ». Mais
quand on se permet de dire des paroles vulgaires ou déplacées, quand on cherche
son intérêt personnel, on sort de l’esprit religieux, et la rencontre
communautaire est absolument nulle, elle n’est pas bénie par Notre Seigneur.
Et que de
temps perdu en susceptibilité à se comparer aux autres, en défendant nos
droits. La susceptibilité qui est inspirée par l’amour-propre, inspire aussi
les petites ambitions, les petites prétentions, les petites rivalités. Non
seulement on perd les trésors de la grâce, mais on en arrive à offenser notre
divin Sauveur en sortant de la voie qu’Il nous a tracée. N’ayez qu’une
prétention, celle de tout donner à notre divin Maître, ne gardant rien pour
vous. Alors vous entrerez dans la voie de la charité parfaite, en faisant bien
les choses les plus ordinaires, vous acquerrez des mérites immenses.
Nous ne
sommes pas appelées à faire des choses extraordinaires. Se lever à l’heure
indiquée, se coucher de même, ce n’est pas difficile ; étudier ou lire avec
plus ou moins de succès ; être bon pour toutes les personnes qui nous
entourent, c’est très simple. C’est par ces actes si simples, si ordinaires,
que vous pourrez devenir des saintes, et des saintes à canoniser, parce que
Celui qui est l’auteur de tous les mérites répand à profusion les grâces sous
vos pas.
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