vendredi 28 février 2025

Saint Ephrem le Syrien, jeûne, charité et vérité

 

Saint Ephrem le Syrien, Jeûne, charité et vérité

Mercredi des cendres 5 mars 2025

Le Carême : un temps pour renouveler notre foi, notre espérance et notre charité

Can. 1252 - Sont tenus par la loi de l'abstinence, les fidèles qui ont quatorze ans révolus ; mais sont liés par la loi du jeûne tous les fidèles majeurs jusqu'à la soixantième année commencée.

L’Église catholique propose à ses fidèles de jeûner (de se passer d’un repas) le mercredi des cendres et le Vendredi saint, et de s’abstenir de viande les vendredis du carême. En nous privant du nécessaire, nous nous rappelons que Dieu nous est encore plus nécessaire. Le jeûne aide à acquérir la liberté du cœur.


Cela signifie que nous souhaitons ne pas être centrés sur nous-mêmes, sur nos désirs, sur nos besoins. Le jeûne nous aide ainsi à nous ouvrir à Dieu et aux autres, et par conséquent nous stimule dans la prière.


Pour une personne l'effort sera de prendre la parole pour entrer en relations avec ceux qu'elle rencontre.

Pour une autre, ce sera de se taire à différents moments.

Le choix de ce qui va aider à retrouver davantage l'union à Dieu est personnel à chacun selon ce qu'il est, ces difficultés et lacunes mais aussi parfois c'est une invitation à réguler un don trop généreux et désordonné qui empêche un temps d'oraison.



Jeûne, 
charité et vérité

Saint Éphrem le Syrien promet

du trente pour un au jeûne,

du soixante pour un à la charité

et du cent pour un à la seule vérité.

La charité rapproche de Dieu plus que le jeûne,

mais la charité elle-même est inférieure à la vérité,

parce que, sans la pureté de l’intention,

l’amour profond, le désintéressement et l’oubli de soi,

un geste de charité même matériellement très généreux,

peut être de faible prix aux yeux de Dieu.

Réfugiez-vous dans la vérité,

car c’est elle qui consolide vos remparts.

Pour saint Éphrem et les Pères du désert, la vérité recouvre la pureté de l’intention et implique la fidélité aux Paroles de Dieu. Ce que Dieu nous demande, c’est de croire aux divines Écritures et de pratiquer leurs paroles dans toute la mesure de nos forces.

 Saint Éphrem le Syrien, 4ème siècle. Originaire de Nisibe en syrie. Diacre et docteur de l’Église.       

Soeur Monique-Anne Giroux, Le chemin de la grâce, T 2, 182. Collection des ORANTES DE L ASSOMPTION

Vidéo sur le sens du carême réalisée par soeur Monique-Anne GIROUX sur Orantes de l'Assomption youtube

Saint Cyrille d'Alexandrie +444, Etre lucide à l'égard de soi-même


 


Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 6,39-45

Jésus s'adressait à la foule en paraboles : 

"Un aveugle peut-il guider un autre aveugle ? 

Ne tomberont-ils pas tous deux dans un trou ? 

Le disciple n'est pas au-dessus du maître ; 

mais celui qui est bien formé sera comme son maître."





Les bienheureux disciples étaient destinés à devenir les guides et les maîtres spirituels de la terre entière. Ils devaient donc faire preuve, plus que les autres, d'une éminente piété, être familiarisés avec la manière de vivre évangélique et entraînés à pratiquer toute oeuvre bonne. Ils auraient à transmettre à ceux qu'ils instruiraient la doctrine exacte, salutaire et strictement conforme à la vérité, après l'avoir d'abord contemplée eux-mêmes, et avoir laissé la lumière divine éclairer leur intelligence.

Sans quoi, ils seraient des aveugles conduisant d'autres aveugles. Car ceux qui sont plongés dans les ténèbres de l'ignorance ne peuvent pas conduire à la connaissance de la vérité les hommes souffrant de cette même ignorance. Le voudraient-ils d'ailleurs, qu'ils rouleraient tous ensemble dans l'abîme de leurs passions.

