Il est vraiment nécessaire de méditer les divines Écritures.
Pendant qu'on en donne lecture, tout homme a le devoir de se regarder, de
réfléchir et d'observer, comme dans un miroir, son âme et l'état où elle se
trouve.
Que veux-je dire ? L'homme entend la parole du Seigneur : Heureux les pauvres de cœur : le Royaume des cieux est à eux, Mt
5,3 ! Il doit donc s'examiner et s'éprouver
continuellement, en toute situation humiliante - je veux dire outrages,
déshonneur, mépris -, et regarder en lui-même pour voir si la vertu d'humilité
est en lui ou non.
Car celui qui la possède supporte tout sans
chagrin ni accablement. Rien de ce qui arrive ne blesse son coeur. Et même s'il
en est un peu blessé, il n'est pas complètement bouleversé; ou plutôt, à cause
de cette blessure au corps, simplement parce qu'il s'est un peu chagriné au
lieu d'avoir accepté avec joie ce qui arrivait, il se flagelle et se regarde
comme méprisable, il s'attriste et pleure ; il se retire dans le secret de son
âme ou de sa cellule, et, persuadé qu'il a complètement perdu sa vie, il se
prosterne devant Dieu et se confesse à lui.
Puis il entend encore : Heureux ceux qui s'affligent, Mt
5,5. Observe aussi que le Christ ne dit pas : ceux qui se sont affligés, mais : ceux qui s'affligent continuellement. Il faut donc que nous
examinions également ce point, à savoir si nous nous affligeons chaque jour.
Car si nous sommes devenus humbles par la pénitence, il est évident que nous ne
passerons pas un jour ni une nuit sans larmes, sans affliction et sans
componction.
Et encore : Heureux les doux, Mt
5,4. Celui qui s'afflige chaque jour peut-il
continuer à vivre dans la colère et non dans la douceur ? De même, en effet,
que l'eau éteint la flamme d'un foyer, de même l'affliction et les larmes éteignent
la fureur de l'âme au point que celui qui s'est maintenu dans la colère voit la
fureur de son âme se transformer et parvenir à un calme immuable.
Ensuite il doit examiner s'il a faim
et soif de la justice, Mt
5,6 de
Dieu. En effet, il peut se trouver quelqu'un qui recherche la justice sans en
avoir faim et soif, car Dieu est la justice ; ainsi l'entends-tu appeler soleil de justice, Ml
4,2. Celui qui a faim et soif de lui considère, en
tout cas, le monde et ce qui est dans le monde comme des balayures. Quant aux
honneurs des princes, il les regarde comme honteux, ou même il n'a pas la
moindre idée des honneurs des hommes.
Et encore : Heureux les miséricordieux, Mt
5,7. Qui sont donc les miséricordieux ? Ceux qui
sont devenus pauvres pour Celui qui s'est appauvri pour nous. Alors qu'ils
n'ont rien à donner, ils se soucient constamment d'une manière spirituelle, des
pauvres, des veuves, des orphelins et des malades. Ils les entourent de
nombreuses attentions et de leur compassion, et versent sur eux des larmes
brûlantes, à l'instar de Job qui disait : N'ai-je point pleuré sur
tous les infirmes ? Jb
30,25. Et lorsqu'ils ont de quoi, ils leur font
l'aumône avec joie et à tous ils rappellent de bon coeur les moyens de sauver
leurs âmes, pour obéir à Celui qui a dit : Ce que j'ai appris avec simplicité, j'en fais part sans
réserve, Sg
7,13.
C'est eux que le Seigneur déclare bienheureux, eux
les vrais miséricordieux : aussi est-ce à partir d'une telle miséricorde, comme
par un degré, qu'ils s'élèvent et parviennent à la parfaite pureté de l'âme.
C'est donc à ce titre que Dieu a également proclamé
bienheureux ceux qui ont le coeur pur, quand il déclare : Heureux
les coeurs purs : ils verront Dieu, Mt
5,8 ! L'âme ainsi purifiée voit Dieu en
tout et se réconcilie avec lui. La paix s'établit entre Dieu, notre Créateur,
et l'âme qui était naguère son ennemie, et elle est alors déclarée bienheureuse
par Dieu pour avoir fait oeuvre de paix. Heureux, dit-il, les artisans de paix : ils seront appelés fils de Dieu, Mt
5,9 !
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