Aussi le Seigneur a-t-il voulu éteindre la passion ostentatoire de la vantardise que l'on trouve chez tant de gens, et les dissuader de rivaliser avec leurs maîtres pour les dépasser en estime. Il leur a dit: Le disciple n'est pas au-dessus de son maître, Lc 6,39. Même s'il arrive à certains d'atteindre un degré de vertu égal à celui de leurs maîtres, Ils se conformeront à la modestie dont ceux-ci font preuve, et ils les imiteront. Paul, à son tour, nous en donne la certitude quand il dit: Montrez-vous mes imitateurs, comme je le suis moi-même du Christ, 1 Co 11,1.

Eh bien, pourquoi juges-tu, alors que le Maître ne juge pas encore? Car il n'est pas venu juger le monde, mais lui faire grâce. Entendue dans le sens que je viens précisément d'indiquer, la parole du Christ devient : "Si je ne juge pas, ne juge pas non plus, toi qui es mon disciple. Il se peut que tu sois coupable de fautes plus graves que celui que tu juges. Quelle ne sera pas ta honte quand tu en prendras conscience! "

Le Seigneur nous donne le même enseignement dans une autre parabole où il dit : Qu'as-tu à regarder la paille dans l'oeil de ton frère, Lc 6,41 ? Il nous convainc par des arguments irréfutables de ne pas vouloir juger les autres, et de scruter plutôt nos coeurs. Ensuite il nous demande de chercher à nous libérer des passions qui y sont installées, en demandant cette grâce à Dieu. C'est lui, en effet, qui guérit ceux qui ont le coeur brisé et nous délivre de nos maladies spirituelles. Car si les péchés qui t'accablent sont plus grands et plus graves que ceux des autres, pourquoi leur fais-tu des reproches sans te soucier des tiens ?

Tous ceux qui veulent vivre avec piété, et surtout ceux qui ont charge d'instruire les autres, tireront donc nécessairement profit de ce précepte. S'ils sont vertueux et tempérants, donnant précisément par leurs actions l'exemple de la vie évangélique, ils reprendront avec douceur ceux qui ne se sont pas résolus à agir de même, leur remontrant qu'ils ne prennent pas pour modèles les manières de vivre conformes à la vertu des maîtres.

Commentaire sur l'évangile de Luc, 6; PG 72, 601-604

samedi 22 février 2025

Saint Augustin, Agir dans l'amour et la vérité

 

7e dimanche du temps ordinaire C


Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
6,27-38

 

Jésus déclarait à la foule : 

"Je vous le dis, à vous qui m'écoutez : 

Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent."





Toutes les voies du Seigneur sont amour et vérité pour qui veille à son alliance et à ses lois (
Ps 24,10). Ce que le psaume dit de l'amour et de la vérité est de première importance.  Il parle de l'amour, car Dieu ne regarde pas nos mérites mais sa bonté, en vue de nous pardonner nos péchés et de nous promettre la vie éternelle. Il parle aussi de la vérité, parce que Dieu ne manque jamais de tenir ses promesses.

Conformons-nous donc à ce divin modèle et imitons Dieu qui nous a manifesté son amour et sa vérité : son amour en nous remettant nos péchés, sa vérité en réalisant ses promesses. Comme lui, accomplissons en ce monde des oeuvres pleines d'amour et de vérité. Soyons bons envers les malades, les pauvres et même envers nos ennemis.

Vivons dans la vérité en évitant de faire le mal. Ne multiplions pas les péchés, car celui qui présume de la bonté de Dieu, laisse s'introduire en lui la volonté de rendre Dieu injuste. Il se figure que, même s'il s'obstine dans ses péchés et refuse de s'en repentir, Dieu viendra quand même lui donner une place parmi ses fidèles serviteurs.

Mais serait-il juste que Dieu te mette à la même place que ceux qui ont renoncé à leurs péchés, alors que tu persévères dans les tiens ? Veux-tu être injuste au point de rendre Dieu injuste ? Pourquoi donc veux-tu le plier à ta volonté ? Soumets-toi plutôt à la sienne.

Qui donc met en pratique ce que je viens de dire, sinon un petit nombre d'hommes, dont il est dit : Celui qui persévérera jusqu'à la fin, celui-là sera sauvé (
Mt 24,13) ? Le psalmiste dit justement à ce propos : Qui recherchera l'amour et la vérité du Seigneur pour sa gloire (Ps 60,8 latin) ? Que signifie: pour sa gloire ! Il suffisait de dire :   Qui recherchera l'amour et la vérité du Seigneur!  Pourquoi ajoute-t-il :   pour sa gloire ! En voici la raison. Beaucoup cherchent à s'instruire de l'a mour du Seigneur et de sa vérité dans les Livres saints. Mais une fois qu'ils y sont parvenus, ils vivent pour eux, non pour lui. Ils recherchent leurs propres intérêts, non ceux de Jésus Christ. Ils prêchent l'amour et la vérité et ne les pratiquent pas. Ils les connaissent pourtant, puisqu'ils les prêchent ; ils ne pourraient d'ailleurs pas les enseigner sans les connaître.

Quant à celui qui aime Dieu et le Christ, lorsqu'il prêche la vérité et l'amour divins, il les recherche pour Dieu et non dans son propre intérêt. Il ne prêche pas pour en retirer des avantages matériels, mais pour le bien des membres du Christ, c'est-à-dire de ceux qui mettent leur foi en lui. Il leur dispense ses connaissances en esprit de vérité, de sorte que le vivant n'ait plus sa vie centrée sur lui-même, mais sur celui qui est mort pour tous (
2Co 5,15).

 
Agir dans l'amour et la vérité

Homélie de
saint Augustin (+ 430) sur le psaume 60

Homélies sur les psaumes, Ps 60, 9; CCL 39, 771.

Clerus.org

 

Luc 6, 27 - 31

27Mais à vous qui m'écoutez je dis : Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, 28bénissez ceux qui vous maudissent, priez pour ceux qui vous calomnient. 29A celui qui te frappe sur une joue, présente encore l'autre; et à celui qui t'enlève ton manteau, n'empêche pas (de prendre) aussi ta tunique. 30Donne à quiconque te demande, et à qui t'enlève ce qui est à toi, ne réclame point. 31Et ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le pareillement pour eux. 

Bède le Vénérable

Après avoir prédit à ses disciples ce qu'ils pourraient avoir à souffrir de la part de leurs ennemis, il leur apprend maintenant la conduite qu'ils devront tenir à l'égard de ces mêmes ennemis : «Mais je vous dis, à vous qui m'écoutez».

 

Saint Ambroise

Ce n'est point sans raison qu'il a fait précéder d'actions toute célestes d'aussi sublimes enseignements. Il voulait enseigner aux peuples, fortifiés par ces miracles de la puissance divine, à s'avancer comme sur les pas de ces prodiges, au delà des limites étroites de la loi. D'ailleurs, de ces trois grandes vertus, la foi, l'espérance et la charité, c'est la charité qui est la première ( 1 Co 13, 13; Ct 1, 4), et c'est elle que le Sauveur nous recommande, lorsqu'il dit : «Aimez vos ennemis».

Saint Basile

C'est le propre des ennemis de nuire et de tendre des embûches; tous ceux donc qui, de quelque manière que ce soit, cherchent à nuire quelqu'un, sont ses ennemis.

 

Saint Cyrille

Il fallait pénétrer de ces divins enseignements les saints docteurs qui devaient prêcher la parole du salut par tout l'univers ; car s'ils s'étaient laissé aller à tirer vengeance de leurs persécuteurs, jamais ils ne les auraient appelés à la connaissance de la vérité.

 

Saint Jean Chrysostome

Il ne dit pas : Ne haïssez point, mais: «Aimez», et non seulement : «Aimez», mais : «Faites du bien à ceux qui vous haïssent».

 

Saint Basile

Or, l'homme étant composé d'une âme et d'un corps, nous faisons du bien à l'âme de nos ennemis en les reprenant, en les avertissant, en les amenant, comme par la main, à se convertir à une vie meilleure, et nous faisons du bien à leur corps, en leur procurant les choses nécessaires à la vie.

 

Saint Jean Chrysostome

Ceux qui blessent ainsi leur âme sont bien plus dignes de larmes amères que de malédictions;  quoi de plus détestable, en effet, qu'une âme d'où sortent les malédictions, quoi de plus immonde que la langue qui les profère ? O homme, ne distillez pas ainsi le venin de l'aspic, ne vous changez pas en bête féroce ; Dieu vous a donné la bouche, non pour déchirer, mais pour guérir les plaies de vos frères ; et quant à vos ennemis, il vous ordonne de les mettre au rang de vos amis, et de vos amis les plus chers, de ceux pour lesquels vous avez coutume de prier :  «Priez pour ceux qui vous persécutent», etc. Mais, au contraire, la plupart de ceux qui se prosternent la face contre terre, les mains étendues, au lieu de supplier Dieu de leur pardonner leurs crimes, l'implorent contre leurs ennemis, c'est-à-dire qu'ils se percent de leurs propres mains. Quoi, vous priez celui qui a défendu les imprécations contre les ennemis, d'écouter les malédictions que vous proférez contre eux, et vous espérez d'être exaucés, vous qui provoquez sa juste colère, en frappant votre ennemi devant son roi? car vous le frappez réellement, sinon avec la main, au moins par vos paroles. Que faites-vous donc, ô homme? Vous venez implorer le pardon de vos péchés, et votre bouche est remplie d'amertume, ah ! croyez-moi, c'est le temps de la pacification, de la prière, des gémissements, et non celui de la fureur. 

 

Bède le Vénérable

Mais on se demande alors, pourquoi nous trouvons dans les prophètes tant d'imprécations contre les ennemis ? Nous répondons que, par ces imprécations, les prophètes ont simplement prédit ce qui devait arriver; ainsi ce n'étaient point des voeux qui exprimaient leurs désirs, mais des prédictions qui leur étaient révélées par l'Esprit saint.

 

Saint Cyrille

L'ancienne loi défendait toute offense envers le prochain, ou si on en avait été offensé le premier, elle défendait de dépasser dans la vengeance la mesure de l'offense qu'on avait reçue ; mais la perfection ne se trouve ici que dans Jésus-Christ et dans ses commandements : «A celui qui vous frappe sur une joue, présentez encore l'autre». En effet, lorsque les médecins reçoivent des coups de pieds des furieux qu'ils cherchent à guérir, leur compassion pour ces malheureux redouble, et ils s'appliquent avec plus de zèle à leur guérison ; telle est la conduite que vous devez tenir à l'égard de ceux qui vous persécutent ; car ce sont eux surtout qui sont malades, ne cessez donc point de leur prodiguer des soins, jusqu'à ce qu'ils aient vomi toute l'amertume de leur âme ; alors ils vous rendront grâces, et Dieu lui-même vous couronnera, pour avoir délivré votre frère d'une maladie des plus funestes.

 

Saint Basile

Presque tous les hommes transgressent ce commandement, surtout les puissants et les princes, non seulement quand on les outrage, mais encore quand on leur manque de respect ; ils regardent comme des ennemis tous ceux qui ne leur rendent pas les honneurs dont ils se croient dignes. Or, c'est une grande honte pour un prince que de céder si facilement à la vengeance; comment, en effet, pourra-t-il enseigner aux autres à ne point rendre le mal pour le mal ( Rm 12), lui qui est si prompt à se venger de ceux qui l'offensent ?

         Les Évangiles avec les Pères de l'Église